Publié le 30 janvier 2020
GOUVERNANCE D'ENTREPRISE
Le coronavirus fait tousser le système économique mondial
Plus de 7 000 malades dont cinq en France et 170 morts. Le Coronavirus, qui frappe la ville chinoise de Wuhan, véritable hub industriel, a des répercussions économiques mondiales. Les chaînes d'approvisionnement des géants de la tech et de l'automobile sont mises sous pression, les Bourses paniquent, le secteur du tourisme en France s'inquiète... En mettant en quarantaine la sixième ville du pays, la Chine, avec son modèle sécuritaire habituellement décrié, tente de rassurer à l'international.

@Stringer/Getty Images/AFP
1. Automobile, tech… Les chaînes d’approvisionnement sous pression
Wuhan, 11 millions d’habitants, est au cœur de la crise du coronavirus. La capitale de la province du Hubei est un grand centre de production automobile. Sa mise en quarantaine perturbe considérablement le secteur. Le groupe français PSA a choisi de rapatrier ses salariés, tandis que Toyota a prolongé d’une semaine l’arrêt de ses usines en Chine. "Des chaînes d’approvisionnement fragmentées et une production à flux tendus signifient que les arrêts d’usines à Wuhan auront plus répercussions ailleurs", prévient l’agence de notation Standard & Poor’s. Les géants de la tech s’inquiètent aussi de leurs fournisseurs dans le pays. Même si le plus gros sous-traitant d’Apple dit avoir pris toutes les mesures pour honorer ses commandes, le groupe à la pomme se prépare et a contacté des sous-traitants alternatifs.
2. Les investisseurs se débarrassent des actifs les plus touchés
Les places boursières réagissent alors que le nombre de cas de contamination du coronavirus a dépassé celui de l’épidémie du SRAS en 2002. "Avant même de calculer les coûts économiques de la crise du coronavirus, les investisseurs sont partis en quête de sécurité. Objectif : se séparer des actifs financiers qu’ils considèrent comme les plus exposés à la paralysie de la deuxième économie mondiale", analyse le quotidien suisse Le Temps. Les actions de plusieurs compagnies aériennes ont chuté, tout comme celles de l’industrie touristique chinoise, du luxe et de l’automobile. Les Bourses ont surtout plongé le 27 janvier lorsque l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a revu à la hausse son estimation de l’épidémie, la considérant comme une menace élevée.
3. Le commerce d'animaux sauvages suspendu
Pour limiter la propagation de l’épidémie, Pékin a interdit temporairement l'élevage, le transport et le commerce d’animaux sauvages. Pour l’instant, comme le note l’Institut Pasteur, il est difficile de définir avec certitude l’animal à l’origine du nouveau Coronavirus. Le premier suspect reste la chauve-souris, comme ce fut le cas pour le SRAS en 2002. Au-delà du cas chinois, c'est un mode de vie global qui est pointé du doigt. Le journaliste spécialiste des épidémies David Quammen explique dans le New York Times : "Nous envahissons les forêts tropicales et autres paysages sauvages, qui abritent tant d'espèces animales et végétales - et au sein de ces créatures, tant de virus inconnus. Nous avons coupé les arbres ; nous tuons les animaux ou les mettons en cage et les envoyons sur les marchés. Nous perturbons les écosystèmes et nous débarrassons les virus de leurs hôtes naturels. Lorsque cela se produit, ils ont besoin d'un nouvel hôte. Souvent, nous le sommes".
4. Le secteur du tourisme français dépendant des Chinois
Ce ne sont pas les plus nombreux mais ce sont les plus dépensiers. Les 2,2 millions de Chinois qui foulent le sol de l’Hexagone chaque année dépensent chacun en moyenne 1 700 euros, dans le luxe, l’hôtellerie, la restauration. Le marché pèse ainsi près de 3,7 milliards d’euros. Une dynamique considérablement freinée par le Coronavirus, les autorités chinoises ayant recommandé à leurs ressortissants de reporter leurs voyages à l’étranger. "Notre activité s’est subitement arrêtée, il y aura un manque à gagner énorme, alors que ce sont les vacances les plus longues pour les Chinois qui ont quinze jours pour voyager. D’ordinaire, nous les accueillons particulièrement bien à cette période, qui est la basse saison en Europe", explique à l’AFP Pierre Shi, président de l’Association chinoise des agences de voyages en France (Acav). Parallèlement, plusieurs compagnies aériennes ont décidé de stopper leurs vols en direction de la Chine à l'instar d'Air France, British Airways ou Lufthansa.
5. Le modèle sécuritaire Chinois face à la démocratie
Masque collé sur le visage, suspension de tous les transports en commun, cérémonies du Nouvel an annulées, construction de deux hôpitaux filmés en seulement 10 jours, système de reconnaissance faciale… Les autorités chinoises veulent montrer qu’elles savent gérer des épidémies d’ampleur. Et cela semble fonctionner. En 2002, lors du SRAS, les autorités avaient mis trois mois à reconnaître la crise, cette fois, elles auront pris trois semaines. Les critiques sur le modèle sécuritaire chinois, habituellement si nombreuses, semblent étonnamment s'estomper depuis le début de l'épidémie. "Qui ira contester, au nom de nos valeurs, la nécessité de confiner les habitants de Wuhan, si cela contribue à contenir la propagation du virus ?", s’interroge ainsi le journaliste Hervé Gardette sur France culture. "Nous avons beau être attachés à notre modèle démocratique, nous nous accommodons facilement de l’autoritarisme ailleurs, pour peu qu’il nous épargne ici", ajoute-t-il.
Marina Fabre, @fabre_marina