Publié le 06 février 2014
ÉNERGIE
L'impact environnemental du projet de pipeline américain Keystone XL minimisé
Le projet d'oléoduc Keystone XL, qui prévoit de relier les gisements de sables bitumineux canadiens aux raffineries du golfe du Mexique, n'aura pas d'impact significatif sur l'environnement, d'après le rapport émis le 31 janvier par le Département d'Etat américain. Malgré cette étude, Barack Obama a affirmé qu'il attendrait les analyses d'autres experts avant de se prononcer définitivement.

© FoE USA
Barack Obama donner-t-il son feu vert pour la construction de l'oléoduc Keystone XL si décrié par les écologiques ? Le rapport rendu par le Département d'Etat américain le 31 janvier lui fournit en tout cas des arguments pour dire oui à ce projet évalué à près de 5,4 milliards de dollars et proposé par la compagnie TransCanada. L'étude qui vient d'être remise au Président américain admet bel et bien que l'exploitation des sables bitumineux de l'Alberta consomme davantage d'énergie et pollue davantage que les hydrocarbures conventionnels, mais précise que l'oléoduc en lui-même n'aurait pas d'impact significatif sur l'exploitation de ces sables bitumineux et dont sur les rejets de CO2 qui en découlent. Autrement dit, les volumes d'extraction de sables bitumineux seront les mêmes avec ou sans oléoduc. Voilà un constat qui risque de peser sur la décision de Barack Obama, qui avait jusqu'ici mis en avant l'importance de l'impact environnemental dans sa décision.
Obama joue la montre
Malgré la divulgation de ce rapport, l'administration américaine a joué la prudence. Interrogé par la chaîne Fox News, le Président américain a même précisé : « Les prochaines étapes du processus d'approbation du pipeline seront de recueillir les commentaires des agences sur le rapport du Département d'Etat, du public qui est autorisé à commenter, et de Kerry qui me donnera une recommandation ». Sur la question de la création d'emplois, d'abord évaluée à 42 000 postes à court terme, Barack Obama a néanmoins minimiser les chiffres en déclarant : « 42 000, ce n'est pas exact. Ce sera autour de quelques milliers ». Le département d'Etat lui-même s'est empressé de préciser par voie de communiqué, dès le 31 janvier, qu'il ne s'agissait pas le rapport « n'est pas un document de décision sur l'opportunité d'approuver ou de rejeter le projet proposé. Il s'agit d'une évaluation technique des impacts environnementaux potentiels liés au pipeline proposé ».
La compagnie TransCanada a évidemment salué le contenu du rapport. A travers un communiqué, elle précise : « L'analyse de l'environnement de Keystone XL publiée aujourd'hui (le 31 janvier 2014 ndlr) soutient une fois que ce gazoduc aura un impact minimal sur l'environnement », et ajoute : « Toutes les autres alternatives à Keystone XL sont des méthodes moins efficaces de transport de pétrole brut, ce qui entraîne beaucoup plus d'émissions de gaz à effet de serre, de risques de déversement de pétrole et de risques pour la sécurité publique. »
Les prochains mois s'annoncent donc cruciaux pour l'avenir de l'oléoduc. D'autres experts, comme ceux de l'Agence de protection de l'environnement (Environmental Protection Agency), le ministère de l'énergie et d'autres (départements de la Défense, du Transport, du Commerce...), vont rendre leur verdict. Tous comme la société civile et le grand public, qui est invité à poser des commentaires sur le site entre le 5 février 2014 et le 7 mars 2014.
Les ONG n'ont pas dit leur dernier mot
Nul doute que les ONG vont mettre toutes leurs forces dans la bataille pour convaincre Barack Obama des risques environnementaux. Neera Tanden, président de l'ONG Center for American Progress, a d'ailleurs déclaré : « Cette étude, qui ne tient pas compte des preuves recueillies au cours de la dernière année indiquant le pipeline va augmenter notre niveau d'émissions de l'impact environnemental, est loin d'être le dernier mot sur le projet de pipeline Keystone XL. Même le Département d'État a déterminé que le pipeline créera moins de 4000 emplois temporaires et seulement 35 emplois permanents (...) Puisque nous savons que ce pipeline aggravera considérablement le problème de la pollution carbone, j'espère que le président Obama restera ferme sur son engagement de rejeter le pipeline, pris dans son discours du climat. »
Erich Pica, président des Amis de la Terre US, va dans le même sens et dénonce les conflits d'intérêts: « L'examen environnemental du Département d'État de l'oléoduc Keystone XL est une farce. Depuis le début de l'évaluation, l'industrie pétrolière a eu un pipeline direct dans l'organisme. Le plus frustrant est peut-être la collusion apparente entre le Département d'Etat, l'industrie du pétrole et du gouvernement canadien. » Pour les ONG, si Barack Obama veut démontrer son engagement en faveur de l'environnement par des faits, il doit impérativement refuser ce projet.