Publié le 14 février 2019
FINANCE DURABLE
BlackRock intègre de plus en plus l’ESG dans ses pratiques d’investissement
Le futur de l’investissement sera durable, estime BlackRock. Son think-tank interne vient de publier une étude montrant la montée en puissance de la finance durable. L’amélioration des données extra-financières, la pression réglementaire mais aussi l’opinion publique poussent de plus en plus les gérants d’actifs dans cette direction.

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La finance durable gagne du terrain. La dernière étude en date qui le prouve émane du think-tank de BlackRock, le plus grand gestionnaire d’actifs du monde. Dans une étude explicitement intitulée "Sustainability, the future of investing" (Soutenabilité, le futur de l’investissement) le BlackRock Investment Institute (BII) montre la rapide montée en puissance des critères extra-financiers dans la gestion dite classique.
"Sur les quatre dernières années, on assiste à une croissance annuelle de 10 % des actifs ESG (liés à des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance, ndlr) sur le marché, une croissance plus rapide que les actifs traditionnels", souligne Isabelle Mateos y Lago, directrice générale au BlackRock Investment Institute et co-auteure de l’étude. L’Europe est particulièrement bonne élève en la matière, 60 % du stock d’encours ESG y étant situé.
Aussi rapide soit le mouvement, il demeure toutefois une petite goutte dans l’océan. La société américaine compte seulement 2,5 milliards de dollars d’actifs prenant en compte les critères ESG, sur près de 6 000 milliards de dollars sous gestion.
Mieux gérer les risques
Selon l’étude, qui confirme d'autres déjà parues sur le sujet, le marché des actifs durables commence à sortir de sa niche et à intéresser des acteurs traditionnels de la finance. Pour deux raisons. D’une part parce que "les entreprises avec des performances solides en matière de développement durable peuvent potentiellement surperformer" par rapport aux autres, estiment les auteurs. Les critères extra-financiers permettent une "meilleure approche de la gestion des risques et de la recherche de performance financière".
Mais aussi parce que les grands investisseurs institutionnels, propriétaires des actifs à investir, en font de plus en plus la demande. "C’est sous la pression de leurs clients, notamment en Europe où les institutionnels demandent plus de prise en compte des critères ESG, que les gestionnaires s’y mettent, confie Isabelle Mateos y Lago. Ce n’est donc pas principalement par conviction politique, mais parce que l’asset manager aura l’impression de rater quelque chose s’il ne les prend pas en compte."
Travailler sur la qualité des informations
Ces grands investisseurs ne s’y mettent pas par hasard. Les nouvelles réglementations, comme l’obligation de reporting de l’article 173 de la loi française sur la transition énergétique pour la croissance verte de 2015, les obligent à s’intéresser à la finance durable. "Il y a aussi la question de l’opinion publique, ajoute Isabelle Mateos y Lago. La génération des millenials trouve naturel de s’intéresser aux questions environnementales."
La recherche de performance en investissement durable demeure toutefois suspendue à la qualité des informations disponibles sur les entreprises. Ces données sont aujourd’hui disponibles sur un nombre de plus en plus grand d’entreprises. Mais, pour la gestion active des portefeuilles, le BlackRock Investment Institute propose d’aller au-delà des scores ESG fournis par diverses agences de notation. "Il faut notamment utiliser les technologies de l’intelligence artificielle pour trouver les informations, explique Isabelle Mateos y Lago. Il faut aussi chercher à avoir une compréhension plus fine de quels sont les critères les plus pertinents pour chaque secteur d’activité, voire pour chaque entreprise."
Intégrer les données ESG dans la gestion traditionnelle
Tout ce travail sur la donnée ESG, BlackRock veut le diffuser auprès de toutes ses équipes de gestion, notamment au travers d’Aladdin, leur plateforme commune de gestion des risques. Toutes les stratégies d’investissements de BlackRock devraient donc petit à petit intégrer les critères ESG, et non plus seulement les stratégies spécialisées dans la finance durable.
Avec, toutefois, une limite. L’intégration de critères ESG ne doit pas aller à l’encontre du mandat confié par leurs clients, pas question, donc, d’exclure des secteurs d’activité si le client ne l’a pas demandé. La sensibilisation doit donc se poursuivre aussi bien en direction des gérants de portefeuilles traditionnels, qu'auprès de leurs clients. "Plus nous serons capables de démontrer qu’il n’y a pas de sacrifices à faire sur la rentabilité, plus cela sera facile", estime Isabelle Mateos y Lago.
Arnaud Dumas @ADumas5