Publié le 6 novembre 2023
Malgré quelques revers, les "Magnificent seven", les sept plus grandes entreprises américaines de la tech comme Apple, Microsoft, Alphabet, dominent les bourses mondiales. Leur omniprésence dans l’économie est telle qu'elle suscite de plus en plus l’inquiétude des États qui tentent, tant bien que mal, d'encadrer ces géants. 

La période des résultats trimestriels n’a pas été très tendre avec les Big techs américaines. Entre des ventes en recul pour Apple en raison de ses difficultés en Chine, un cloud qui ne performe pas aussi bien que prévu pour Alphabet la maison-mère de Google, des marges en baisse pour Tesla ou encore les pertes de la division Metavers de Meta (Facebook, Instagram, WhatsApp), les géants américains du numérique semblent plier un peu l’échine. Leurs cours de bourse de ces "Magnificent seven" tels que sont surnommés les sept grands groupes numériques (Alphabet, Apple, Amazon, Meta, Microsoft, Tesla, Nvidia) en ont pâti sur la fin du mois d’octobre, avec de fortes baisses allant jusqu’à 19% pour Tesla ou 12% pour Alphabet.
Reste que les sept grands groupes sont bien les champions de la Bourse depuis plusieurs mois, ajoutant près de 4000 milliards de dollars de capitalisation boursière depuis le début de l’année, selon le Financial Times. Ces sept plus grandes capitalisations boursières américaines représentent un poids de plus en plus important dans le S&P 500, l’indice de référence américain, atteignant près de 30% de la valeur totale. Étant donné leur poids significatif sur les marchés financiers, leur petite baisse de forme sur le troisième trimestre s’est donc fortement répercutée en Bourse.

Omniprésence dans toute l’économie


En plus de leur taille financière, c’est aussi leur omniprésence dans l’économie qui commence à inquiéter tant les États que la société civile. Il faut dire qu’ils n’hésitent pas à intervenir dans des domaines très proches de la souveraineté des États. Meta avait ainsi décidé en 2019 de lancer sa propre monnaie numérique, la Libra, suscitant une levée de bouclier des gouvernements européens. Plus récemment, Microsoft est devenu essentiel dans le cadre de la guerre en Ukraine, assurant notamment des alertes régulières auprès des autorités ukrainiennes contre les cyberattaques russes. Amazon, de son côté, veut investir le domaine de la santé et a lancé cette année aux États-Unis sa plateforme de téléconsultation, Amazon Clinic.
"Il y a un vrai paradoxe, ces entreprises n’ont jamais été aussi puissantes et en même temps, la contestation est de plus en plus vive contre ces acteurs", remarque Julien Nocetti, chercheur associé à l’Institut français des relations internationales (Ifri) qui publiera dans les prochains mois le livre "Géopolitique du numérique". Près de 60% des Américains estiment ainsi que les entreprises des Big Tech ont "trop de pouvoirs dans le marché", selon un sondage du American economic liberties project.

Compétition acharnée entre les États-Unis et la Chine


Depuis septembre dernier, Google fait justement l’objet d’un procès sur le fondement des lois "antitrust". Le ministère de la Justice américain l’accuse d’avoir mis en place des contrats d’exclusivité favorisant la situation de monopole de son moteur de recherche. Même chose pour Amazon, également en procès pour des soupçons de pratiques anticoncurrentielles pour préserver son hégémonie. "Les critiques sont très virulentes aux États-Unis contre les Gafam, un rapport parlementaire prévoyait même la manière dont il fallait démanteler Amazon et Google, rappelle Julien Nocetti. Mais le contexte de la compétition avec la Chine est déterminant et l’argument de la menace des technologies chinoises est souvent avancé."
L’Europe, de son côté, tente de faire entendre sa voix. Les règlements sur les services et les marchés numériques veulent encadrer l’activité des grandes plateformes. "Il y a beaucoup de discours sur la souveraineté numérique, mais il est très difficile de rattraper le retard", souligne Julien Nocetti. C’est aussi le cas pour l’intelligence artificielle, dans lesquelles les Big tech américaines investissent beaucoup. Lors du sommet sur l’IA les 1er et 2 novembre au Royaume-Uni, l’Union européenne a justement soulevé la question de la concentration des technologies. "Le fait qu’un seul pays détienne toutes les technologies, toutes les entreprises prives, tous les appareils, toutes les compétences sera un échec pour nous tous", a déclaré Bruno Le Maire, le ministre de l’Économie lors du sommet.
Arnaud Dumas

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