Publié le 16 septembre 2022

ENVIRONNEMENT

L’Union européenne fait un premier pas pour encadrer la pêche en eaux profondes

Cette semaine, la Commission européenne a annoncé la fermeture d'une partie de l'Atlantique à tous les engins de pêche entrant en contact avec le fond, au-delà de 400 mètres, afin de protéger les écosystèmes marins vulnérables. Cela représente 16 000 km² et environ 1% des eaux communautaires de l'Atlantique du Nord-Est. Les ONG saluent cette décision mais elles attendent désormais que le chalutage profond soit également interdit dans les aires marines protégées.

Peche en eaux prodondes John Wallace NOAA NMFS NWFSC FRAMD
Cette fermeture ne recouvre au total que 1,16 % des eaux communautaires de l'Atlantique du Nord-Est.
@John Wallace NOAA/NMFS/NWFSC/FRAMD

C’est une décision qui aura pris quatre longues années à entrer en vigueur. Jeudi 15 septembre, la Commission européenne a annoncé la fermeture d'une partie des eaux communautaires de l'Atlantique Nord-Est à tous les navires équipés d'engins de fond (chaluts de fond, dragues, filets maillants de fond, palangres de fond, casiers et pièges). L’objectif est de protéger les écosystèmes marins vulnérables au-delà de 400 m de profondeur. La mesure concerne 87 zones sur 16 400 km2, au large des côtes de l'Irlande, de la France, du Portugal et de l'Espagne.

"En fermant l’accès des engins de pêche de fond à 17 % de la zone située entre 400 et 800 mètres de profondeur dans les eaux communautaires de l'Atlantique du Nord-Est, nous tenons notre engagement visant à protéger et à restaurer la vie marine et quatre années plus tard, nous mettons enfin en œuvre l'une des principales dispositions du règlement sur l'accès aux eaux profondes", a déclaré le commissaire chargé de l'Environnement, des Océans et de la Pêche, Virginijus Sinkevicius.

"Jour de joie"

"C'est un jour de joie", s'est exclamée Claire Nouvian, fondatrice de l'association Bloom qui milite pour la protection des océans. "Les écosystèmes remarquables au-delà de 400 mètres de profondeur vont enfin pouvoir souffler et cesser de se faire broyer par des énormes engins industriels qui pulvérisent des coraux millénaires, des éponges et des requins centenaires, de fragiles poulpes à oreilles et des myriades d'espèces extraordinaires qui sont les victimes collatérales depuis plus de 30 ans de l'insatiable cupidité des navires industriels", a-t-elle déclaré dans un communiqué.

CARTE peche eaux profondes @Bloom

 

Carte basée sur les données du CIEM des 87 zones abritant des écosystèmes marins vulnérables qui seront fermées au-delà de 400 m. de profondeur aux engins touchant le fond.

 

Mais il faut bien avoir en tête que cette fermeture ne recouvre au total que 1,16 % des eaux communautaires de l'Atlantique du Nord-Est, selon les données transmises par l'exécutif européen dans un communiqué. Elle n'est qu'un premier pas dans la stratégie de l'UE pour préserver les écosystèmes marins et ce sont les plus vulnérables d'entre eux qui sont ici visés. Cette décision ne met ainsi pas fin à la pratique du chalutage de fond dans les aires marines protégées de l’Union européenne. Pour l'instant, le chalutage profond n'est interdit sur la façade Atlantique qu'en-dessous de 800 mètres. 

Lobbying intense

"L’autre bonne nouvelle que nous attendons de la part de la Commission européenne, c’est son Plan d’action pour l’océan avec une feuille de route détaillée qui traduit en propositions concrètes la stratégie biodiversité de l’UE à 2030. Mais ce plan, qui prévoit justement la fin du chalutage profond dans les aires marines faussement 'protégées', est bloqué par le lobby des industriels de la pêche. Et la France est aux avant-postes des pays qui font obstruction", déplore Claire Nouvian auprès de Novethic. 

Preuve du lobbying intense que subit la Commission, l'Alliance européenne pour la pêche de fonds (EBFA), qui représente 20 000 pêcheurs de 14 pays européens, a dénoncé une "législation bâclée", dans une déclaration transmise à l'AFP. Elle pointe aussi l'absence d'étude d'impact "pour évaluer les conséquences de cette mesure pour de nombreuses familles de pêcheurs et plus largement des communautés locales qui dépendent de cette activité". L'EBFA assure ainsi qu'elle va examiner "toutes les actions légales à (sa) disposition". Ce à quoi Bloom, en coopération avec d'autres ONG internationales, entend bien répliquer.      

Concepcion Alvarez @conce1 avec AFP


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