Publié le 18 août 2023
ÉCONOMIE
Evergrande, Country Garden… la faillite des géants de l’immobilier fait craindre un krach boursier en Chine
Deux géants de l'immobilier viennent de tomber. Evergrande, ex-numéro 1 a été placé sous procédure de faillite tandis que son rival Country Garden a dégringolé en Bourse. Dans leur chute, ces deux piliers de l'économie -le secteur représente 25 % du PIB chinois- pourraient entraîner l'ensemble de l'économie chinoise, des investisseurs aux fournisseurs en passant par les particuliers.

STRINGER / AFP / CHINA OUT
La deuxième économie mondiale vacille. Les géants de l’immobilier, autrefois son pilier, tombent les uns après les autres. L’ex-numéro 1, Evergrande, accumule une dette colossale de 300 milliards de dollars, l’équivalent du PIB de la Finlande. Jeudi 17 août, il a été placé aux États-Unis sous procédure de faillite. La procédure américaine dite de "Chapter 15" vise à proposer des mécanismes pour gérer les cas d'insolvabilité impliquant plus d'un pays. Une mesure qui doit permettre au groupe chinois de protéger ses actifs américains.
Depuis plusieurs mois, le groupe travaille à un projet de restructuration de sa dette, et a fait une proposition dans ce sens plus tôt dans l'année. Dès 2021 la planète finance avait les yeux tournés vers Evergrande, craignant que sa chute contamine l’ensemble de l’économie chinoise. Car le groupe est un véritable mastodonte qui a connu une croissance fulgurante en raison de l’urbanisation galopante du pays ces 25 dernières années. Le secteur de l’immobilier a été si porteur pendant des décennies qu’il représente aujourd’hui entre 20 et 25% du PIB de la Chine.
La bulle a éclaté
Mais depuis trois ans, c’est la débandade. Les faillites des promoteurs, englués dans des dettes monstres, se multiplient. Dernier en date : Country Garden, pourtant perçu comme très résistant à la crise de l’immobilier. Il était l’an dernier le plus gros promoteur privé de Chine en termes de vente, selon le New York Times. Mais le 14 août, patatras, son action chute de 18% alors que le groupe ne parvient plus à rembourser les intérêts sur sa dette. En défaut de paiement, il doit payer ses créanciers en septembre. Le 10 août, l’agence de notation Moody’s a abaissé sa note pointant des "risques accrus de liquidité et de refinancement".
Comment le secteur immobilier a pu sombrer à ce point ? Portés par une très forte de demande et la hausse des prix, les géants du secteur ont pris de plus en plus de risques, s’endettant pour multiplier les projets. Mais l’euphorie et l’intouchabilité de ces géants sont retombés avec le Covid-19, mettant à mal leurs rentrées d’argent. La bulle a ainsi éclaté, sous la répression du gouvernement de Xi Jinping qui a décidé de stopper la spéculation immobilière. En 2021, de nombreux experts ont ainsi craint que la chute d’Evergrande soit un nouveau Lehman Brothers, du nom du géant de la finance qui s’était effondré en 2008, suite à une crise du marché immobilier, entraînant une crise mondiale.
Des répercussions économiques et sociales
Est-ce qu’une telle menace plane encore après la dégringolade de Country Garden ? Le contexte n'est pas le même qu'en 2021. Evergrande,t alors le premier promoteur, a chuté et sa dette était encore plus élevée. Mais le groupe Country Garden est très ancré sur le territoire. Il construit plus de 3000 projets de logements aux quatre coins de la Chine, contre 700 pour Evergrande deux ans plus tôt. Des investisseurs sont impactés, mais aussi des particuliers qui ont investis toute leur épargne dans ces logements.
Country Garden avait "accès à plus de financement que d'autres groupes immobiliers, mais il n'en ont pas fait bon usage : ils ont insisté pour continuer à acquérir des terrains partout", indique au journal Le Monde Xie Yifeng, président de l'Institut de recherche de l'immobilier urbaine de Chine. Figurant au classement de Forbes des 500 plus grosses entreprises du monde, Country Garden emploie par ailleurs plusieurs dizaines de milliers d’employés.
L’échec du projet Forest City en Malaisie est devenu un symbole des risques réels que fait peser le groupe chinois. Ce méga-projet de ville futuriste, lancé en 2016, prévu pour accueillir 700 000 personnes sur quatre îles artificielles est une ville fantôme. Près de 90% des commerces seraient à l’abandon, seulement 28 000 unités résidentielles ont été achevées et une seule des quatre îles aménagées, rapporte Le Figaro. Le prix des logements, beaucoup trop élevés ainsi que le Covid-19 aurait mis un coup de frein au projet. 100 milliards de dollars auraient été investis, mettant un peu plus en péril la santé financière du groupe.
Marina Fabre Soundron avec AFP