Publié le 26 juillet 2022
ENVIRONNEMENT
Bombes climatiques : le contournement autoroutier de Rouen, un projet à rebours de l’urgence climatique
Alors que le trafic routier est l’un des principaux émetteurs de gaz à effet de serre, la construction de nouvelles infrastructures sur le territoire interroge. À Rouen, le contournement est de la métropole via deux autoroutes payantes soulève une forte opposition, en raison de son très fort impact sur le climat et l’environnement. Toute la semaine, Novethic vous propose un tour de France des projets les plus climaticides, en s’appuyant sur l’étude "Projet local, impact global" publiée en mai dernier par le cabinet BL Évolution et l’association Terres de luttes*.

@iStock IvanSpasic
C’est un serpent de mer, vieux de plus de cinquante ans. Le projet de contournement Est de Rouen au travers d’une autoroute payante de 41,5 km permettant de relier l’A28 à l’A13 et l’A154, et divisée en deux branches baptisées A133 et A134, ne passe pas. D’un côté, on assure que la qualité de vie des habitants s’en trouvera améliorée alors que Rouen est la seule métropole française de cette taille sans contournement routier. De l’autre, les opposants dénoncent un projet d'intérêt économique et non d'intérêt général.
"Ce projet désengorgera la métropole de Rouen et améliorera la qualité de vie de ses habitants, qui passeront moins de temps dans les embouteillages", déclarait en fin d’année dernière Jean Castex dans Paris-Normandie. L’ex-Premier ministre avait alors donné son feu vert au projet dont les travaux devraient commencer entre 2027 et 2028, pour une mise en service en 2030-2031. Les subventions publiques devraient couvrir plus de la moitié du coût, estimé à environ un milliard d’euros, dont 200 millions d’euros provenant de la région Seine-Maritime.
"Nous proposons un report modal des trajets courts"
"Les habitants du territoire ne seront pas concernés par ce contournement payant. Il profitera davantage au trafic de transit, à ceux qui ne font que traverser la métropole. On propose plutôt un report modal des marchandises vers le fret et le fluvial. En outre, à Rouen, 500 000 déplacements quotidiens réalisés en voiture font moins de 5 kilomètres. Ici encore, nous proposons un report modal vers le vélo ou les transports en commun. Ce sont de telles mesures qui permettront de réellement décongestionner la métropole", argumente Guillaume Grima, du collectif "Non à l’A133-134".
Aujourd'hui, il n'y a pas que les marches #LookUp
ACTION EN COURS SUR #ROUEN
NON au projet de "pseudo-contournement" Est de Rouen
Citoyen·ne·s, collectifs & associations s’opposent au projet d’autoroute A133-A134, projet climaticide, projet d'un autre temps... pic.twitter.com/H0N9eBCZSZ— Extinction Rebellion Rouen (@XR_Rouen) March 12, 2022
Si tous les recours ont désormais été purgés au civil, en vain, le collectif "Non à l’A133-134" n’entend pas baisser les armes pour autant. "On prépare des recours au pénal sur les atteintes à la santé dues à la pollution que va engendrer cette nouvelle infrastructure autoroutière. On peut aussi attaquer les collectivités et l’État pour irresponsabilité climatique. On scrutera également de près les contrats passés avec le futur concessionnaire", détaille Guillaume Grima.
Le secteur des transports est le seul qui connaît une hausse des émissions
Selon l’étude "Projet local, impact global" publiée en mai dernier par le cabinet BL Évolution et l’association Terres de luttes*, qui étudie 65 projets, ce projet autoroutier serait l’un des plus impactants actuellement menés en France, en termes d’émissions de gaz à effet de serre avec un million de tonnes de CO2 émis sur 30 ans et 500 hectares artificialisés. Le transport routier représente 93 % des émissions des transports et les émissions du secteur ont augmenté de 9 % entre 1990 et 2019. C’est le seul secteur où les émissions ont augmentées sur cette période. Les réseaux routiers ont représenté 16 % des nouvelles surfaces artificialisées entre 2006 et 2014, soit 78 000 hectares.
"Les projets autoroutiers ont un impact important en termes d’artificialisation des sols et d’émission de gaz à effet de serre. Les projets tablent sur une augmentation du nombre de véhicules, ce qui est aligné avec la vision inscrite dans la SNBC mais pose question vis-à-vis de la trajectoire de réduction nécessaire du secteur. Même pour les projets dont l’objectif est un report du trafic, la diminution des émissions de gaz à effet de serre projetée ne compense pas les émissions induites par la construction de l’infrastructure", notent les auteurs.
Concepcion Alvarez @conce1
*Retrouvez ici l'intégralité de l'étude "Projet local, impact global" publiée en mai 2022 par le cabinet BL Évolution et l’association Terres de luttes.