Outre-Manche, c’est un raz-de-marée rouge. Le parti travailliste a repris jeudi 5 juillet la tête du pays après 14 ans de gouvernement conservateur. Le Labour, qui avait besoin de 326 sièges à la Chambre des communes pour atteindre la majorité absolue, en a finalement remporté 84 de plus. Soit 410 sièges. “On l’a fait ! Le changement commence maintenant. Profitez de ce vote, personne ne pourra dire que vous ne l’avez pas attendu patiemment”, s’est réjoui dans la foulée de la publication des résultats le Premier ministre travailliste Keir Starmer.
We said we will stop the chaos. And we will.
We said we will turn the page. And we have.
The work of change begins today. pic.twitter.com/nROZuPdxNj
— Keir Starmer (@Keir_Starmer) July 5, 2024
Ces élections se sont jouées autour de deux grandes préoccupations, l’état du service de santé et le coût de la vie. Néanmoins, le parti travailliste a aussi placé très haut dans les débats la question du climat et des énergies propres. “Les résultats semblent clairs : cela ressemble à un raz-de-marée pour une économie verte“, a déclaré à l’annonce des résultats le fondateur et PDG de la société de services publics Octopus Energy, Greg Jackson. Pour le directeur du World Ressource Institute, Edward Davey, “le nouveau gouvernement a une formidable opportunité, et une responsabilité pressante, de montrer à ses citoyens, ainsi qu’au monde entier, ce que signifie être à nouveau leader en matière de climat, de développement et de nature”.
Le Royaume-Uni, nouveau leader dans la lutte contre la crise climatique
Et la tâche s’annonce ardue. Car le Royaume-Uni est aujourd’hui très loin d’atteindre la neutralité carbone, en raison d’une politique climatique “chaotique” ces quatorze dernières années. Qualifiant d’“erreur historique” le revirement de Rishi Sunak sur le net zéro, Keir Starmer s’est quant à lui engagé à respecter les objectifs juridiquement contraignants du pays en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre pour 2030 et à atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050.
Au-delà des frontières nationales, le parti travailliste compte bien également prendre la tête des efforts mondiaux en matière de lutte contre la crise climatique, comblant ainsi “un vide de leadership” sur la scène internationale. Pour Ed Miliband, potentiel futur secrétaire d’Etat à la sécurité énergétique et à la neutralité carbone, “il n’y a pas une minute à perdre dans la lutte contre le changement climatique. Le monde est sur la mauvaise voie, la Grande-Bretagne est sur la mauvaise voie et nous avons l’intention de changer de direction”. Néanmoins, reconnaît le nouveau Premier ministre, “on ne peut être leader international que si l’on donne le bon exemple chez soi”.
“Faire du Royaume-Uni une superpuissance énergétique propre”
Pour cela, il s’attaquera notamment à la précarité énergétique et à la flambée des prix de l’énergie qui a été l’un des facteurs clé de la forte hausse de l’inflation ces deux dernières années au Royaume-Uni. En 2021, 4,5 millions de personnes étaient en situation de précarité énergétique contre 3,5 millions en 2010, et à peine un million au début des années 2000, selon le Guardian. “La souffrance et la misère de la crise du coût de la vie ont été directement causées par l’échec des conservateurs à rendre la Grande-Bretagne résiliente, nous laissant à la merci des marchés des combustibles fossiles contrôlés par des dictateurs comme Poutine”, avait déclaré Keir Starmer lors du lancement de son plan pour l’énergie en mai dernier. Ajoutant que “la sécurité financière des familles dépend de la sécurité énergétique”.
Keir Starmer entend désormais, en tant que Premier ministre, “faire de la Grande-Bretagne une superpuissance énergétique propre, de réduire les factures, de créer des emplois et d’assurer la sécurité grâce à une électricité moins chère et sans carbone d’ici à 2030, tout en accélérant vers le net zéro”. Il compte pour cela sur la création de la GB Energy, une nouvelle entité qui aura un rôle essentiel dans la réalisation des objectifs de décarbonation, en soutenant entre autres les technologies émergentes (hydrogène vert, capture et captage de CO2, …) et en aidant les secteurs déjà existants, comme peut l’être l’éolien offshore. Le nouveau Premier ministre souhaite mettre aussi l’accent sur la production d’électricité décarbonée, alors qu’elle ne représente aujourd’hui qu’un cinquième de l’énergie utilisée au Royaume-Uni, loin derrière le gaz et le pétrole.
Parmi les autres mesures déjà mises sur la table, le parti travailliste compte également entreprendre une réforme de l’urbanisme afin de faciliter l’installation de parcs éoliens terrestres, stimuler les fermes solaires, et leur raccordement au réseau. Le développement des transports publics, et la promotion des pompes à chaleur et l’isolation seront aussi des points clés du programme. Enfin, aucune nouvelle licence ne sera accordée pour explorer et exploiter de nouveaux gisements pétroliers ou de charbon, et la fracturation hydraulique sera définitivement interdite.