Publié le 09 décembre 2015

ENVIRONNEMENT
COP21 : des négociations étrangement ... calmes
A 48 heures de la fin (prévue) de la COP21, la conférence onusienne sur le climat se démarque par le calme de ses négociations. Les revendications sont bien présentes et les discussions âpres autour des grands sujets de tension tels que le financement, les ambitions et la différenciation. Mais aucun coup de gueule n'a encore retenti dans les allées du Bourget. Pour les ONG, cela n'est cependant pas forcément de bon augure.

STEPHANE MAHE/ POOL/ AFP
Pas de débordement, pas de portes qui claquent. Tout au plus quelques irritations et critiques. La COP21 se déroule presque dans le calme feutré d'un salon professionnel. Lors de l'ouverture de la conférence, pas un des 150 chefs d'Etat qui s'étaient déplacés, n'a même osé une remise en question de l'importance de l'enjeu. Faut-il y voir l'incidence du lieu de négociations, le parc des expositions du Bourget, qui a plus l'habitude de ce genre d’événement ?
A Copenhague, la dernière COP d'envergure aussi importante que celle de Paris, le chef du G77 avait dénoncé le texte sorti du chapeau par la présidence danoise en le qualifiant de "pacte suicidaire". A Bonn, en octobre, lors du dernier round de négociations préliminaires, c'est de nouveau le G77 qui avait tapé du point sur la table en expliquant que l'aide du Nord vers le Sud était pour eux "une question de vie ou de mort". Mais depuis le 30 novembre, aucun pays ou groupe n'a encore vraiment haussé le ton.
Un calme qu'ont du mal à comprendre les ONG qui, elles, se montrent inquiètes vis-à-vis d'un brouillon qui en l'état "est incapable de répondre aux grands enjeux de justice et d'équité", selon le Réseau Action Climat (RAC). "J'ai du mal à comprendre qu'un certain nombre de pays vulnérables ne se manifeste pas plus, souligne ainsi Jean-François Julliard, le directeur de Greenpeace France. Peut-être que beaucoup de pays ont péché par excès de confiance envers la présidence française".
Vers un compromis mou ?
Cette présidence française, dont tout le monde loue l'organisation, aurait-elle endormie les plus vindicatifs ? En réalité, l'organisation de nombreuses réunions en amont de la COP21 a sans doute désamorcé en partie les plus vives critiques. "Il y a eu une gestion très fine de la présidence française, elle a anticipé tous les sursauts possibles, notamment de la part des pays africains. Les annonces en marge de la COP (sur les énergies renouvelables ou l'adaptation notamment) font qu'ils s'y retrouvent", souligne Célia Gautier, du RAC France.
La "coalition des hautes ambitions" lancée le 8 décembre par l'Union européenne et 79 pays particulièrement exposés aux changements climatiques (des îles Marshall aux îles Tuvalu en passant par la Gambie) et à laquelle se sont ralliés les Etats-Unis ce mercredi, va en ce sens. Elle porte notamment l'objectif d'une limitation de la hausse de la température globale à 1,5°C à la fin du siècle, une revendication forte des pays en développement. Et qui semble de mieux en mieux partie pour figurer dans le texte. Sans pour autant bénéficier des moyens qui permettraient de les atteindre en l'état actuel du document regrettent cependant les ONG.
"Mais tous les compromis qui sont en train de se faire derrière des portes closes, sans éclat de voix, répondent encore à des intérêts nationaux de court terme. Aucun pays ne défend vraiment l'intérêt des populations, des plus vulnérables, des pays menacés", dénonce ainsi Célia Gautier. Et puis "beaucoup d'États ont intérêt à ce que les choses n'avancent pas", affirme la militante.
Enfin, il n'est sans doute pas facile pour les petits pays de faire entendre leurs voix dans ces négociations, où les groupes de discussion se multiplient. D'autant que le groupe du G77, dans lequel ils sont coalisés, est très hétérogène. Il comprend 133 pays en développement. Des Nations aussi différentes que le Népal, le Vénézuela et l'Afrique du Sud (et auquel s'adjoint souvent la Chine).
Mais dans cette négociation où la décision finale de l'accord doit se faire par compromis, "tous les pays sont responsables" de ce qu'il en sortira, soulignent les ONG.