Publié le 29 octobre 2019
La lutte contre la crise climatique et celle de la malnutrition sont parfois contradictoires. Une nouvelle étude qui définit les régimes alimentaires idéaux en prenant en compte ces deux facteurs révèle que dans les pays en développement, comme en Inde, lutter contre la malnutrition augmenterait considérablement l'impact carbone de l'alimentation par habitant. Les pays développés, accrocs aux produits animaux, doivent eux en réduire leur consommation, sans pour autant devenir végétarien.

Et si la lutte contre le réchauffement climatique et celle contre la faim n’étaient pas compatibles ? Une étude publiée dans la revue Global Environmental Change le 17 septembre essaie d’y répondre. Les chercheurs ont défini neuf régimes alimentaires en partant du moins végétal – une journée sans viande par semaine – au plus végétal, défini par un régime qui exclut tous les produits d’origine animale. Ils ont analysé leur impact sur 140 pays en tenant compte de leurs habitudes alimentaires.
Première mise en garde : "Nous devons veiller à ne pas trop simplifier les choses ou à recommander une solution universelle pour les défis de l’alimentation et du climat", a déclaré au Guardian, Martin Bloem, directeur du Centre Johns Hopkins pour un avenir viable, un des co-auteurs de l’étude.
Un Français émet deux fois plus de CO2 qu’un Indien en mangeant
Et de fait, comme le souligne Le Monde, un Indien émet en moyenne par an moins de 1 000 kg d’équivalent CO2 par rapport à son alimentation, c’est deux fois moins qu’un Français. Bonne nouvelle pour la planète certes, mais pas forcément pour la santé de la population qui souffre de carences et de malnutrition. En 2015, le rapport Global Nutrition réalisé par l’Institut américain International Food Policy Research Institute (IFPR) évaluait à 40 millions le nombre d’enfants atteint de retard de croissance dans le sous-continent. Sur les 140 pays étudiés, près de la moitié n’atteint pas l’apport protéinique recommandé.

"Pour ne pas souffrir de malnutrition chronique, les pays en développement devront manger plus et par conséquent augmenter leur empreinte carbone", a expliqué à l’AFP Keeve Nachman, principal auteur de l’étude. "Cela suggère que dans de nombreux pays à revenu élevé dans le monde, où nous consommons beaucoup plus de produits d’origine animale que la moyenne mondiale, il est urgent de commencer le plus tôt possible la transition vers des produits plus végétaux". Aujourd’hui, si les 140 pays de l’étude adoptaient le régime des pays développés, leur empreinte carbone, par individu, augmenterait de 135 % et de 47 % pour l’empreinte hydrique. 
Le végétarisme n’est pas la panacée
Les Français ne devront pas pour autant bannir la viande de leur alimentation. Les chercheurs avancent deux régimes alimentaires qui pourraient être appliqués dans la majorité des pays étudiés. Deux régimes qui semblent trouver le point d’équilibre entre nutrition et impact carbone. Le premier est un régime aux deux tiers végétalien. Cela suppose d’éliminer les produits d’origine animale comme les produits laitiers ou la viande de deux repas sur trois.
"Dans 95 % des pays, les régimes qui n’incluent que des produits d’origine animale pour un repas par jour consommaient moins de gaz à effet de serre que les régimes lacto-ovo-végétarien (produits laitiers, œufs, végétaux, NDR) dans lesquels la viande et le poisson étaient entièrement éliminés, en partie à cause de l’impact carbone des produits laitiers", soulignent les chercheurs, mettant en cause l’idée que le régime végétarien est le meilleur pour la planète et la santé.
Mais attention, cela dépend du pays et de la provenance de la viande. Un kilogramme de bœuf produit au Paraguay génère 17 fois plus de gaz à effet de serre qu’un kilo de bœuf danois. En cause : la déforestation induite dans la production du bœuf dans le pays sud-américain.
Dans le deuxième régime recommandé, ce sont les aliments provenant du bas de la chaîne alimentaire, comme les insectes, mollusques, petits poissons… Ils sont riches en protéines mais leur impact carbone est faible. Ces produits "offrent une plus grande flexibilité que le régime végétalien en permettant une consommation modeste de produits animaux avec des avantages comparables", notent les chercheurs.
Marina Fabre, @fabre_marina

Découvrir gratuitement l'univers Novethic
  • 2 newsletters hebdomadaires
  • Alertes quotidiennes
  • Etudes