Publié le 03 septembre 2020
ÉNERGIE
La transition écologique largement servie par le plan de relance, mais reste à en assurer un suivi exigeant
Sur les 100 milliards d’euros du plan de relance français, 30 milliards iront directement à la transition écologique et encore bien plus indirectement selon la ministre de la Transition écologique. Selon les experts, la France se met à la hauteur du Greendeal européen pour transformer l’économie. Pour les ONG, il y a un manque important de contreparties écologiques demandées aux entreprises.

@LudovicMarin/AFP
Pour Barbara Pompili, ministre de la Transition écologique, cela ne fait aucun doute : "Il s’agit d’un pas de géant pour la transition écologique en France. Nous ne sommes pas sur la relance de l’économie, mais sur sa transformation". Son enthousiasme se rapporte à "Relance France", le plan de 100 milliards d’euros présenté par le gouvernement le 3 septembre. Le Premier ministre explique pour sa part que "France Relance est d’abord un plan destiné à servir le climat et la biodiversité".
Le plan #Francerelance est un pas de géant pour la transition écologique de la France. Par son ambition, par sa cohérence et par sa solidité, il nous fait basculer dans l’économie de demain, décarbonée et économe en ressources. pic.twitter.com/HvORZCAvMg
— Barbara Pompili (@barbarapompili) September 3, 2020
La part dédiée à la transition écologique s’élève à 30 milliards d’euros sur deux ans, ce qui représente un doublement des dépenses actuelles. Les deux gros morceaux sont dévolus à la rénovation thermique des bâtiments avec 6,7 milliards d’euros, et au déploiement de l’hydrogène vert pour 7 milliards d’euros. Mais la liste est longue comprenant des programmes en matière de villes durables, de modernisation ferroviaire, de lutte contre l’artificialisation des sols, de développement des infrastructures électriques ou de recherche dans le nucléaire. À cela s’ajoutent des éléments pour améliorer la gestion des déchets.
Sauver l’économie et mener la transition
Barbara Pompilli assure même que cela va bien plus loin que les 30 milliards puisque, selon elle, les autres pans du plan sont aussi teintés de vert, que ce soit à travers la formation dans les nouveaux emplois liés à la transition, les aides à la transformation de l’aéronautique ou de l’automobile et la relocalisation industrielle. Sur ce dernier point, le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, en charge de ce plan, met en avant la nécessité de développer des filières industrielles clés comme celle des batteries électriques ou des renouvelables.
Du côté des experts , on salue les dimensions de ce plan. Pour Sébastien Treyer, directeur général de l'Iddri (Institut du Développement Durable et des Relations Internationales), "ce plan de relance prouve que l’on peut sauver l’économie et mener la transition". Pour Xavier Timbeau de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), l’annonce française est même "une application concrète du Green Deal" européen.
Quelques réserves cependant. Selon Benoît Leguet, directeur général d'I4CE (Institute for Climate Economics), si "le Plan de relance semble à la hauteur de l’enjeu de la Stratégie nationale bas carbone, il ne s’agit pas que d’aligner des milliards mais d’aider à structurer des filières en France (bâtiment, automobile, hydrogène)". De son côté, Sébastien Treyer s’inquiète qu’il n’y ait "pas assez de visibilité sur le comité de suivi ce plan de relance". Matthieu Orphelin, député EDS, accueille aussi favorablement France Relance mais demande "une vraie évaluation climat du plan, dont l’analyse pourrait être confiée au Haut Conseil pour le Climat".
Quatre indicateurs clés
Bruno le Maire assure que le suivi hebdomadaire qu’il supervisera donnera lieu à quatre indicateurs publics afin que tous les Français puissent juger de l’avancée du chantier. Il s’agira du décaissement des 100 milliards, de la création d’emplois, des émissions de CO2 et du nombre de rénovations thermiques. Sur ce dernier point, les détails du plan de lutte contre les passoires thermiques doivent être révélés le 9 septembre prochain par la Secrétaire d’État Emmanuelle Wargon.
Du côté des ONG, en revanche, c’est un rejet unanime. Les Amis de la Terre dénonce "des aides supplémentaires prévues dans les secteurs polluants, sans aucune contrepartie". Oxfam évoque un soutien à des secteurs "sans aucune garantie qu'ils s'engagent dans une transition écologique". Greenpeace parle d’absence de "conditionnalité environnementale". Bruno le Maire répond : "Il y a des contreparties demandées, mais il ne s’agit pas de conditionnalité. Nous attendons des entreprises qu’elles jouent le jeu de la relance". "La seule mesure sans contrepartie, c’est les baisses des impôts de production. Mais elles vont bénéficier essentiellement aux TPE-PME et ETI", précise Jean Castex.
Ludovic Dupin avec la rédaction