Publié le 27 juillet 2015
ENVIRONNEMENT
Allemagne : l’agriculture conventionnelle, l’autre grand émetteur de gaz à effet de serre
L’Allemagne est le premier pays émetteur de gaz à effet de serre (GES) en Europe, et le septième dans le monde. En cause, le secteur de l’énergie et ses centrales à charbon, mais pas seulement. L’agriculture conventionnelle est le deuxième pollueur du pays après le secteur énergétique : 70 millions de tonnes, soit 7,5% des émissions totales. Alors que Berlin est face à un tournant énergétique, un rapport publié par l’Agence fédérale de l’environnement montre l’immobilisme du secteur agricole dès qu’il s’agit d’en réduire les émissions de gaz à effet de serre. Explications.

Patrick Pleul / DPA / DPA Picture-Alliance / AFP
Dans le débat national allemand sur le climat, le secteur agricole fait peu parler de lui. Outre-Rhin, le dernier rapport publié par l’Agence fédérale de l’environnement rappelle pourtant combien ce secteur est générateur d’émissions de gaz à effet de serre (GES).
De fait, les GES issus de l’agriculture relèvent à 53% du méthane (CH4) et à 77% du protoxyde d’azote (N2O), deux gaz peu connus mais redoutables pour le climat : ils sont respectivement 25 et 300 fois plus réchauffants que le CO2. Le méthane résulte de la digestion du bétail et le protoxyde d’azote de l’épandage d’engrais et de lisier. Ce dernier contribue également à la destruction de la couche d’ozone.
21% de la surface agricole consacrée aux agrocarburants
Et rien n’est fait pour réduire les émissions issues du secteur agricole, déplorent les auteurs de l’étude, Frederike Balzer et Dietrich Schulz. En cause : une législation datant de 2004, qui prévoit des primes aux agriculteurs optant pour la culture de plantes destinées à la fabrication d’agrocarburants (en l'occurrence le maïs et le colza).
Le résultat de ce parti-pris ? L’extension rapide des surfaces agricoles destinées à la culture de mais et de colza industriels : sur les 16,7 millions d’hectares de surface agricole que compte le pays, 21% sont actuellement consacrés aux seuls agrocarburants.
Or, les méthodes employées par l’agriculture conventionnelle (qui implique l’agriculture tournée vers les agrocarburants) sont régulièrement dénoncées pour leur fort impact sur le climat. Les auteurs du rapport ne manquent pas de le souligner.
Changement de cap grâce à Bruxelles ?
L’impact environnemental considérable qui résulte de l’usage intensif de pesticides et d’engrais est également relevé. Les conséquences sont multiples : pollution des nappes phréatiques et de l’air, disparition d’espèces animales et végétales, épuisement des sols. Pour y mettre un terme, les auteurs du rapport prônent l’extension de la culture biologique, via une refonte des systèmes de subventions. Ce qui impliquerait la fin du soutien public pour les agrocarburants. Mais rien n’indique que les choses ne bougent en Allemagne.
Cet immobilisme n’est pas propre au secteur agricole allemand. De fait, les gouvernements européens peinent à mettre en place une réglementation sur un secteur déjà en difficulté - et dont les syndicats ne font pas une priorité.
Si changement de cap il y a, il pourrait venir de Bruxelles : la réforme législative prévue par l’Union européenne contraindra le secteur des agrocarburants à plafonner ses GES et à publier ses données climatiques. De quoi mettre un terme à l’inertie actuelle.