Publié le 15 avril 2021

FINANCE DURABLE

Une coalition de sept pays européens veut supprimer tout soutien pour les énergies fossiles à l'export

Sept pays européens veulent interdire le soutien public aux projets liés aux énergies fossiles. France, Allemagne, Royaume-Uni, Danemark, Espagne, Pays-Bas et Suède lancent la coalition "Export Finance for Future" dans laquelle ils s’engagent à refuser les garanties publiques pour les projets fossiles et à favoriser les projets compatibles avec l’Accord de Paris. À eux sept, ils représentent 45 % des crédits à l’export pour les projets fossiles des pays de l’OCDE.

Declin energies fossiles
Des pays européens veulent arrêter d'octroyer des garanties publiques pour les projets liés aux énergies fossiles.
@CCO

Sept pays dont la France, l'Allemagne et le Royaume-Uni ont lancé mercredi 14 avril la coalition "Export Finance for Future" (E3F), qui vise à mettre fin, à un horizon encore indéfini, au financement public des projets impliquant des énergies fossiles à l'export. "Nous voulons cesser de financer ailleurs ce que nous ne finançons pas chez nous. Il y aurait beaucoup d'hypocrisie et d'inefficacité à interdire le financement de l'activité fossile en France ou en Europe tout en continuant à financer des entreprises qui exportent des produits qui servent à l'utilisation, à l'extraction ou à la recherche d'énergie fossile", déclare Bruno Le Maire, le ministre de l’Économie et des finances.

Le mécanisme du financement export passe en fait par des garanties publiques. L’État, au travers de BPpifrance Export en France, garantit le prêt contracté par un acheteur étranger pour acquérir un bien fabriqué dans le pays d’origine. En France, c’est Bpifrance Export qui gère ce dispositif pour le compte de l’État.

La coalition des sept pays représente 45 % des crédits export liés aux fossiles de l'OCDE. Bruno Le Maire rappelle le rôle pionnier de la France "dans la mise en place d'une stratégie de verdissement des financements export". Depuis le 1er janvier, les garanties export françaises sont interdites pour les projets d'exploitation de pétrole extra-lourd et d'hydrocarbures non conventionnels. Elles le seront ensuite pour les produits pétroliers en 2025 et en 2035 pour les produits gaziers.

Cesser le soutien aux énergies fossiles

À défaut d'un calendrier contraignant, les États membres de la coalition, qui réunit également le Danemark, l'Espagne, les Pays-Bas et la Suède, s'engageront à cesser le soutien au secteur des énergies fossiles, tout en tenant compte des spécificités de chaque pays et de leur impact sur l'emploi. Ils s’engagent également à soutenir financièrement les projets compatibles avec l'Accord de Paris et à publier l'empreinte carbone complète de leur portefeuille de garanties export publiques à des fins de transparence.

Alors que les agences de crédits à l'exportation (ECAs) ont distribué plus de 223 milliards de dollars de subventions en 2019, leurs portefeuilles sont en effet encore très carbonés. L'industrie pétrolière et gazière a ainsi été le secteur le plus soutenu en 2018, à hauteur de 35 % du volume mondial, mais de seulement de 2 % pour la France, selon Bruno Le Maire. La Chine, le Japon et la Corée du Sud financent à eux seuls 88 % des projets de production de charbon, contribuant à l'augmentation des émissions de gaz à effet de serre.

"Il est donc impératif de changer l'orientation des financements export qui doivent être concentrés, exclusivement, et selon un calendrier contraignant, sur des projets durables", a souligné le ministre français, qui a appelé les États-Unis à rejoindre la coalition pour "donner du poids" à cette initiative.

Un manque d’ambition

Certaines ONG soulignent toutefois le manque d'ambition de la France en matière de financements à l'export, en comparaison de la Grande-Bretagne, hôte de la COP26 en novembre. "Il est difficile de se réjouir du lancement d'une coalition autour d'engagements flous : la date de fin du soutien aux énergies fossiles n'est pas précisée", a souligné auprès de l'AFP Anna-Lena Rebaud, chargée de campagne climat et transition juste aux Amis de la Terre. "Rappelons que la France prévoit de soutenir le gaz jusqu'en 2035, alors que le Royaume-Uni ne soutient plus aucune énergie fossile" depuis le 31 mars, a-t-elle ajouté.

Selon l'ONG, le gouvernement, en contradiction avec l'ambition affichée, serait sur le point d'octroyer une nouvelle garantie de 700 millions d'euros à Total pour le projet Arctic LNG 2 dans l'Arctique russe. Un projet qui, selon elle, "a pour objectif de produire et exporter l'équivalent de 7 milliards de barils de pétrole, soit 12 fois la consommation annuelle de la France".

Arnaud Dumas avec AFP


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