Publié le 08 mai 2019
ÉNERGIE
[Europe] Climat, énergie... l’Union européenne fixe le cap mais peine à tenir ses ambitions
Objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre, marché carbone… L’Union européenne met en place depuis plus de dix ans des réglementations visant à inciter les États-membres à prendre en compte le réchauffement climatique. À quelques semaines des élections européennes, Novethic vous propose de revenir sur les grandes avancées obtenues ou en cours au sein de l’Union.

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Troisième émetteur d'émission de gaz à effet de serre de la planète après la Chine et les États-Unis, l’Union européenne (13 % des émissions totales) a un rôle de premier plan à jouer dans la lutte contre le changement climatique. Mais si l'UE se veut à l'avant garde dans les négociations internationales sur le climat avec des objectifs généralement ambitieux, les dissensions internes entre États membres freinent la réalité de ces ambitions.
Le sujet est pourtant l'une des préoccupations sur lesquelles se rassemblent les citoyens européens. Selon l’eurobaromètre "Future of Europe" paru en décembre 2018, 92 % des Européens pensent que les États membres devraient mettre en œuvre plus de mesures pour encourager l’efficacité énergétique et l’avènement d’une économie plus propre. Ils sont 85 % à dire que la lutte contre le réchauffement climatique et la sobriété énergétique peuvent créer de la croissance économique et des emplois.
Des objectifs fixés par l’Union européenne
Que peut donc faire l'Union pour lutter contre le changement climatique ? Si elle n’a pas la main sur le mix énergétique des États, qui reste de leur compétence propre, l’Union européenne impose malgré tout des lignes directrices contraignantes. Dès 2007, la stratégie des trois fois vingt du premier paquet climat-énergie fixait la ligne à suivre. L'objectif, pour 2020 étant que les États membres réduisent de 20 % leurs émissions de gaz à effet de serre, augmentent de 20 % les énergies renouvelables dans leur mix énergétique et améliorent de 20 % l’efficacité énergétique, le tout par rapport aux niveaux de 1990.
Pour 2030, les objectifs passent à 40 % pour les émissions et à 27 % pour le renouvelable mais aussi l’efficacité énergétique. D'ici 2050, il faudra cependant passer à la vitesse supérieure. Le projet initial de l'UE tablait sur une réduction de 80 à 95% des ses émissions de gaz à effet de serre par rapport à 1990. Mais fin décembre 2018, à l'occasion de la présentation de sa stratégie carbone pour 2050, la Commission européenne a proposé d'aller jusqu'à la neutralité carbone. Le Parlement est d'accord, reste à connaître l’avis des États membres. Or, les pays les plus dépendants du charbon (en premier lieu, l'Allemagne et la Pologne) ont tendance à freiner tout rehaussement des objectifs.
Pour atteindre ces objectifs, l’Union européenne s’est dotée d’outils, le plus connu étant le marché d’échange de quotas de CO2 créé en 2005. Inédit, il devait permettre aux entreprises fortement consommatrices d’énergie, représentant 45 % des émissions de l’Union européenne, de financer leurs projets de réduction d’émission de gaz à effet de serre. Mais celui-ci a connu un démarrage très lent et des loupés (fraudes) qui ont enrayé la machine. Le prix de la tonne de CO2 est longtemps demeuré très faible, autour de 5 euros, trop faible pour inciter les industriels à investir. Certes, entre 1990 et 2017, les émissions de gaz à effet de serre ont baissé de 22 % entre 1990 et 2017, tandis que le PIB progressait de 58 %...Mais ce sont principalement les réglementations qui ont poussé les acteurs économiques à diminuer leurs émissions.
Quelques lents progrès
Pour accélérer le mouvement, les États membres se sont donc accordés pour réformer le marché carbone. Parmi les éléments phares de la réforme, la mise en place d’une réserve de stabilité pour limiter le trop-plein de quotas carbone a permis de faire grimper le prix de la tonne de CO2 qui approche aujourd’hui les 25 euros. Un bon début mais qui reste toujours insuffisant. Selon le think-tank La Fabrique Écologique, le prix minimum pour rendre le marché carbone efficace serait de 30 euros, d'autres ONG parlent même de 40 euros...
La part des énergies renouvelables progresse également en Europe, mais demeure en-dessous des objectifs de 20 % en 2020. Selon Eurostat, l’institut de la statistique européenne, le renouvelable représentait 17,5 % de la consommation d’énergie en Europe en 2017, contre 8,5 % en 2004. Si onze pays sur les 28 ont dépassé leur objectif national (comme la Suède, la Finlande ou la Croatie), les autres patinent. C'est notamment le cas de la France qui fait partie des pays les plus éloignés de leur cible, avec seulement 16,3 % d’énergies renouvelables en 2017 pour un objectif de 23 % en 2020.
La réglementation européenne pousse les États dans la bonne direction. Mais est-ce suffisant ? Pour le Réseau Action Climat, en plus de la neutralité carbone en 2050, il faudrait générer 45 % de la consommation électrique à partir d’énergies renouvelables en 2030 et 100 % en 2050. Le chemin pour y parvenir semble encore semé d'embûches.
Arnaud Dumas @ADumas5