Publié le 02 novembre 2023
ENVIRONNEMENT
Tempête Ciaran : Comment la crise climatique rend les populations plus vulnérables
Avec des pointes jusqu'à 207 km/h, la tempête Ciaran a provoqué de nombreux dégâts dans le nord-ouest de la France. Si le lien entre le changement climatique et cet évènement ne peut pas être directement établi, certains paramètres de la crise climatique comme la montée des eaux et le feuillage tardif des arbres amplifient les impacts de l'évènement et la vulnérabilité des populations.

@Fred Tanneau / AFP
Lignes ferroviaires coupées toute la journée, ponts fermés à la circulation, accès aux forêts interdit... La tempête Ciaran s'est abattue sur le nord-ouest de la France avec une rare violence. Dans la nuit du 1er au 2 novembre, les rafales ont atteint 207 km/h à la pointe du Raz, en Bretagne. Plusieurs records absolus ont été atteints comme à Ploudalmézeau, dans le Finistère, avec 172 km/h enregistrés.
Les dernières actualisations de la tempête #Ciaran suggèrent un décalage vers le sud.
Si ce scénario se confirme, c'est un cauchemar. La Bretagne (dès 2h du matin) puis le Cotentin (dès 5h) seront balayées par des rafales à 180+km/h sur les côtes et 150+km/h dans les terres. pic.twitter.com/shZcEBTKZh— Dr. Serge Zaka (Dr. Zarge) (@SergeZaka) November 1, 2023
Les dégâts sont considérables entre les chutes d'arbres, les bâtiments effondrés et les palissades emportées. 1,2 million de foyers sont privés d'électricité ce jeudi 2 novembre, dont 780 000 en Bretagne "en raison d'arbres tombés sur les lignes électriques, pylônes et câbles arrachés", précise le gestionnaire de distribution d'électricité Enedis dans un communiqué.
Presqu'île de Crozon, port de Morgat ce matin... les bateaux et les arbres ont volés cette nuit #TempeteCiaran #Ciaran pic.twitter.com/xVrPu8WLkR
— Spinello Tolomei (@CymSte) November 2, 2023
Un chauffeur routier a trouvé la mort dans l'Aisne pendant la nuit à la suite d'une chute d'arbre. Le ministère de l'Intérieur a annoncé 16 blessés, dont sept pompiers. La tempête poursuit son chemin vers le nord, où 8 départements sont en vigilance orange ce jeudi, et a atteint le sud de l'Angleterre. La majeure partie du littoral français est en vigilance orange pour vagues et submersion. Mais cette tempête a-t-elle un lien avec la crise climatique ?
La vulnérabilité des populations aux tempêtes augmente avec la crise climatique
"On ne peut pas lier directement cette tempête au changement climatique, notamment sur le paramètre vent", précise le météorologue Serge Zaka au micro de France Bleu Paris. Le climatologue Christophe Cassou, co-auteur du sixième rapport d'évaluation du GIEC, renchérit auprès de France 2 : "Les tempêtes sont des entités météorologiques très complexes avec de nombreux processus. Le changement climatique amplifie certains processus et en atténue d'autres, c'est pourquoi il est difficile de dégager un consensus".
Toutefois, le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) s'accorde sur une augmentation de la proportion d'ouragans de classe 4 et 5, particulièrement intenses. Ces phénomènes localisés peuvent provoquer de fortes tempêtes en Europe à l'image de la tempête Daniel survenue en Grèce, en Lybie et en Turquie début septembre. Les ouragans, tels Otis qui a dévasté la ville balnéaire d'Acapulco au Mexique le 25 octobre, sont nourris par l'augmentation d'humidité au-dessus des mers à cause des hautes températures.
Le changement climatique amplifie déjà la vulnérabilité des populations aux tempêtes. "Aujourd'hui, par exemple, les impacts sur la végétation, et notamment les arbres, sont plus forts qu'il y a 30 ou 40 ans parce que les arbres perdent leurs feuilles plus tard, note Chistophe Cassou, interrogé par TF1. Les tempêtes d'octobre ou novembre frappent alors que les arbres ont encore leurs feuilles, et offrent donc plus de prise au vent".
La hausse du niveau des mers aggrave le phénomène de submersion
L'élévation du niveau des mers, causée par le changement climatique, peut également amplifier le phénomène de submersion, c'est-à-dire des inondations côtières. Avec une eau plus haute, les marées et vagues liées aux tempêtes peuvent dépasser plus rapidement le niveau des côtes. "Les submersions marines risquent d'être très importantes pour cette tempête. Le niveau de la mer est monté beaucoup plus haut qu'au début du XXème siècle, avec une forte accélération du phénomène ces 25 dernières années", ajoute le climatologue.
Un constat partagé par Thibault Laconde, ingénieur fondateur de l'application Callendar spécialisée dans l'évaluation des risques climatiques. "La hausse du niveau de la mer peut aggraver les risques pour des zones proches des côtes ou dans des lieux où les risques, déjà importants, ne se sont pas encore réalisés", explique-t-il à Novethic, tout en nuançant : "L'élévation du niveau de la mer est relativement lente est bien connue, elle pose des questions surtout pour les projets d'aménagement à long terme comme les centrales nucléaires".
Avec 3 millimètres d'élévation par an mesurés en Bretagne, l'élévation pourrait sembler dérisoire. Toutefois, le niveau a déjà augmenté de 30 centimètres depuis 300 ans et le rythme s'accélère. Une hausse de 25 centimètres est prévue d'ici 2050 en Bretagne dans un scénario optimiste à 1,5 degré de réchauffement.
Fanny Breuneval