Il y a un an, le grand déballage sur les dérives de Carlos Ghosn mettait à mal le mythe du PDG tout puissant rémunéré comme le roi-soleil d’un groupe automobile Renault Nissan dont il était la figure emblématique. Devenu un cas d’école, ce scandale permettait de rappeler que le respect d’un minimum de règles de gouvernance est indispensable à la pérennité d’une entreprise.
Avec sa fuite rocambolesque, Carlos Ghosn franchit un nouveau pas et devient en quelque sorte l’anti rôle modèle. Initialement citoyen du monde avec plusieurs nationalités, dont celle de son pays d’origine le Liban, et grand patron visionnaire qui a parié avant tout le monde sur la voiture électrique, il est aujourd’hui un paria de luxe en fuite pour échapper à son procès au Japon. Il était le symbole de la réussite mondiale pour sa nation qu’il transforme ainsi en refuge pour prisonnier à grosses fortunes en fuite. Ce, au moment où le peuple libanais est en dans la rue pour en finir avec des régimes corrompus et népotiques.
Des garde-fous qui ne fonctionnent pas
Mais la chute de Carlos Ghosn est aussi celle du mythe de l’homme providentiel, ce PDG qui mériterait une rémunération astronomique au prétexte que sans lui tout s’effondre et dont le conseil d’administration avalisait les oukases. On en vient à s’interroger sur tous ces garde-fous qui ne fonctionnent pas. Carlos Ghosn dirigeait un grand groupe international dont l’État français était actionnaire. Malgré les votes de défiance des actionnaires sur les montants astronomiques de sa rémunération, c’est le Japon qui a mis fin à cette situation à haut risque.
Pourtant la bonne gouvernance est la clef d’un système qui fonctionne, rappelle la spécialiste Viviane de Beaufort, professeure à l’ESSEC et Directrice de Centre Européen de Droit Économique (CEDE). "Tout cela est révélateur d’un mal beaucoup plus profond. Si, sur le papier, les règles s’améliorent, en pratique la culture du chef tout-puissant empêche le conseil d’administration de jouer son rôle et d’exercer ses responsabilités. Les administrateurs doivent questionner et challenger le dirigeant. Visiblement ce n’était pas le cas mais Renault-Nissan est loin d’être un cas isolé", décrit-elle.
Dans une époque aussi compliquée que la nôtre, il serait bon de revoir le modèle du dirigeant masculin tout puissant et de mettre en place des gouvernances où la concertation et la diversité sont les deux principes de base. En début d’année on peut toujours rêver !
Anne-Catherine Husson-Traore, @AC_HT, Directrice générale de Novethic
Publié le 2 janvier 2020
Lundi 30 décembre, Carlos Ghosn, l'ancien PDG de l'alliance Renault-Nissan, a fui le Japon pour rejoindre le Liban, via un passage par la Turquie. Dans son pays d'origine, il devrait échapper à la justice nippone qui le poursuit pour fraude fiscale et malversations financières. Initialement modèle de réussite et moteur pour son industrie, le patron est devenu le symbole des risques d'une gouvernance sans vrais garde-fous.
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