Publié le 28 février 2019
FINANCE DURABLE
Les catastrophes naturelles tapent dans les profits des assureurs
Les compagnies d’assurance et de réassurance ont presque toutes vu leurs résultats financiers impactés par les nombreuses catastrophes naturelles en 2018. L’augmentation des pertes économiques liées aux événements climatiques commence à inquiéter les assureurs. Mais pas à court terme.

@Brandon Perdue
La note est salée pour les compagnies d’assurance. Le coût des catastrophes naturelles qui se sont succédé aux troisième et quatrième trimestres 2018 a sévèrement entaillé leurs profits, Axa en tête. Le premier assureur français a vu son résultat net chuter de 66 %, à 2,1 milliards d’euros, en partie à cause des indemnisations liées aux événements naturels. Celles-ci lui ont coûté deux milliards d’euros sur l’année 2018, sa filiale américaine ayant été particulièrement touchée. Les feux de forêt en Californie et l’ouragan Michael lui ont respectivement coûté 335 et 261 millions d’euros.
Les autres entreprises du secteur n’affichent pas meilleure mine. Les annonces des résultats financiers s’enchaînent avec, toutes, le même message sur l’impact négatif de la succession de catastrophes naturelles en 2018. Le réassureur français Scor annonce ainsi un impact de 657 millions d’euros sur ses comptes, citant notamment les typhons en Asie, les ouragans aux Etats-Unis et les feux en Californie. Son concurrent Swiss Re chiffre le coût des catastrophes à 2,2 milliards de dollars. L’assureur américain AIG, qui affiche des comptes dans le rouge au quatrième trimestre 2018, annonce un coût de 798 millions de dollars.
Des pertes économiques à plus de 200 milliards de dollars
Cette situation, l’industrie de l’assurance va sans doute devoir s’y habituer. La fréquence des catastrophes naturelles a tendance à augmenter et les coûts suivent. Selon le rapport annuel sur les catastrophes naturelles dans le monde publié fin janvier 2019 par le courtier Aon, les pertes économiques se sont élevées à 225 milliards de dollars dans le monde en 2018, dont 90 milliards de dollars de dégâts assurés.
Des chiffres en net recul par rapport à l’année 2017, parmi les plus élevés en termes de pertes économiques (450 milliards de dollars) et de dégâts indemnisés (147 milliards de dollars) en raison notamment de trois ouragans majeurs ayant chacun dépassé les 20 milliards de dollars de coûts assurés. Un recul qu’Aon nuance aussitôt. "Le total de 225 milliards de dollars marque la troisième année consécutive de pertes liées aux catastrophes dépassant le seuil des 200 milliards de dollars et c’était la dixième fois depuis l’an 2000", souligne le courtier dans son rapport. Le rapport remarque également que l’année 2018 était la quatrième année la plus chaude depuis 1880, les cinq années les plus chaudes jamais enregistrées s’étant produites… ces cinq dernières années.
Le risque climatique préoccupant à moyen terme
Les compagnies d’assurance commencent à s’alarmer de ces chiffres. Elles sont de plus en plus nombreuses à désinvestir progressivement du charbon. Selon le dernier baromètre des risques émergents de la Fédération française de l’assurance (FFA), paru en février 2019, les sociétés d’assurance placent le réchauffement climatique en deuxième position des risques les plus élevés, mais seulement à horizon 5 ans.
A plus court terme, il a en revanche tendance à perdre en intensité. Alors qu’il était au deuxième rang de leurs préoccupations à horizon un an en 2018, il n’est plus qu’en cinquième position en 2019, devancé notamment par la cybercriminalité et les tensions sociales.
Un équilibre fragile
A leur décharge, jusqu’ici tout va (encore) bien pour l’industrie de l’assurance. Les mécanismes de réassurance (l’assurance des assureurs) demeurent suffisamment capitalisés, avec près de 600 milliards de dollars à disposition, pour absorber des coûts économiques liés aux catastrophes naturelles. Les compagnies d’assurance, malgré l’impact négatif de ces événements, ont ainsi globalement réussi à conserver des comptes dans le vert en 2018 en diversifiant leurs risques. Seules les plus petites compagnies ont réellement souffert.
L’équilibre ne tiendra toutefois qu’à condition que les événements de grande ampleur, dépassant les 25 milliards de dollars de pertes économiques et 15 milliards de dollars de dégâts assurés, ne s’enchaînent pas de manière trop rapprochée. Quelques années consécutives au même niveau que 2017 pourraient commencer à poser problème.
Arnaud Dumas @ADumas5