Publié le 24 avril 2023

ENVIRONNEMENT

L’autoroute A69 de Toulouse-Castres, à contre-sens de l'urgence écologique

20 minutes. C'est ce que va permettre de gagner le projet d'autoroute Castres-Toulouse en 2025. Un chantier très décrié pour son impact environnemental. Ce week-end, des milliers de manifestants se sont ainsi déplacés pour réclamer l'arrêt immédiat des travaux, quelques semaines après la mobilisation contre les mégabassines à Sainte-Soline. 

A69 autoroute LIONEL BONAVENTURE AFP
Le péage sur l'autoroute qui permettra de gagner 20 minutes entre Castres et Toulouse coûtera 17 euros.
LIONEL BONAVENTURE / AFP

C’est un nouveau sujet qui cristallise les tensions. Après les mégabassines de Sainte-Soline accusées de favoriser l’accaparement de l’eau, bien commun, par quelques agriculteurs, c’est l’autoroute A69 Toulouse-Castres qui fait l’objet de contestations. Samedi 22 avril, 8 200 manifestants selon les ONG (4 500 selon la police) ont ainsi manifesté à Saïx dans le Tarn dénonçant un projet qu'ils jugent contradictoire avec l'urgence climatique et réclamant "moins de goudron", lors d'une mobilisation festive, mais sous haute surveillance.

Dansant au rythme des percussions, parfois sous la pluie, les manifestants ont marché tout l'après-midi sur des sentiers et à travers bois, suivant une partie du tracé de la future autoroute. Certains brandissaient des banderoles : "Moins d'énergie, moins de voitures, moins de goudron" ou "A69, une autoroute en cul-de-sac qui se finira en tête à queue".

17 euros aller-retour 

Organisateurs de la mobilisation, le collectif La voie est libre, Extinction Rebellion, la Confédération paysanne et les Soulèvements de la Terre (SLT) ont demandé "l'arrêt immédiat" du chantier. Lors d'une conférence de presse, ils ont à nouveau proposé un aménagement de la nationale existante et dénoncé la perte de terres agricoles ou de biodiversité qu'entraînerait la construction de cette portion d'autoroute de 53 kilomètres. Dénonçant aussi "une injustice sociale organisée", ils ont déploré le coût du trajet Toulouse-Castres, qui pourrait atteindre 17 euros aller-retour.

"Si on veut être cohérent, ce projet doit être abandonné", a pour sa part estimé le député LFI Manuel Bompard, présent dans la manifestation. Pour Ghislaine Richter, 27 ans, venue de Montpellier, "il faut qu'on se mobilise contre les intérêts financiers de certains. Le bien commun n'est pas respecté". "C'est un projet qui date des années 90, qui pense le territoire et l'aménagement du territoire uniquement avec la voiture et les autoroutes. Et en fait ça, c'est plus possible !", a déclaré à l'AFP Sandrine Rousseau, députée EELV, venue aussi sur place, estimant qu'"il n'y a vraiment pas besoin d'une autoroute en plus".

"Les travaux ont débuté" 

Mais d'autres soutiennent le projet, qui réduirait d'une vingtaine de minutes le trajet Castres-Toulouse en 2025, d'une durée d'un peu plus d'une heure aujourd'hui. Atosca, concessionnaire privé de l'A69, le juge "exemplaire" pour l'environnement ou l'emploi. Concernant les terres agricoles, l'emprise prévue a été réduite de 380 à 300 hectares, selon son directeur général Martial Gerlinger.

Le ministère des Transports a précisé vendredi 21 avril que Clément Beaune avait demandé dès janvier une revue des sept projets autoroutiers en cours, "au regard des enjeux actuels : lutte contre l'artificialisation des sols, réduction des émissions de CO2, mais aussi désenclavement des territoires". "Le projet d'A69 ne fait pas exception à cette démarche de réexamen", a ajouté le ministère, en nuançant du fait de son avancement : "les travaux ont débuté, et un contrat engageant l'État a été signé avec le concessionnaire".

Le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, avait averti vendredi qu'"on peut en débattre, mais pas en découdre", ajoutant qu'il n'y a "pas de renseignement qui démontre que dans le Tarn les gens aient une envie absolue de violence". Des déclarations en deçà de ses propos du 5 avril, classant l'A69 parmi 42 projets "susceptibles de faire naître des contestations extrêmement violentes".

Des opposants l'avaient accusé de "mettre le feu aux poudres", dans une région où le souvenir de Rémi Fraisse reste présent. Le 26 octobre 2014, ce militant écologiste de 21 ans avait été retrouvé mort sur le chantier du barrage de Sivens (Tarn), à une soixantaine de kilomètres de Saïx, après des affrontements d'opposants avec les forces de l'ordre. Cinq mois plus tard, le projet était abandonné au profit d'une retenue d'eau réduite de moitié, et le gouvernement faisait évacuer le site occupé pendant seize mois par des "zadistes".

La rédaction avec AFP


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