Publié le 4 octobre 2023
Fumée blanche à l'horizon. Les eurodéputés de la commission Environnement du Parlement européen ont finalement validé la nomination de Wopke Hoekstra comme "Mr Climat" de l'UE, à deux mois de la COP28. Son passage chez le pétrolier Shell et le cabinet McKinsey ainsi que son manque d'allant sur le sujet ont été longuement questionnés. 

Il aura fallu plus de trois heures d’audition et des engagements apposés par écrit pour que les eurodéputés de la commission Environnement du Parlement européen valident finalement le Néerlandais Wopke Hoekstra au portefeuille climat de la Commission européenne ce mercredi 4 octobre. Proposée par la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, sa nomination était loin d’être gagnée. En cause, son curriculum vitae pas franchement porté sur les sujets climatiques.
Wopke Hoekstra (issu du Parti Populaire Européen), ancien ministre des Finances puis des Affaires étrangères des Pays-Bas, a travaillé pour la compagnie pétro-gazière Shell de 2000 à 2005 avant de rejoindre le cabinet McKinsey pendant plus de dix ans, de 2006 à 2017. "Par rapport à son audition, nous avons pu obtenir des réponses claires avec un calendrier précis qui nous paraît désormais satisfaisant. Sa nomination a donc obtenu les deux tiers des voix, incluant le soutien du PPE, S&D, Renew et des Verts", a expliqué Pascal Canfin (Renew), président de la commission Envi du Parlement lors d’une conférence de presse.
Les eurodéputés ont également validé l’attribution de la coordination du Pacte vert à l’actuel vice-président de l’exécutif européen, le Slovaque Maros Sefcovic. Issu de la même formation que le nouveau Premier ministre populiste Robert Fico, considéré comme prorusse, les élus lui avaient demandé de confirmer son engagement à supprimer les approvisionnements de l’UE en hydrocarbures russes. 

L’objectif de -90% inscrit par écrit


Dans sa réponse écrite, Wopke Hoekstra s’est engagé à demander à McKinsey de publier la liste de ses missions et des entreprises pour lesquelles il a travaillé. De son côté, Maros Sefcovic a assuré qu’il porterait la même parole dans les 27 capitales de l’UE, y compris à Brastislava. Des éléments concrets ont également été apportés par écrit sur un objectif de réduction des émissions d’au moins 90% d’ici 2040, conformément à ce que préconisent les scientifiques. "S’ils sont validés, cela serait énorme. Pour rappel, -90% signifie sortir du gaz", a réagi sur Twitter Neil Makaroff, directeur de Strategic Perspectives.
Enfin, sur les textes qui seront portés au cours des prochains mois, un calendrier précis a été défini. "Tous les textes ne seront pas sur la table mais ceux que nous avons jugés prioritaires ont désormais une date précise", a expliqué Pascal Canfin. La réglementation sur les micro-plastiques sera ainsi présentée en octobre, celle sur la surveillance des forêts en novembre et celle sur le bien-être des animaux pendant leur transport en décembre. Rien en revanche sur la révision de la réglementation Reach sur les substances chimiques, déjà reportée plusieurs fois et contre laquelle un intense lobbying s’exerce.
Lors de son audition lundi soir, Wopke Hoekstra avait défendu l’idée d’une taxe sur les énergies fossiles et notamment sur le secteur aérien. Il avait également soutenu la fin des subventions aux énergies fossiles. Mais cela n’avait pas suffi à convaincre les eurodéputés qui n’étaient pas parvenus à obtenir le seuil requis des deux-tiers des voix lors d’un premier vote lundi soir. Désormais, un vote de confirmation en plénière est attendu jeudi 5 octobre. Sauf surprise, il devrait valider la position des eurodéputés de la commission Envi.

"Un message affligeant"


Pour les organisations environnementales, qui avaient manifesté en début de semaine à Bruxelles, vêtus de costumes noirs sur fond de musique d’enterrement pour figurer la mort du Pacte vert, c’est la douche froide. Une pétition signée par plus de 100 000 personnes appelait à empêcher ces nominations. "Nommer un ancien employé de Shell pour diriger la politique climatique de l’Europe alors que nous traversons une crise climatique déclenchée par l’industrie des combustibles fossiles est un message affligeant", avait déploré Jagoda Munic, la directrice de Friends of the Earth Europe.
"Son expérience gouvernementale sera un atout majeur, en particulier pour la diplomatie climatique de l’Europe dans la perspective de la COP28", qui se tiendra en novembre et décembre à Dubaï, avait au contraire défendu Ursula von der Leyen. À neuf mois des élections européennes, celle-ci était obligée de donner des gages à son parti, le PPE, alors qu’une partie de l’aile la plus conservatrice tente de freiner le Pacte vert.
Concepcion Alvarez

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