Le géant britannique de l’énergie vient d’annoncer la nomination d’Albert Manifold, ex-PDG du groupe de matériaux de construction CRH, au poste de président de son conseil d’administration. Il prendra officiellement ses fonctions le 1er octobre prochain, succédant à Helge Lund, en poste depuis 2019. “C’est un honneur d’être nommé président de l’une des plus grandes entreprises énergétiques du monde”, a réagi Manifold dans un communiqué, exprimant sa volonté d’”aider l’entreprise à atteindre son plein potentiel” en mettant l’accent sur “la performance”. Sous sa houlette, BP entend ainsi replacer la performance économique au cœur de sa stratégie.
Ce changement de gouvernance intervient dans un contexte de fortes turbulences pour BP. Malgré les profits records réalisés par le secteur pétrolier à la faveur de la guerre en Ukraine, les résultats de BP, eux, déçoivent. Et la pression monte. L’influent fonds activiste Elliott Management, entré récemment au capital, milite pour un recentrage sur les activités les plus rentables. Le message est clair : la transition énergétique ne doit plus freiner les rendements.
Désengagement des énergies renouvelables
“Le récent virage stratégique de BP semble motivé par la panique après l’acquisition d’actions de l’entreprise par un activiste à court terme. Nous constatons une forte frustration de la part des investisseurs à long terme à ce sujet”, a commenté Mark van Baal du collectif d’actionnaires pro-transition, Follow This, “Le nouveau président doit être compétent en matière de climat et de transition et résister aux activistes à court terme”, demande-t-il.
Un vœu qui ne semble pas avoir été entendu. Vendredi 18 juillet, quelques jours avant l’annonce du changement de gouvernance, BP a annoncé la vente de ses activités éoliennes terrestres aux Etats-Unis à l’entreprise LS Power, poursuivant son désengagement dans les énergies renouvelables. Cette opération, dont le montant n’est pas précisé, concerne dix parcs éoliens sur sept Etats américains, réunis sous le nom de BP Wind Energy North America. Elle doit être finalisée d’ici la fin de l’année, précise BP dans un communiqué.
“Nous ne sommes plus les mieux placés pour en assurer le développement“, a déclaré William Lin, vice-président exécutif gaz et énergies bas carbone du groupe britannique. Le géant britannique espère ainsi doper ses bénéfices en berne et ses redistributions aux actionnaires. L’objectif de BP est de parvenir dans ce cadre à 20 milliards de dollars de cessions d’ici 2027.”
“Nous sommes allés trop loin, trop vite”
“Notre optimisme sur une transition rapide était mal placé et nous sommes allés trop loin, trop vite”, avait déclaré le directeur général Murray Auchincloss en février, affirmant que “le pétrole et le gaz seront nécessaires pendant des décennies à venir”. Symbole de ce recul, le groupe a annoncé en avril le départ de sa vice-présidente chargée du développement durable, Giulia Chierchia, sans la remplacer.
Ce délaissement des énergies renouvelables marque un véritable virage dans la politique de BP. La major s’était dotée en 2020 du plus ambitieux plan climatique du secteur, assumant ainsi son rôle de leader. Aujourd’hui elle recule, et elle n’est pas la seule. Shell a également revu à la baisse sa stratégie de transition énergétique et abandonné son objectif de réduction des émissions de 45% d’ici 2035.