Publié le 19 octobre 2022
Le gouvernement vise la production de 2 millions de véhicules électriques sur le sol français d’ici 2030 et envisage des mesures protectionnistes pour l’atteindre. Le problème ? Les grands industriels ne répondent pas aux besoins de la population et se concentrent sur la fabrication de véhicules électriques haut de gamme.

"Il est temps d’accélérer dans la direction que nous avons tous choisie, celle de l’électrique", a déclaré Bruno Le Maire depuis le Mondial de l’automobile. Le gouvernement vise ainsi la production de 2 millions de véhicules électriques sur le sol français en 2030. Pour ce faire, le ministre de l’Économie demande aux constructeurs, aux pouvoirs publics et à l’Union européenne de "jouer leur rôle" et de se "donner les moyens de défendre notre industrie automobile pour qu’elle reste la meilleure, la plus performante et la plus désirable." 

Le locataire de Bercy appelle notamment l’Union européenne à "changer de logiciel" et l’encourage "à négocier avec les États-Unis et la Chine ou à adopter les mêmes politiques commerciales agressives qu’eux." Bruno Le Maire évoque ainsi la possibilité de réserver les subventions publiques aux véhicules électriques produits en France pour "protéger l’industrie automobile française." Mais, sans autres conditions, cette mesure rendrait ces véhicules encore moins accessibles. Et la hausse du bonus écologique à 7 000 euros pour les plus modestes n’y changera rien. 

Pas assez de voitures électriques à des prix abordables 


"Les solutions proposées ne sont pas à la hauteur des enjeux, car le problème est qu’il n’y a pas suffisamment de voitures électriques à des prix abordables en Europe", explique Marie Chéron, responsable des politiques véhicules pour l’ONG Transport et Environnement. "Il faut que les pouvoirs publics imposent aux constructeurs de concevoir des modèles sobres et accessibles", ajoute la spécialiste.


Certains fabricants indépendants proposent certes des "microcars" électriques, mais les "grandes marques européennes ont surtout lancé de gros véhicules électriques lourds et chers afin d’augmenter leurs marges", tacle Marie Chéron. Le tollé provoqué sur les réseaux sociaux par la présentation de la version électrique de la mythique 4L de Renault lors du Mondial en est la parfaite illustration. Plus imposant que son aïeule, le SUV 100 % électrique de la marque au losange est aussi plus long, plus large, plus lourd et probablement bien plus cher. 



Par ailleurs, le leasing social annoncé par le gouvernement pour démocratiser l’accès aux véhicules électriques "ne peut pas être lancé car il n’y a pas de véhicule électrique peu cher en Europe", explique Marie Chéron. "Les ONG plaident pour que les industriels se connectent aux besoins. Il y a une population captive pour les véhicules électriques à petit budget mais pas d’offre", martèle la spécialiste. "Le besoin social n’est pas pris en compte. Il faut que les fabricants européens proposent des véhicules sobres, accessibles et qui permettent de maîtriser la consommation énergétique tout au long du cycle de vie", insiste-t-elle.

Précarité mobilité


Les prix à l’achat des véhicules électriques se sont envolés aussi en raison de la flambée des coûts des matières premières. Mais "bien qu’une voiture électrique coûte indéniablement plus cher à l’achat qu’un véhicule thermique, son entretien et son usage sont plus abordables", nuance Limvirak Chea, cofondateur de Fixter, service numérique pour simplifier la maintenance automobile.


Le coût d’une voiture s’élève à 4 210 euros par an en moyenne, calcule une étude du Réseau Action Climat qui estime que la "situation risque de s’aggraver au cours des prochaines années." Par ailleurs, 3,2 millions de personnes en France souffrent de précarité mobilité, d’après la Fondation pour la Nature et l’homme.
La crise des Gilets jaunes avait été déclenchée par quoi, déjà ?…
Mathilde Golla @Mathgolla


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