Publié le 07 septembre 2022
ÉNERGIE
Avec la crise énergétique, les subventions aux combustibles fossiles ont presque doublé en 2021
Les subventions aux combustibles fossiles, néfastes pour la planète, ont presque doublé en 2021 et devraient encore progresser fortement en 2022. Cela s'explique par la hausse des prix de l'énergie, exacerbée depuis février dernier par la guerre en Ukraine. En réponse, de nombreux gouvernements ont mis en place des dispositifs de soutien public aux consommateurs et/ou aux producteurs. L'OCDE et l'AIE appellent à mettre en place des mesures ciblées et à investir dans la transition bas-carbone.

iStock JBorruel
Pas de changement de cap. Les subventions aux énergies fossiles repartent à la hausse en 2021, selon une nouvelle étude publiée cette semaine par l’OCDE qui couvre les 51 plus grandes économies, représentant 85 % du total des approvisionnements en énergie de la planète. Après la forte baisse de 2020 due à la pandémie de Covid-19, le soutien public apporté aux combustibles fossiles a ainsi presque doublé sur un an, passant de 362 milliards de dollars à 697 milliards, dépassant même le niveau de 2019, qui représente la dernière année de référence.
"La tendance repart à la hausse, en raison de la hausse des prix de l’énergie associée à la reprise de l’économie mondiale, après une année 2020 particulière. On aurait pu espérer que les gouvernements profitent de la pandémie, dans un contexte de consommation faible et de prix bas, pour changer de braquet mais cela n’a pas eu lieu", confirme auprès de Novethic Grégoire Garsous, analyste au sein de l’OCDE.
Le soutien aux consommateurs est trois fois plus élevé qu'en 2020
Selon les données de l’OCDE, les transferts budgétaires et allégements fiscaux liés aux énergies fossiles dans les seules économies du G20 sont passés de 147 milliards de dollars en 2020 à 190 milliards dollars en 2021. "Le soutien aux producteurs a atteint des niveaux que l’OCDE n’avait encore jamais constatés dans le cadre de ses activités de suivi" note l'organisation. Le soutien aux consommateurs a quant à lui été porté à 531 milliards de dollars en 2021, soit plus de trois fois son niveau de 2020, sous l’effet de la flambée des prix de l’énergie.
De nombreux gouvernements ont en effet mis en place des mesures de protection pour soutenir les populations. En France par exemple, plusieurs dispositifs ont été déployés tels que la remise à la pompe, le chèque énergie ou encore le bouclier tarifaire, sans forcément cibler les ménages les plus vulnérables ou les plus touchés par les hausses de prix. Depuis l'automne 2021, ces dispositifs ont déjà coûté 24 milliards d'euros, selon le ministère de l'Economie et des Finances.
Dans une autre étude publiée début juillet, l’OCDE calcule qu’entre octobre 2021 et décembre 2022, les mesures de soutien public mises en œuvre dans 42 économies pour atténuer l’impact de la hausse des prix de l’énergie à court terme auront coûté au total 246 milliards de dollars d'argents publics, dont 169 milliards au profit des énergies fossiles.
"Beaucoup de gouvernements modifient les prix à la consommation et donc le signal prix pour les consommateurs qui n’ont plus autant d’incitations à réduire leur consommation ou à chercher des alternatives aux énergies fossiles. Ce choix met de côté les objectifs climatiques", analyse Grégoire Garsous. "C’est une situation très compliquée car certaines personnes ne peuvent absolument pas se passer des hydrocarbures. Mais ce que nous recommandons c’est de prendre des mesures ciblées et qui ne viennent pas modifier les prix", poursuit-il.
"Accroître l’investissement dans les technologies propres est la seule solution durable"
"Les subventions aux combustibles fossiles sont un obstacle à l’émergence d’un avenir plus durable, mais les problèmes auxquels les pouvoirs publics sont confrontés lorsqu’ils tentent de les surmonter sont exacerbés en période de hausse et de volatilité des prix de l’énergie", constate Fatih Birol, le directeur exécutif de l’Agence internationale de l’énergie (AIE), également partie prenante dans ces travaux. "Accroître l’investissement dans les technologies et les infrastructures des énergies propres est la seule solution durable à la crise énergétique mondiale actuelle, et le meilleur moyen de réduire l’exposition des consommateurs aux coûts élevés des combustibles".
En outre, l’OCDE alerte sur le fait que ces subventions néfastes pour l’environnement devraient encore progresser en 2022, dans un contexte de hausse continue des prix, exacerbée par la guerre en Ukraine. Ce qui va à l’encontre de l’objectif de neutralité carbone et des nombreux engagements pris pour mettre fin aux subventions aux énergies fossiles à laquelle appellent régulièrement les deux institutions… en vain.
Concepcion Alvarez @conce1