Publié le 13 décembre 2019
ENVIRONNEMENT
Ambition, expulsions, Greta... Cinq infos à retenir de la seconde semaine de la COP25
Officiellement, la COP25 doit s’achever ce vendredi 13 décembre, mais les discussions vont sans doute déborder ce week-end. L’enjeu est de s’accorder sur les dernières règles de mise en œuvre de l’Accord de Paris et d’assurer la relève de l’ambition pour 2020. La société civile et les entreprises ont maintenu la pression toute la semaine.

@UNFCCC
1) Accord de Paris : choisir entre succès et ambition
Beaucoup d'observateurs s'accordent à dire qu'il vaut mieux ne pas avoir d'accord qu'un accord au rabais avec des règles qui ne permettraient pas de respecter l'ambition de l'Accord de Paris. Les points d'achoppement sur l'article 6, concernant les marchés carbone, portent sur la double comptabilité des émissions et l'utilisation de crédits carbone issus du Protocole de Kyoto, défendues par le Brésil et l'Australie notamment. Cela met en cause l'intégrité environnementale.
Aucune avancée non plus sur la question des pertes et préjudices, avec une dichotomie très forte entre pays en développement, qui affrontent déjà les impacts du changement climatique sans pouvoir s'adapter, et les pays développés, en particulier les États-Unis (officiellement toujours dans l'Accord), qui refusent de débloquer de nouveaux financements. La question du respect des droits humains dans les projets de compensation carbone a également été abandonnée.
2) 177 nouvelles entreprises s'engagent à s'aligner sur l'objectif 1,5°C
177 nouvelles entreprises, représentant 5,8 millions d’employés, s’engagent à mettre en place des objectifs climatiques alignés avec un scénario 1,5°C et à atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050. Parmi les dernières entreprises à avoir rejoint l’initiative Science Based Targets, on retrouve majoritairement des sociétés européennes : Chanel, Decathlon, Auchan Retail Portugal, Carlsberg Group ou encore Tesco. Pour la première fois des compagnies aériennes rejoignent aussi l’initiative avec par exemple l’Espagnole Iberia.
Au total, 741 entreprises mondiales sont mobilisées dans l’initiative Science Based Targets et 312 ont vu leurs objectifs validés, dont 30 sociétés françaises. Par ailleurs, plus de 500 entreprises certifiées B Corp à travers le monde se sont également engagées à atteindre la neutralité carbone dès 2030, avec vingt ans d’avance sur l’Accord de Paris. Parmi elles, on retrouve Patagonia, The Body Shop, The Guardian ou encore Aguas Danone Espagne.
3) La relève de l’ambition n’embarque toujours pas les plus gros émetteurs
Sans surprise, la relève de l’ambition se limite aux États les plus vulnérables et à l’Union européenne qui vient de présenter son Green Deal. Les plus grands émetteurs que sont la Chine, les États-Unis, le Canada ou l’Australie n’ont pas souhaité rejoindre la coalition pour une haute ambition. Ainsi, seuls 80 États parties à la Ccnucc ont présenté ou se sont engagés à présenter une nouvelle contribution climatique nationale (NDC) en 2020. Ils représentent 10,5 % des émissions mondiales de CO2.
L’Inde a également fait savoir qu’elle ne relèverait pas ses objectifs climatiques avant 2023, date du bilan global prévu dans l’Accord de Paris. Avec le Brésil et la Chine, ils réclament, dans un communiqué commun, que les pays développés "honorent[nt] leurs engagements pré-2020", dans le cadre du Protocole de Kyoto. Le ministre de l’environnement japonais affirme de son côté "se battre avec son gouvernement", pour obtenir un nouveau plan climatique en 2020.
4) Des militants expulsés
Fait assez inédit, 200 membres de la société civile ont été expulsés de l’enceinte de la COP25 mercredi 11 décembre après une manifestation dans le hall, près de la salle où se tenaient les négociations officielles. Le concert de casseroles a été interrompu par le personnel de sécurité de la Ccnucc et les activistes se sont vu suspendre leur badge. Les manifestants entendaient mettre en garde contre un échec des négociations.
These pictures will go around the world.
After chanting for climate justice inside #COP25, young people & indigenous leaders were pushed outside the conference. People were bullied & kicked. Then we were kettled on the street & refused to get back in – but we won't be silenced! pic.twitter.com/brMlfFXwsr— Fridays For Future Germany (@FridayForFuture) December 11, 2019
"Au lieu de mettre à la porte les pollueurs, la COP25 a exclu les représentants du peuple. Au lieu de nous écouter, ils essaient de nous réduire au silence. Nous avons été poussés, intimidés et malmenés. Une femme indigène n'a pas été autorisée à rentrer pour allaiter son bébé" explique le CCFD-Terres solidaire. En 2009, lors de la COP15 de Copenhague, certaines ONG comme Les Amis de la Terre ou Via Campesina avaient aussi été sorties du centre de négociations.
5) "Les jeunes sont désespérés : nous voulons un signal d’espoir", lance Greta Thunberg
"Une poignée de pays riches a promis de réduire ses émissions de gaz à effet de serre de tant de pourcents, d'ici telle ou telle année, ou d'atteindre la neutralité climatique en tant d'années", a déclaré Greta Thunberg, désignée "personnalité de l'année" par le magazine Time. "Cela semble impressionnant au premier abord, mais même si les intentions sont bonnes, ce n'est pas du leadership, ce n'est pas montrer la voie, c'est une tromperie", a accusé l'adolescente, relevant que des pans entiers d'activité sont exclus des engagements des États.
"Je participe à ces COP depuis 25 ans et je n'ai jamais vu une telle fracture entre ce qui se passe entre ces murs et ce qui se passe dehors", a aussi expliqué Jennifer Morgan, présidente de Greenpeace. "Les solutions sont juste sous nos yeux. Mais où sont les champions ? Où sont les leaders ?", a-t-elle lancé sous les applaudissements. "Nous vivons des jours sombres (...). Le cœur de l'accord de Paris bat toujours, mais à peine".
Concepcion Alvarez @conce1