Publié le 09 janvier 2018
ÉNERGIE
Trump autorise les forages pétroliers sur 90 % des côtes américaines… contre 6 % jusqu’alors
Donald Trump est revenu sur les limitations posées par Barack Obama en matière de pétrole offshore. A partir de 2019, l’immense majorité des côtes étasuniennes sera ouverte à l’exploitation. Bien plus que la relance du charbon, ou la sortie de l’Accord de Paris, c’est le coup le plus dur porté à la lutte contre le changement climatique.

IPAA
Jusqu’à maintenant, malgré les effets d’annonces, Donald Trump n’avait pas fait tant de mal au climat que ça. Il a lancé un plan pour le charbon. Mais ses effets sont faibles tant la compétitivité du gaz et du solaire est forte. Il a officialisé le retrait de son pays de l’Accord de Paris. Mais immédiatement, la société civile s’est dressée comme un seul homme face à lui à travers l’initiative "We Are Still In" pour que les États-Unis respectent leurs engagements sur le climat. Pourtant, cette fois-ci, le Président américain pourrait bien faire pencher la balance du mauvais côté.
Jeudi 4 janvier, par la voix de son secrétaire aux Ressources naturelles, Ryan Zinke, il a révélé un élargissement des zones maritimes accessibles à l’exploitation pétrolière. Et il n’y est pas allé de main morte. Alors que Barack Obama avait limité ces zones à 6 % des côtes américaines (essentiellement le Golfe du Mexique), l’actuel locataire les étend au large de 90 % des littoraux. Les États les plus concernées sont la Californie, la Floride, Washington, l’Alaska.
Fronde des États côtiers
Cette mesure doit entrer en application en 2019. D’ici là, 47 autorisations de forages seront délivrées, soit la plus grande opération du genre de ces dernières décennies. "Nous voulons faire croître l'industrie énergétique offshore de notre nation, au lieu de la céder lentement aux rivages étrangers", a déclaré Ryan Zinke. "Sous la présidence de Donald Trump, nous allons (devenir) la plus forte superpuissance énergétique", assure-t-il.
Une opposition s’est rapidement manifestée dans le pays, y compris dans le camp de Donald Trump. Le gouverneur républicain de Floride, Rick Scott, a indiqué avoir "demandé à rencontrer le secrétaire Zinke pour discuter des préoccupations soulevées par ce projet et de la nécessité de retirer la Floride de la liste". Le sénateur démocrate de l’État, Bill Nelson, appuie : "Ce plan est une attaque contre l'économie de la Floride, notre sécurité nationale, la volonté de la population, et l'environnement".
D’autres sénateurs et gouverneurs de Caroline du Nord, Caroline du Sud, Virginie, New Jersey, Maryland, Oregon et Californie, s’associent à cette fronde. Ils sont soutenus en cela par plusieurs ONG, à commencer par la plus ancienne du pays : le Sierra Club. Elle juge que "Si le plan de Trump devient réalité, les marées noires seront inévitables. Même sans déversement, le pétrole offshore est source de pollution".
Règles de sécurité abaissées
Côté industrie, on se réjouit de cette annonce. L’Independent Petroleum Association of America (IPAA) estime que "Étendre l'accès à de nouvelles réserves offshore va permettre aux États-Unis de mieux exploiter son potentiel. Ce plan est le signal que l'industrie attendait pour aller de l'avant ". Le plan américain intervient au même moment où le Bureau of Safety and Environmental Enforcement (BSEE), en charge entre autres de la protection de l’environnement maritime, a allégé les règles de sécurité de l’exploitation en mer. Elles avaient été renforcées en 2010 après la marée noire dans le Golfe du Mexique. Selon Donald Trump, ces dernières "privaient le pays de milliers d’emplois et de milliards de dollars".
Ces dernières années, les États-Unis sont devenus l’un des premiers producteurs de gaz et de pétrole de la planète, au coude-à-coude avec l’Arabie Saoudite et la Russie. Avec ce plan, Washington pourrait définitivement prendre la tête. Déjà exportateur de gaz, le pays pourrait de plus devenir un exportateur massif de pétrole, une activité pourtant interdite par la loi depuis 1975 suite au premier choc pétrolier. Cette mesure était débattue la fin des années 2000 et l’essor des gaz et pétrole de schiste.
Reste une inconnue, la réponse des pétroliers à cette opportunité. L’exploitation offshore est coûteuse, même avec des règles de sécurité allégées. Or le prix de baril, très bas depuis la chute des cours en 2014, pourrait baisser encore plus si les États-Unis mettent des barils supplémentaires sur le marché. Si le parti Républicain est optimiste, les observateurs émettent des doutes sur le nombre d’entreprises qui vont remettre des offres.
Ludovic Dupin @LudovicDupin