Publié le 06 septembre 2019

ÉNERGIE

[Édito vidéo] Sans Astrid, le nucléaire français ne tourne pas rond

Appliquer l’économie circulaire au nucléaire, telle était l’ambition du réacteur nucléaire Astrid. Créer un vrai cycle fermé, où les déchets sont un combustible, était même l’ambition originelle des pères du nucléaire civil dans les années 70. Mais l’officialisation de l’abandon du réacteur de quatrième génération met fin à cette idée et pose in fine la question de la poursuite du développement de l’atome dans l’Hexagone.

Deconstruction surgenerateur superphenix Creys malville EDF EDF
Le surgénérateur Superphénix de Creys-Malville, arrêté en 1997, est en cours de déconstruction.
@EDF

C’est un nouveau coup de boutoir dans la filière nucléaire française. Le gouvernement et le Commissariat à l’énergie atomique (CEA) ont confirmé l’abandon du projet de réacteur nucléaire Astrid. Il ne s’agit pas d’un réacteur comme les autres. Celui-ci, dit de quatrième génération, est capable d’utiliser l’uranium appauvri et le plutonium, issus des réacteurs actuels, comme combustible. Double avantage : réduire considérablement le danger et la radioactivité des combustibles usés et donner une indépendance énergétique à la France.

Astrid était une deuxième chance. Dans les années 90, la France avait mis en service deux réacteurs à neutrons rapides, basés sur le même principe : Phénix et Superphénix. Des démonstrateurs, certes complexes, mais qui devaient donner naissance à une filière. Ils seront cependant sacrifiés sur l’autel de la gauche plurielle en 1997, à une époque où la France avait 20 ans d’avance sur le reste du monde.

Un cycle fermé

La renaissance d’un projet de surgénérateur a eu lieu en 2010, à l’occasion de la relance de la filière nucléaire par le gouvernement Fillon. Mais plusieurs éléments sont venus étouffer les flammes de ce phénix. D’une part, le mandat de François Hollande a freiné tous nouveaux projets dans un contexte post-Fukushima très défavorable.

Ensuite les retards et surcoûts de l’EPR de Flamanville et du réacteur Jules Horowitz, destiné à la recherche et la médecine, ont rendu frileux l’État pour financer les 5 milliards d’Astrid. Enfin, l’actuel gouvernement juge que l’uranium, actuellement abondant et bon marché, ne justifie pas de développer une nouvelle génération de réacteurs avant la seconde moitié du XXIe siècle.

Sans surgénérateur de type Astrid, on peut se demander s’il est encore légitime de développer le nucléaire français. Les pères de l’atome civil - Chaban-Delmas, Boiteux, Mesmer, Yvon et bien d’autres - avaient une idée claire à l’origine. Celui d’un cycle fermé du nucléaire qui serait une véritablement circulaire. Les déchets des uns, étant le combustible des autres. Mais en annulant Astrid, des matières valorisables vont être reclassées comme des déchets… et des déchets sacrément complexes à traiter.

Ludovic Dupin @LudovicDupin


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