Publié le 26 août 2023
ÉCONOMIE
Avec l’entrée en application du DSA, l’Union européenne veut responsabiliser les géants du web
Le Digital Services Act, la loi européenne sur les services numériques adoptée en novembre 2022, entre désormais en application pour les 19 plus grandes plateformes internet. Cette nouvelle réglementation entend obliger les réseaux sociaux, moteurs de recherche et site de vente en ligne, à mieux modérer les contenus publiés sur leurs sites et éviter les pratiques dangereuses. Ces obligations de transparence et de modération poussent les géants du web à revoir leurs modèles. Meta a annoncé la création de 1000 postes.

@AdemAY / Unsplash
La modération des contenus étaient jusqu’alors laissée au bon vouloir des géants du net. L’Union européenne veut désormais avoir son mot à dire. L’entrée en vigueur, ce 25 août 2023, du Digital Services Act (DSA) va les obliger à prêter une plus grande attention à ce qui est publié sur leurs sites, sous peine de lourdes amendes. La loi européenne prévoit qu’elles peuvent s’élever jusqu’à 6% du chiffre d’affaires de l’entreprise, voire l’interdiction d’agir sur le marché européen. Pour le moment, seules sont concernées les plus grandes plateformes, touchant plus de 45 millions d’utilisateurs en Europe par mois. Soit en tout 19 entités, parmi lesquelles des réseaux sociaux comme X, Facebook, Instagram, LinkedIn, TikTok, des fournisseurs de services comme Apple, Amazon, Alibaba, Zalando, ou encore des moteurs de recherche comme Google ou Bing.
Today, the Digital Services Act — #DSA — becomes legally enforceable for Very Large Online Platforms & Search Engines.
These systemic platforms play a very important role in our daily lives — so it was time for the EU to set our own rules.
A safer Internet for everyone pic.twitter.com/fGPCERx5mW— Thierry Breton (@ThierryBreton) August 25, 2023
"Aujourd’hui, la loi sur les services numériques (DSA) devient juridiquement contraignante pour les très grandes plateformes en lignes et les moteurs de recherche. Ces plateformes systémiques jouent un rôle très important dans notre quotidien – il était donc temps que l’UE établisse ses propres règles. Un internet plus sûr pour tout le monde", se félicite sur le réseau X Thierry Breton, le commissaire européen au marché intérieur.
Faciliter les signalements
Les controverses sur les contenus haineux, à caractère raciste ou bien dangereux pour les mineurs s’enchaînent en effet depuis plusieurs années, avec peu d’intervention des pouvoirs publics. Dernier scandale en date, celui concernant une plateforme de rencontre pour adolescents. Les vérifications inexistantes des profils des personnes se connectant ont attiré des pédocriminels, qui se faisaient passer pour des adolescents. Des alertes de la part d’internautes ont été lancées depuis plusieurs semaines. Selon France Info, Pharos, le site public de signalement des contenus et comportements illicites sur Internet, a reçu 409 alertes depuis la création du site Rencontre-ados. Google a depuis annoncé avoir retiré le site du Play Store, son magasin d'applications.
La nouvelle loi européenne devrait donc faciliter le travail de ce type de sites de signalement. D’autant que, si le DSA s’applique pour l’instant aux très grandes plateformes, il devrait être généralisé l’année prochaine à toutes les autres. Le DSA va ainsi obliger à mesurer les risques pesant sur les utilisateurs (contenus illicites, atteinte à la liberté d’expression, atteinte aux processus électoraux, atteinte au bien-être physique et mental, etc.), et à prendre des mesures pour les atténuer. Elles sont donc amenées à créer un poste chargé de la conformité à ces règles européennes, à rendre plus transparents leurs outils de recommandation publicitaire, à partager les données collectées avec les autorités européennes, mais aussi à mettre en place un outil visible de signalement des contenus illicites ou dangereux et à traiter ces signalements.
Les plateformes se mettent en conformité
Autant de règles qui vont bousculer les activités des géants du net. Meta, la maison-mère de Facebook et Instagram, a ainsi déclaré par la voix de Nick Clegg, son président des affaires publiques, qu’elle avait dû créer 1000 postes pour pouvoir se mettre en conformité avec la loi européenne. Plusieurs mesures ont déjà été mises en place par la firme américaine, telles que l’arrêt pour les 13-17 ans des publicités ciblées en fonction de leurs activités, ou encore la mise en place d’une librairie des contenus pour faciliter le travail des chercheurs. Meta met également en place des flux chronologiques des Stories et Reels sur ses plateformes pour éviter les recommandations ciblées.
Google a également annoncé des mesures pour améliorer la transparence de ses publicités et permettre aux chercheurs d’accéder à ses données. De son côté, X, l’ancien Twitter, met plus de temps à se conformer à la nouvelle règle européenne. "Nous travaillons dur dessus", a néanmoins affirmé Elon Musk, propriétaire du réseau social, en réponse au message de Thierry Breton. Depuis l’arrivée d’Elon Musk à sa tête, l’ex-firme à l’oiseau bleu a néanmoins adopté des politiques qui semblent aller à rebours de la loi européenne. Il a notamment taillé dans ses effectifs chargés de la modération et prévoit de retirer la fonctionnalité permettant de bloquer certains messages.