Publié le 23 novembre 2018
ÉNERGIE
Pour Nicolas Hulot, la crise des Gilets Jaunes était évitable si le gouvernement avait su réconcilier écologie et social
En pleine crise des "Gilets Jaunes", qui oppose transition écologique et pouvoir d’achat, Nicolas Hulot a décidé de sortir du silence trois mois après sa démission surprise du gouvernement. Il assure avoir anticipé cette colère des Français et avoir essayé de la prévenir en mettant en place des mesures d’accompagnement.

@L'EmissionPolitique
Trois mois après sa démission surprise du gouvernement, Nicolas Hulot est revenu devant les Français sur le plateau de "L'Émission politique". Une parole attendue alors que l’urgence climatique est de plus en plus visible, notamment à travers le dernier rapport du Giec sur un monde à +1,5°C.
D’entrée, Nicolas Hulot a témoigné d’une différence de diagnostic entre lui et Emmanuel Macron. Le premier considérant le changement climatique comme "un cancer" et le second comme "une bronchite". Dès lors, le traitement prescrit ne peut être le même. Mais c’est sur les manifestations des gilets jaunes que l’écologiste témoigne le plus sa déception vis-à-vis du gouvernement dont il fut membre.
Une taxe carbone assumée
"La France se serait bien passée de cette confrontation qui oppose l'écologie au social, alors que ma volonté était de les réconcilier. On n'y est pas parvenu et cette crise était évitable". Pour autant, il ne renie pas la taxe carbone qui alourdit le prix des carburants et est dénoncée par les manifestants : "Je l'ai défendue et je l'assume. Mais je l'assume à partir du moment où on la met en œuvre avec une dimension et un accompagnement dignes de ce nom. C'est ce qui a manqué, il faut le dire".
"Je me suis battu, et notamment les semaines qui ont précédé mon départ, pour qu'on change complètement d'échelle dans l'accompagnement social de la transition énergétique et écologique, avec des propositions concrètes", explique Nicolas Hulot. "(Mais) Je n'ai pas été entendu. On m'a opposé des raisons budgétaires, j'en ai tiré les leçons".
Sans cacher un certain énervement, il ajoute : "j'aurais préféré effectivement ne pas avoir eu raison sur le risque d'emballement que l'on connaît". Pour lui, la crise des gilets jaunes est l’illustration de l’une des périodes politiques les plus complexes où "nous devons combiner les problèmes de fin du mois avec les problèmes de fin du monde".
La place du nucléaire
L’ancien ministre de l’Écologie est aussi revenu sur la place du nucléaire alors que le gouvernement doit présenter sa feuille de route, la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), le 27 novembre prochain. Pour ce dernier, l’échéance raisonnable pour atteindre 50 % de nucléaire dans le mix électrique est 2035.
"2035 c'est bien, à condition qu'on ait un calendrier, un échéancier, qu'on nomme les réacteurs (à fermer), à condition qu'il y en ait au moins six d'ici 2028, plus Fessenheim, et qu'on ait fermé les quatre centrales à charbon", a expliqué l’ancien ministre. C’est lui qui avait assumé l’annonce du report de l’échéance de 2025 initialement prévue dans la loi de Transition énergétique.
Enfin, l’ancien animateur de télévision est revenu sur son départ du gouvernement, visiblement affecté que certains dénoncent de la lâcheté dans ce geste. "Non, (je n’ai) pas de regret, mais une tristesse car j'avais beaucoup d'espoir dans cette diversité gouvernementale, je trouvais que c'était un gage de succès". Il se réjouit toutefois que sa démission ait "provoqué une forme de sursaut". Celle-ci a pris forme à travers des tribunes en faveur du climat et une grande marche citoyenne.
Ludovic Dupin, @LudovicDupin