Publié le 8 février 2021
Courtepaille, Flunch ou Exki… Les licenciements, plans de sauvegardes et redressements judiciaires commencent à s’enchaîner dans les groupes de restauration. Un effet crise mais pas seulement : car les chaînes de restauration souffraient déjà depuis quelques années du changement de comportements des consommateurs.

Avec ses 55 millions de clients servis chaque année dans ses 227 restaurants, Flunch se voulait "la première chaîne française de restauration en libre-service". Mais ça, c’était avant le Covid-19. Après 50 ans de service, la chaîne du groupe Mulliez (Auchan, Décathlon…) se place en procédure de sauvegarde. 60 restaurants devraient fermer et plus de 1 200 emplois sont menacés selon les syndicats. Avant Flunch, c’est l’enseigne de viande grillée, Courtepaille qui avait flanché en juillet dernier. Depuis, elle a été reprise par Buffalo Grill. L’essentiel des salariés devrait garder leur emploi mais l’enseigne ne conservera que 145 des 300 restaurants.
Ce n’est que l’avant-garde de la crise globale du secteur de la restauration, mis à mal par les restrictions sanitaires imposées par le Covid-19. Les estimations de faillites pour 2021 varient d’un tiers à 80 % du secteur. La crise sanitaire a été fatale avec l’arrêt du service en salle. Mais elle a plus joué un "rôle d’accélérateur" que de déclencheur assure Bertrand Boutboul, président et fondateur de Gira Conseils.
Changement de comportement
Pour ce spécialiste de la restauration, ces modèles industriels de grandes chaînes souffraient depuis quelques années déjà. "Les chaînes font face à un désamour des Français qui ont changé leur rapport à l’alimentation et sont plus en recherche de saveurs locales, de ‘fait maison’, etc. Près de tiers des 256 chaînes de restauration ne vont pas bien", souligne-t-il.
La crise a tout de même brisé la croissance de certaines enseignes pourtant positionnées sur le créneau du "bien manger". C’est le cas d’Exki qui vient de placer sa branche française en redressement judiciaire. Son chiffre d’affaires mondial a chuté de 80 % et 70 % de ses restaurants restent fermés. En France, trois-quarts de ses 42 restaurants ont fermé leur porte. Mais, les loyers, importants, continuent de tomber. La mise en redressement judiciaire est donc "une façon de protéger nos salariés et de forcer nos bailleurs à examiner la situation et à négocier", précise David Esseryk, directeur marketing, digital et innovation d’Exki, au journal Les Echos.
Tant que le virus circulera, les perspectives resteront sombres pour le secteur. D’autres chaînes vont jeter l’éponge dans les prochains mois, prédisent les experts. Face au déploiement du télétravail et à l’arrêt de l’événementiel, la restauration collective risque aussi de connaître de nouveaux coups durs. Les leaders du secteur comme Elior et Sodexo ont déjà dû procéder à des licenciements massifs.
La menace de la fin de "perfusion"
De leur côté, les indépendants tiennent le coup, pour quelque temps encore. Les différentes mesures de l’État peuvent couvrir jusqu’à 80 % de leurs coûts fixes et les activités de livraison leur permettent parfois de sauver une part non négligeable de leur chiffre d’affaires (jusqu’à 50%). "Plus de 90 % des 200 000 restaurants français sont des affaires familiales avec un ou deux salariés. Les dégâts commenceront dès que la mise sous perfusion s’arrêtera. Ce sont alors entre 180 000 et 200 000 emplois qui seront menacés", assure Bertrand Boutboul.
Seule note d’optimisme, les Français restent attachés à leurs cafés et restaurants. L’an dernier, dès le confinement levé, ils se sont retrouvés en masse en terrasses, amenant un meilleur chiffre d’affaires sur la période d’ouverture (mai-octobre) qu’en 2019, selon les prochains résultats l’étude de marché 2020 de Gira Conseils à paraître dans quelques semaines.
Béatrice Héraud, @beatriceheraud

Découvrir gratuitement l'univers Novethic
  • 2 newsletters hebdomadaires
  • Alertes quotidiennes
  • Etudes