Publié le 22 janvier 2021
ENVIRONNEMENT
Référendum sur l'article 1er de la Constitution : le Conseil d'Etat estime le projet de loi inutile et dangereux
[Mise à jour le 22/01/21] Alors que le Conseil des ministres a adopté le projet de loi intégrant la protection de l'environnement dans le préambule de la Constitution cette semaine, le Conseil d'Etat vient de rendre un avis au vitriol. L'instance considère que le texte n'apportera rien de nouveau par rapport à la Charte de l'environnement. Il alerte également le gouvernement sur la "quasi-obligation de résultats" qu'implique la rédaction actuelle. Le texte, qui suscite de nombreuses critiques, doit être soumis à référendum.

@CC0
[Mise à jour le 22/01/21] Ce devait être le grand gagnant de la Convention citoyenne pour le climat (CCC), mais le projet de loi réformant la Constitution suscite bien des critiques. Adopté ce mercredi 20 janvier en Conseil des ministres, il prévoit de modifier l’article 1er de la Constitution afin d’y insérer un troisième alinéa formulé ainsi : "La République garantit la préservation de la biodiversité, de l’environnement et lutte contre le dérèglement climatique". Une formulation qui reprend la propositions de la CCC.
Dans un avis (1) qui vient d'être rendu public, le conseil d'Etat, émet plusieurs critiques et rappelle qu'il s'agit là de la 3e tentative du gouvernement pour modifier la Consitution en ce sens en un peu plus de trois ans. D'abord, il estime que "le principe de protection de l’environnement occupe déjà la plus haute place dans la hiérarchie des normes" en étant inscrit dans la Charte de l’environnement de 2005, "laquelle est mentionnée dans le Préambule de la Constitution." Et que l'inscription dans l'article 1er revêt "une portée symbolique" sans lui conférer une quelconque "prééminence d’ordre juridique sur les autres normes constitutionnelles".
Et ce n'est pas fini. Outre le côté inutile du texte, le conseil d'Etat pointe aussi sa dangerosité. "Le projet imposerait aux pouvoirs publics une quasi-obligation de résultat dont les conséquences sur leur action et leur responsabilité risquent d’être plus lourdes et imprévisibles que celles issues (...) de la Charte de l'environnement. Le terme "garantit" ici visé pourrait être remplacé par "préserve", suggère l'instance.
Un référendum dont la tenue est incertaine
Le président du Sénat, le Républicain (LR) Gérard Larcher, a lui aussi indiqué qu’il n’était pas favorable au verbe "garantir" auquel il préfère celui d’"agir" moins contraignant sur les résultats. Il ne souhaite pas non plus une inscription dans le préambule de la constitution, mais plutôt "dans un article au même niveau que d'autres libertés fondamentales, l'égalité entre l'homme et la femme, la liberté d'entreprendre".
D’autres dénoncent un jeu politicien en amont de la présidentielle de 2022. Le chef de file des députés LR à l’Assemblée, Damien Abad, craint une "instrumentalisation de l'écologie à des fins politiques" et Jean-Luc Mélenchon (La France Insoumise) a déjà annoncé qu'il voterait "non" au référendum qu'il assimile à une "manipulation". "La grande cause de ce siècle mérite autre chose que des petits calculs politiciens destinés à semer la zizanie à droite et à gauche", commente également Clément Sénéchal, chargé de campagne politiques climatiques pour Greenpeace France.
Si le texte est adopté en des termes identiques par l’Assemblée nationale et par le Sénat, il pourra être soumis à référendum à la rentrée prochaine. Ce serait le premier à être organisé en France depuis 2005, et la victoire du non à la Constitution européenne,. Ce serait bien sûr le premier sur l'écologie. Selon un sondage Ifop publié mercredi 20 janvier dans Le Parisien, 64 % des Français n’iraient pas voter, y voyant "avant tout une manœuvre politique" du chef de l’État. Face à ces constats, le député ex-LREM Matthieu Orphelin propose un vote au Congrès.
Concepcion Alvarez @conce1
(1) Voir l'avis du Conseil d'Etat