Publié le 20 mai 2014

ENVIRONNEMENT

Changement climatique: le champ d’action limité de Barack Obama

Un dispositif efficace de lutte contre le changement climatique. C’est une partie de l’héritage que Barack Obama souhaite léguer à son successeur à la Maison Blanche. Une ambition qu’il aura bien du mal à concrétiser. Le congrès, dominé par les Républicains, rejette systématiquement ses projets de lois environnementaux. Et sur les dossiers dans lequel il pourrait agir concrètement, Barack Obama ne cesse d’atermoyer. Analyse.

Obama Walmart Mountain View 9 mai 2014
Le président américain donne dans un supermaché de Californie un discours sur le changement climatique
© Stephen Lam / Getty Images North America / AFP

"Le changement climatique est réel, nous devons agir maintenant". Cette phrase, que Barack Obama ne cesse de répéter depuis le début de son second mandat, sonne comme un mantra. Le président américain l’a une nouvelle fois prononcée, le 9 mai dernier, lors d’un déplacement en Californie.


Visitant un  hypermarché Walmart équipés de panneaux solaires et de réfrigérateurs économes en énergie, il s’est félicité de l’engagement en faveur du solaire de 300 entreprises et collectivités. Barack Obama en a également profité pour annoncer le déblocage d’une enveloppe de deux milliards de dollars. Un budget qui sera consacré à l'efficacité énergétique dans les bâtiments fédéraux.


Trois jours plus tôt, la Maison Blanche avait publié un rapport scientifique sur l'évolution du climat aux Etats-Unis. Une étude dont le président américain a lui-même a assuré la promotion, accordant pas moins de 8 interviews à des chaines de télévisions locales et  nationales. Un pavé numérique soigneusement rédigé par 300 experts, qui énumère région par région les impacts du réchauffement déjà observés ou à venir (tornades, sécheresses, inondations, ouragans, hausses du niveau de la mer).


Le message véhiculé par ce rapport est sans ambiguïté : les conséquences du changement climatique se répercutent de plus en plus sur le mode de vie des Américains. Il est donc urgent d'agir, en cherchant d’abord à limiter les émissions de gaz à effet de serre.

 

Face au congrès, Barack Obama réduit au ministère de la parole

 

Pour Charles Ebinger, spécialiste de l'énergie au sein de l'institut Brookings, l'un des plus anciens think tank américains, "ce président est profondément engagé en faveur de l'environnement. Il veut laisser un héritage sur ce plan. Mais le chemin sera long et très difficile". Il s’agit d’un euphémisme au regard de la situation.

Barack Obama est en situation de cohabitation. Au Congrès, les Républicains verrouillent la chambre des Représentants. Un consensuel projet de loi sur l'efficacité énergétique y est bloqué depuis des mois. La bataille politique se cristallise sur des amendements n'ayant qu’un rapport lointain avec le cœur du texte.


Pour Charles Ebinger, la marge de manœuvre de Barack Obama est très limitée, en particulier sur le plan international: "il ne peut pas signer de traité limitant les émissions de CO2 (Dioxyde de carbone, NDLR), car il est extrêmement improbable qu'il rassemble 60 voix au Sénat pour le ratifier", souligne-t-il. Une perspective qui n’empêche la Maison Blanche de poursuivre des négociations, avec la Chine notamment, sur le climat en vue de la conférence de Paris qui aura lieu l’an prochain

 

Un président condamné à la seule évangélisation de son opinion publique ?

 

Malgré les blocages parlementaires auxquels il doit faire face, le gouvernement fédéral dispose encore de puissants moyens de levier. C’est en particulier le cas en matière de propreté de l'air, grâce au Clean Air Act, une loi adoptée dans les années 70.


L'administration devrait prochainement utiliser ce pouvoir réglementaire pour proposer des normes maximales de rejet de CO2 pour les centrales électriques américaines. Ce serait une première. Ces centrales sont à elles seules responsables de 40% des émissions américaines de gaz à effet de serre.

Ces mesures visent en particulier le secteur de la houille. Les centrales à charbon sont bien plus polluantes que les centrales à gaz. Certaines d’entre elles semblent même condamner à la fermeture. C’est sur ce dossier que pourra être mesurée la volonté politique de Barack Obama : "nous saurons à ce moment-là, en fonction de la rigueur des règles retenues, s’il est réellement sérieux dans sa volonté d'agir pour le climat", explique Michael Obeiter, du think-tank énergétique World Resource Institute.


Certains Etats miniers et les puissants lobbies du charbon se tiennent quant à eux prêts à contester devant les tribunaux ces futures normes, dénonçant un abus de pouvoir de l'administration fédérale. la bataille ne fait que commencer.

Laurent Stocker
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