Panique dans les entreprises ! Tempêtes, inondations, grêle, canicules… la succession d’événements climatiques dans le monde menace de plus en plus leur bon fonctionnement. Mais, selon une étude réalisée par l’association pour le management des risques et assurances des entreprises (Amrae) et Axa Climate, elles sont encore bien peu nombreuses à avoir mis en place des dispositifs suffisants pour adapter leurs sites aux conséquences du réchauffement climatique.
La prise de conscience de leur fragilité semble pourtant s’améliorer tous les ans, les responsables des risques des entreprises sonnant l’alerte dans leur société. Les tempêtes, cyclones ou tornades arrivent en tête de leurs préoccupations pour 92% d’entre eux (77% l’année dernière), d’autres risques climatiques comme les canicules et les inondations suivant de près. "On voit qu’il y a une vraie bascule et une meilleure prise en compte de ces sujets dans les métiers de risk managers", remarque ainsi Antoine Denoix, directeur général d’Axa Climate. Les grands groupes sondés dans l’étude sont ainsi 66% à avoir mis en place une gouvernance dédiée aux risques climatiques, en constante augmentation sur ces trois dernières années (52% en 2021).
L’angle mort de la chaîne d’approvisionnement
Mais, une fois le constat établi, la mise en œuvre des plans d’adaptation peine à suivre. D’autant que la connaissance réelle de l’exposition aux événements climatiques doit se faire au niveau de chacune des implantations de l’entreprise. Cette connaissance fine des risques physiques pesant sur leurs sites fait encore largement défaut. "Il y a un enjeu de connaissance de notre exposition aux risques physiques et un enjeu d’accès à la donnée. Il n’y a pas vraiment de marché de la donnée d’exposition organisé", déplore Michel Josset, président de la commission "Prévention et dommages" de l’Amrae. Des données d’autant plus importantes que les entreprises ne peuvent pas se contenter de l’exposition de leurs sites, elles doivent également se préoccuper de celles de leurs fournisseurs, dont l’arrêt brutal de l’activité en raison d’une catastrophe naturelle aura des conséquences aussi sur leur production. Là aussi, les risk managers s’avouent perdus : 44% déclarant avoir une mauvaise visibilité sur les risques pesant sur leurs fournisseurs et un quart n’ayant pas de réponse à fournir.
L’une des fonctions des risks managers dans les entreprises consiste à gérer les assurances, pour couvrir les risques inévitables. Mais là aussi, des progrès restent à faire, les entreprises estimant ne pas être suffisamment épaulées par leur assureur. Ils se révèlent ainsi très inquiets pour l’avenir de leurs sites : 71% des gestionnaires de risques craignent que certaines zones géographiques dans lesquelles leur entreprise est implantée deviennent inassurables. Si en France le cas ne s’est pas encore réellement présenté, plusieurs grands assureurs ont déjà déclaré ne plus vouloir assurer les habitations en Californie en raison de l’enchaînement d’évènements climatiques.
Pas d’incitation à l’action
Ils sont par ailleurs 54% à craindre que l’activité même de leur entreprise ne puisse plus être assurée à l’avenir. Une crainte qui n’est pas infondée, de plus en plus de compagnie d’assurance déclarant vouloir se désengager de certains secteurs des énergies fossiles, tant pour leur activité d’investisseur que pour celle de souscription d’assurance.
Ces inquiétudes sont en revanche loin de se refléter dans les polices d’assurance. "Des entreprises s’engagent dans la décarbonation de leur activité et dans la protection de leurs sites, mais aujourd’hui les assureurs ne savent pas le prendre en compte dans leurs tarifs", souligne Michel Josset. Seuls 13% des compagnies d’assurance prennent en compte l’empreinte carbone de leurs clients dans leurs propositions. "Il faut des éléments incitatifs, reprend Michel Josset. Il n’est pas normal qu’une entreprise qui fait des efforts soit traitée de la même manière que les autres."
Arnaud Dumas