Publié le 08 septembre 2015
ENVIRONNEMENT
Climat : l'EPA, le "shadow ministère" de l'environnement américain
L'Agence de protection de l’environnement (EPA) est un organisme public indépendant qui a la responsabilité - déterminante - de créer les réglementations et normes environnementales aux États-Unis. Un acteur souvent relégué au second plan, mais qui est bel et bien le bras armé de Barack Obama dans la perspective de la COP 21, la conférence sur le climat organisée à la fin de l’année à Paris.

Mandel Ngan / AFP
Mi-juin, quand Ségolène Royal s’est rendue à Washington pour préparer la COP 21, la ministre de l’Environnement française a pris soin de rencontrer Gina McCarthy, la directrice de l’Environmental Protection Agency (EPA). Les deux femmes ont dialogué sur un pied d'égalité.
L'Américaine a assuré à la ministre française que Barack Obama avait une marge de manœuvre suffisante pour s'engager auprès de la communauté internationale. Elle lui a aussi certifié que les États-Unis étaient dans un état d'esprit bien différent du sommet sur le climat de Copenhague, qui s'était achevé sur un échec en 2009.
Pourtant, l’agence de protection de l’environnement américaine reste une administration et n’a donc, théoriquement du moins, pas le pouvoir politique d’un ministère… Mais dans les faits, l’EPA dispose d'un champ d'action déterminant dès qu'on parle de politique environnementale aux États-Unis.
Dans les faits, il s'agit d'un très discret - mais très efficace - ministère de l'Environnement.
Un immense pouvoir réglementaire…
En 1970, alors que les politiques environnementales n'en sont qu'à leurs balbutiements, l'EPA est créée par le président républicain Richard Nixon pour coordonner les premiers efforts consentis par les pouvoirs publics. Son rôle : "protéger la santé humaine et l’environnement".
En commandant des études scientifiques et en les diffusant auprès du grand public, l'EPA devient une référence en matière de connaissances environnementales. Mais l'agence a surtout d'immenses pouvoirs de création de normes et de réglementations. Dernier exemple en date : début août, Barack Obama a dévoilé en grande pompe le "Clean Power Plan", la nouvelle réglementation qui prévoit une baisse de 32 % des émissions de CO2 liées à la production d’électricité.
Mais c'est à l'EPA de mettre en œuvre cette politique. Et c’est à l’EPA que le président a demandé de plancher sur une réglementation pour limiter les émissions de CO2 dans le domaine du transport aérien.
… qui devient aussi très politique
Surtout, l'EPA a la capacité d'agir par voie réglementaire là où Barack Obama ne parvient pas à imposer ses décisions par voie législative, bloqué par un Congrès à majorité républicain. Ce sera notamment le cas pour le Clean Power Plan.
Plus qu'une simple courroie de transmission, l’EPA est donc un vrai bras armé pour le Président. Autant dire que chez les républicains, certains grincent des dents au vu des pouvoirs confiés à cette agence indépendante de tout contrôle démocratique direct (son administrateur est nommé par le Président et confirmé par le Sénat).
Mais "il n'y a pas de problèmes de légitimité. C'est vrai que le président des États-Unis n'est pas celui qui fait les réglementations, mais Gina McCarthy travaille pour le président et il est donc automatiquement responsable des décisions de l'agence", tranche John Coequyt, l'un des directeurs du Sierra Club, une des plus importantes associations écologistes américaines. "D'ailleurs, souligne-t-il, quand l'EPA est la cible de critiques parce qu'elle crée une nouvelle réglementation, ces critiques sont essentiellement soutenues par le secteur des énergies fossiles, qui finance certains élus américains".