Publié le 23 octobre 2024

Tous les records pourraient être battus par la plus importante action collective jamais intentée dans le monde qui se tient en ce moment à Londres. BHP doit répondre de la catastrophe environnementale survenue il y a neuf ans au sud-est du Brésil où la rupture d’un barrage a provoqué un déversement de boues rouges, tué 19 personnes et entrainé de graves dommages écologiques. La condamnation du géant minier australien pourrait dépasser les 40 milliards de dollars.

Le procès devant la Haute Cour de justice britannique va durer plusieurs mois mais les 620 000 plaignants ont attendu neuf ans pour l’obtenir. Ils espèrent faire condamner le géant minier BHP à la hauteur du préjudice qu’a entrainé la plus grande catastrophe écologique du pays, celle de Mariana, ville de l’état du Minas Garais au sud-est du Brésil. En 2015, le barrage de Fundao qui retenait des résidus miniers a cédé déversant 40 millions de m3 des boues rouges toxiques sur la zone, tuant 19 personnes, rasant des villages entiers et endommageant ponts, routes, faune et flore. Ce barrage appartenait à une co-entreprise de deux multinationales minières, Vale et BHP qui ont toutes deux été condamnées au Brésil début 2024. Elles doivent payer près de 10 milliards de dollars de dommages et ont proposé 17 milliards de plus pour tenter d’éteindre les procédures dans le pays avant l’ouverture du procès à Londres.

BHP est l’un des groupes miniers les plus importants du monde. Australien, il avait, à l’époque des faits, un siège à Londres ce qui a permis d’y ouvrir ce nouveau procès. Il doit durer plusieurs mois et le verdict pourrait ne pas être connu avant deux ans. Le nombre de plaignants est spectaculaire, plus de 600 000, dont une cinquantaine de municipalités, des entreprises et des représentants des peuples autochtones, tous représentés devant le tribunal à l’ouverture de ce qui va sans doute devenir la référence des procès en responsabilité environnementale. Car l’objectif des plaignants est de montrer que BHP savait que ce barrage était à risque et qu’il n’a pas mis en place les mesures de protection nécessaire.

“BHP ne fait pas face à ses responsabilités”

Un des avocats des plaignants a expliqué à l’ouverture du procès qu’un “gouffre s’était creusé entre le niveau d’indemnisation que BHP considérait comme “acceptable” pour la catastrophe et le montant auquel les victimes avaient “moralement et légalement” droit”. Dans leur requête, ils accusent l’entreprise minière : “BHP ne fait pas face à ses responsabilités mais tente cyniquement et obstinément de les éviter et ne peut donc pas prétendre être une entreprise qui “fait ce qu’il faut” pour les victimes de la catastrophe.”

A la suite de l’effondrement, BHP, Vale et Samarco les trois entreprises impliquées, ont créé la Fondation Renova pour réparer les dommages et compenser les dégâts. Elle aurait déjà indemnisé 430 000 personnes, de quelques centaines d’euros pour la plupart disent les avocats de l’accusation.

Des dommages colossaux

La question principale du procès est bien celle de la responsabilité du donneur d’ordre, concept fondamental de la RSE. D’un côté BHP affirme qu’il n’était pas au courant des risques courus par son barrage administré par sa filiale Samarco. Selon ses avocats “il n’existe aucune loi ni aucun contrat imposant une quelconque obligation de sécurité à la société mère”.
Les plaignants veulent de leur côté faire condamner BHP comme responsable d’un système où la sécurité des populations environnantes ne compte pas. Leurs avocats produisent des documents montrant que BHP savait que les risques étaient élevés et ont quand même demandé à augmenter la production de la mine de fer.

Ils font état d’une présentation de BHP de novembre 2012 qui souligne qu’une rupture du barrage pourrait atteindre la communauté de Bento Rodrigues, zone la plus frappée, “en moins de 10 minutes“. Elle mentionne aussi que “l’absence de plan de relocalisation de la population en cas de réalisation d’un nouveau barrage est un problème à améliorer.” Trois ans plus tard le barrage a explosé et la population dont un petit garçon de 7 ans en a payé le prix fort ! Pour BHP, cette nouvelle procédure à Londres est à la fois “inutile et coûteuse”. En août 2024, BHP a annoncé qu’il avait réalisé des profits de 7,9 milliards de dollars sur l’exercice fiscal 2023-2024, en baisse de 38,7% par rapport à l’exercice précédent. Une condamnation de 7 fois ce montant serait donc une très, très mauvaise nouvelle pour le groupe.

 

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