Publié le 04 décembre 2019

ENTREPRISES RESPONSABLES

Le "nutri-score de la RSE", défendu par les socialistes, ne convainc pas le gouvernement

Les députés socialistes et apparentés ont déposé une proposition de loi portant sur la création d’une certification publique des performances sociales et environnementales des entreprises. Celle-ci entend créer un système de notation proche du nutri-score des produits alimentaires. Mais le gouvernement n'est pas convaincu. 

Nutriscore RSE
Des députés socialistes, emmenés par Dominique Potier, militent pour un "nutriscore de la RSE"
@BH

[Actualisé le 13 décembre] Mieux informer le grand public sur les performances des entreprises à travers un label public sur la responsabilité sociétale des entreprises (RSE). C’est l’ambition d’une proposition de loi présentée par le groupe socialiste et apparentés, soutenue par le groupe communiste et la France Insoumise. Celle-ci est défendue par le député PS de Meurthe et Moselle, Dominique Potier, l’un des initiateurs de la loi sur le devoir de vigilance. Après un rejet de la Commission des lois le 27 novembre, le texte a également été rejeté par l'assemblée nationale. 

Éclairer les choix des consommateurs

Le texte proposé  souhaitait proposer un référentiel d’évaluation des entreprises sur 100 points concernant leur performance en matière de politique salariale, de dialogue social, d’impact environnemental et territorial. Charge ensuite à l’organisme labellisateur (État ou tiers indépendant) de leur affecter un code couleur du vert au rouge, "comme pour le nutri-score des produits alimentaires", précisent les députés. Cet exemple n’a pas été choisi au hasard.

L’objectif affiché est de donner la possibilité à tout citoyen, consommateur, épargnant ou collaborateur, la possibilité de procéder à une comparaison claire des performances en matière de responsabilité sociétale (RSE). Même si les grandes entreprises sont soumises à une obligation de reporting extra-financier, "force est de constater [qu’elle] est aujourd’hui dans l’incapacité de donner une vision juste et claire de l’impact social et environnemental de l’entreprise", estiment les porteurs de la proposition de loi.

Deux visions de la RSE

Derrière l’idée d’un label d’֤État, l’objectif est aussi de redonner la main aux pouvoirs publics en en faisant un levier de commande publique, sous-exploité aujourd’hui. Il faut y ajouter une certaine idée d’une responsabilité à la française ou européenne "à l’heure où les dernières agences de notation extra-financière indépendantes sont rachetées par des groupes américains et où la Chine elle-même envisage des réformes radicales dans ses instruments de comptabilité", souligne le communiqué du groupe socialiste. 

"La raison d’être de nos entreprises serait vaine sans une authentique révolution de leur façon de faire. C’est le sens profond de cette proposition de loi : donner à la société les instruments de sa propre transformation", ajoute Dominique Potier, faisant référence à la loi Pacte. Mais justement, déjà proposé à cette occasion, le "nutri-score de la RSE" est loin de séduire le gouvernement. 

Selon les députés LREM, des labels existent déjà, que ce soit sur les process des entreprises (B corp, Lucie, Engagé RSE de l’Afnor…) ou des thématiques particulières (Label AB et Synabio sur l’agriculture bio ou Max Havelaar sur le commerce équitable). Derrière ces labels, les organisations sont divisées sur la possibilité d’une reprise en main publique.

Une revue de labels au printemps

Si Blaise Desbordes, directeur général de Max Havelaar, s’affiche clairement en faveur de ce "dispositif simple, qui permet à la fois une marge de progrès pour l’entreprise et de faire un choix éclairé pour le consommateur", la Fédération des entreprises de France qui émet le label PME+, s’inquiète d’un dispositif qui risque d’être très "normalisant, et donc de tuer la diversité et le pluralisme, sources de création de valeur". Pour Augustin Boulot, directeur général de B Lab France, "l'initiative va dans le bon sens" mais "il faut davantage essayer de capitaliser sur les initiatives déjà à l'oeuvre plutôt que réinventer ce qui existe déjà".

Pour Coralie Dubost, qui avait défendu comme rapporteure la partie Transformation des entreprises de la loi Pacte, "ce n’est pas à l’État de reprendre la main dessus". "L’État a un "rôle d’accompagnant" et "non de rigidification", a plaidé la députée LREM de l’Hérault lors de l’examen en Commission des lois. Elle rappelle que la loi Pacte instaure une structure de revue et d’évaluation sur les labels RSE qui devra rendre ses conclusions au printemps.De son côté, le Haut commissaire à l’économie sociale et solidaire, Christophe Itier, appelle, lui, régulièrement à un "Yuka de la RSE". Un créneau sur lesquels plusieurs startups comme Gen'ethic, Impak ou Moralscore se sont déjà lancé.

 

Béatrice Héraud, @beatriceheraud


© 2023 Novethic - Tous droits réservés

‹‹ Retour à la liste des articles

ENTREPRISES RESPONSABLES

Entreprise responsable

Actualité nationale, européenne et mondiale quotidienne de la Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE).

Remuneration dirigeant paie Scott Graham unsplash

RSE : la rémunération des dirigeants de plus en plus indexée sur le climat… mais avec peu d’effets

Les patrons des grandes entreprises européennes doivent de plus en plus rendre des comptes sur leur politique climatique. La majorité des 50 plus grands groupes européens ont mis en place des critères sur les émissions de gaz à effet de serre dans le calcul de la rémunération de leurs dirigeants....

Lush marque cosmetique tourne le dos aux reseaux sociaux

Lush quitte les réseaux sociaux pour préserver la santé mentale de sa communauté

Santé mentale, dépendance, image de soi… Les impacts négatifs des réseaux sociaux sur les utilisateurs sont multiples et concernent autant les plateformes en elles-mêmes que les entreprises qui les placent au cœur de leur communication. Une problématique prise à bras le corps par la marque de...

Classement RSE iStock Svetlana Kachurovskaia Lanpochka 01

Decathlon, Blablacar, Carrefour… découvrez les champions de la RSE selon les jeunes diplômés

Ce sont les entreprises les plus engagées sur la RSE, selon les étudiants et jeunes diplômés. Carrefour, Blablacar et Decathlon composent le podium de la deuxième édition de l'index RSE d'Universum. Si en tant que candidat, les jeunes sont plus attachés aux engagements sociaux qu'environnementaux,...

ESG RSE istock

Crise de la fonction RSE dans les entreprises sommées de radicaliser leur transformation

La RSE doit-elle être radicale ? Cette question brûlante a été posée aux invités de l’Orse, l’Observatoire de la Responsabilité Sociale des Entreprises, lors d’un débat organisé pour ses vœux. Elle porte deux dimensions : la première est de s’interroger sur la capacité des directeurs RSE à affronter...