Publié le 16 mai 2023

ENVIRONNEMENT

Choose France, Green Deal ou Beyond Growth : l’Europe cherche un cap entre des modèles bien différents

À l’heure où Emmanuel Macron reçoit à Versailles les 200 dirigeants des plus grandes multinationales dont Elon Musk, pour leur rendez-vous annuel Choose France, le Parlement européen organise un évènement intitulé Beyond growth (au-delà de la croissance) pour alimenter l’engagement autour du Green deal. Négligé politiquement, cet ambitieux programme européen peut offrir une véritable sécurité climatique, économique et financière d’ici 2030 aux investisseurs et aux industriels selon une étude publiée ce mardi 16 mai.

Emmanuel Macron Elon Musk Choose France 2023 LUDOVIC MARINPOOL AFP
Emmanuel Macron rencontre des hommes d'affaires, dont Elon Musk, le PDG de SpaceX, Twitter et Tesla et le PDG d'ArcelorMittal Lakshmi Mittal lors de la 6e édition du sommet "Choose France" le 15 mai 2023.
LUDOVIC MARIN / POOL AFP

Elon Musk, patron controversé de Twitter, Tesla et Space X, était la tête d’affiche de la sixième édition de Choose France, un programme lancé par Emmanuel Macron pour attirer dans l'Hexagone les investissements des multinationales étrangères. "C’est un signal fort" pour le ministre de l’Economie. Bruno Le Maire a fait état de négociations en cours avec la star de la tech plutôt malmenée ces temps-ci.

Le programme des investissements des 200 invités de marque de Choose France tourne autour de l’industrie verte, dont le chef de l’Etat avait vanté les mérites vendredi 12 mai à Dunkerque, en annonçant le lancement d’une giga factory de batteries nouvelle génération avec le taïwanais Prologium pour 5,2 milliards d’euros. Elle sera accompagnée d’un projet d’usines de composants et de recyclage de batteries associant le chinois XTC et le Français Orano (ex-Areva), toujours à Dunkerque et pour 1,5 milliard d’euros. Un peu plus à l’Est, à Sarreguemines, en Moselle, une usine d’Holosolis fabriquant des panneaux solaires sera installée pour 710 millions d’euros. 

La moisson est bonne, se félicite le gouvernement qui affiche au bilan de son sommet 13 milliards d’euros d’engagement d’investissements étrangers permettant de créer 8 000 emplois. Il n’y aurait donc pas de crise justifiant l’appel lancé à l’Europe par Emmanuel Macron de faire "une pause" de cinq à dix ans sur la normalisation environnementale. Cette demande relayée par le ministre de l’Industrie, Roland Lescure, semble en décalage total avec le Green Deal européen adopté en 2019 qui nécessite pour sa mise en œuvre une transformation radicale de la régulation économique afin de respecter les objectifs environnementaux que s’est donné l’Union.

Nouveau contrat social, sécurité énergétique renouvelée et création de nombreux emplois

Une étude prospective, publiée ce mardi 16 mai par un nouveau think tank, Strategic Perspectives, met l’accent sur les bénéfices qu’apportera le Green Deal d’ici 2030, à condition d’être jusqu’au-boutiste, c’est-à-dire d’adopter dans les temps tout le paquet règlementaire qu’il exige. Cette étude intitulée "Faire du Green Deal européen une réalité" montre tout le potentiel de ce Pacte vert pour répondre aux crises multiples du moment et offrir un modèle exemplaire d’économie respectueuse de l’environnement et du climat, gage de sécurité pour les entreprises et les investisseurs.

Si l’Europe en fait une vraie priorité, il apportera un nouveau contrat social, une sécurité énergétique renouvelée et la création de nombreux emplois en multipliant par deux les capacités de l’Europe en énergies renouvelables et par trois le taux de rénovation thermique annuel des bâtiments comparativement à 2021. Quant à l’industrie, elle pourra commencer sa modernisation en réduisant ses émissions de CO2 de 29% comparativement à un scenario Business as usual.

Pour Neil Makaroff, fondateur de Strategic Perspectives, "le Green Deal européen va agir comme un bouclier contre le coût de la vie". "Avec ses lois sur la transition écologique, l'Europe protège le portefeuille des ménages et des entreprises car elle fournit toutes les solutions pour réduire les factures d'énergie et s'éloigner du gaz, du pétrole et du charbon, qui sont les principaux moteurs de l'inflation", ajoute-t-il dans un communiqué.

Qui pour porter le Green Deal? 

Le Green Deal constitue donc un véritable avantage compétitif pour le continent. La bataille est rude au sein de l’Union Européenne entre les partisans de solutions techniques permettant de tenir l’engagement climat lointain de neutralité carbone à horizon 2050 et ceux qui défendent des transformations radicales et rapides pour faire face à l’urgence climatique, aux menaces qui pèsent sur les ressources en eau et au franchissement des limites planétaires.

Les seconds organisent trois jours de conférence au Parlement européen intitulés "Beyond growth" (au delà de la croissance, les chemins de la prospérité durable dans l’Union Européenne). Ursula Von Der Leyen, la présidente de la Commission européenne, y a été ovationnée quand elle a déclaré que "la croissance basée sur les énergies fossiles que sont le gaz et le pétrole, était obsolète". 

Mais si Ursula Von der Leyen semble prête, les dirigeants européens sont loin d’accorder leurs violons sur le Green Deal. Aucun d’entre eux n’en est un fervent défenseur. Ils continuent à privilégier des visions nationales au détriment d’un élan européen, ce dont Choose France est une illustration parmi d’autres.

Anne-Catherine Husson-Traore, directrice des publications de Novethic


© 2023 Novethic - Tous droits réservés

‹‹ Retour à la liste des articles

ENVIRONNEMENT

Climat

Les alertes sur le changement climatique lancées par les scientifiques conduisent à l’organisation de sommets internationaux, à la mise en place de marché carbone en Europe mais aussi en Chine. En attendant les humains comme les entreprises doivent déjà s’adapter aux changements de climat dans de nombreuses parties du monde.

Greenwashing istock

Greenwashing : un quart des entreprises contrôlées en France sont hors des clous

"Matières premières qui respectent à 100% la nature", "écoresponsable", "écologique"... La Répression des fraudes a passé au crible les mentions vertes apposées sur les produits des entreprises. Sur 1 100 contrôles, plus d'un quart des entreprises étaient en "anomalie". Preuve supplémentaire de...

AG TotalEnergies

Fronde à l'AG de TotalEnergies : un tiers des actionnaires soutiennent une résolution climatique ambitieuse

Si les échauffourées en marge de l'Assemblée générale de TotalEnergies ont particulièrement retenu l'attention, le vote surprise d'une partie des actionnaires laisse à penser que le message des militants commencent à infuser. Environ un tiers d'entre eux ont en effet voté en faveur d'une résolution...

Sultan al jaber president cop28 UAE Climate tech KARIM SAHIB AFP

COP28 : une centaine d'élus européens et américains exigent le retrait du président Sultan Al-Jaber

La nomination de Sultan Al Jaber à la tête de la COP28 ne passe décidément pas. Plus d'une centaine de parlementaires européens et américains ont envoyé une lettre ouverte à leurs dirigeants pour demander son retrait. Sultan Al Jaber est notamment à la tête de la compagnie pétrolière nationale...

CO2 neutral

Exit le greenwashing, l'Union Européenne va encadrer l'utilisation du terme "neutralité carbone"

Fini les fausses allégations de neutralité carbone ? Le Parlement européen veut en tout cas l'encadrer en interdisant aux entreprises qui se basent uniquement sur la compensation de leurs émissions de CO2 et non sur une réduction directe, d'utiliser le terme de "net zero" ou "neutralité carbone"....