Publié le 18 avril 2023
ENVIRONNEMENT
Restrictions d'eau et incendie : avant même l'été, la sécheresse assoiffe les sols et les humains
L’été n’est pas encore là, mais les Pyrénées-Orientales souffrent déjà de la sécheresse. Alors que les habitants de quatre communes se sont vus privés d’eau potable ces derniers jours, un incendie s’est déclaré dans le département dimanche 16 avril. Une situation alarmante qui ne devrait pas s’arranger selon les prévisions du Service géologique national français pour l’été.

RAYMOND ROIG / AFP
950 hectares partis en fumée. Voilà le résultat du premier incendie majeur de l’année 2023, préambule d’une potentielle triste série estivale. Le feu s’est déclaré dimanche 16 avril dans les Pyrénées-Orientales, entre les communes de Cerbère et de Banyuls-sur-Mer. Attisé par de forts vents, dont des rafales à 100 km/h, le feu a parcouru l’équivalent d’environ 1300 terrains de football. Grâce à l’intervention de 500 pompiers, il a été maitrisé dans la nuit de dimanche à lundi et est à présent fixé. S’il n’y a pas eu de victimes, les dégâts sont très importants.
"C'est une catastrophe environnementale, écologique, économique aussi, puisque les sites qui ont été ravagés seront moins intéressants pour les randonneurs (…). Tout le monde est victime du changement climatique et de ses problématiques de sécheresse", a déclaré Christian Grau, maire de la commune de Cerbère, à Franceinfo. Les Pyrénées-Orientales sont en effet l'un des départements français les plus touchés par la sécheresse. Cette dernière provoque restrictions et tensions, privant même quatre villages d'eau potable.
3000 personnes sans eau potable
Un pack d'eau par semaine et par personne, c'est le quota accordé aux habitants de Bouleternère, Corbère, Corbère-les-Cabanes et Saint-Michel-de-Llotes, communes situées en plein cœur de la plaine du Roussillon. Le forage qui les alimente "est au niveau le plus bas, à seulement 30 centimètres au-dessus de la pompe", explique Jean-Pierre Saurie, président du syndicat intercommunal d'alimentation en eau potable. Au total, plus de 3000 personnes sont concernées par ces restrictions, qui inquiètent également les agriculteurs de la région.
"On est sans doute en train de rentrer dans la période la plus sombre qu'on ait connue dans l'agriculture des Pyrénées-Orientales", se désole Bruno Vila, président de la FDSEA 66 alors qu'il menait vendredi matin une manifestation de plusieurs dizaines de tracteurs. Un phénomène alarmant à plus d’un titre, renforcé par un manque de précipitations ces dernières semaines. "La reconstitution des stocks d’eau, cruciale en hiver, n’a (...) pas eu lieu", explique la préfecture, ajoutant : "ce phénomène qui a démarré en juin 2022, toujours en cours, est le plus long et le plus intense depuis le démarrage des suivis de l’humidité des sols par Météo France en 1959".
"Risque avéré de sécheresse estivale"
Et la situation n’est pas prête de s’arranger selon les dernières conclusions du Service géologique national français (BRGM). Dans un communiqué publié le 13 avril, l’organisme fait le point sur l’état des nappes phréatiques du pays. Malgré des précipitations excédentaires en mars, une grande partie du territoire a accusé un fort déficit de pluies durant les mois d’hiver. Résultat, 75% des nappes phréatiques affichent aujourd’hui des niveaux inférieurs aux normales mensuelles et "de nombreux secteurs présentent un risque avéré de sécheresse durant la période estivale" selon le BRGM.
La reprise de la végétation en ce mois d’avril va limiter encore plus l’infiltration des prochaines pluies et la situation devrait encore se dégrader.
Retrouvez notre 1ère estimation du risque sécheresse de cet été, réalisée à partir des prévisions de @meteofrance pic.twitter.com/3YDvKfpECK— BRGM (@BRGM_fr) April 13, 2023
Si aucun scénario n’est aujourd’hui privilégié par Météo France pour les trois prochains mois, les hydrogéologues du BRGM estiment qu’une grande partie du pays est exposé à un risque "fort" ou "très fort" de sécheresse durant l’été, entraînant "vraisemblablement" des restrictions. Plusieurs facteurs pourront influencer la situation dans les prochaines semaines, comme la hausse des températures, la reprise de la végétation, mais aussi le début des campagnes d’irrigation. A ce jour, 41 départements sont en état d’alerte et 14 ont d’ores-et-déjà mis en place des restrictions d’eau.
Florine Morestin avec AFP