La désertification n’est plus un sujet lointain, concernant seulement une poignée de pays. Selon un nouveau rapport publié par la Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification (CNULCD) à l’occasion de la COP16 Désertification, qui entame sa seconde et dernière semaine, les trois-quarts de la planète ont connu un climat plus sec ces trente dernières années. Les zones arides se sont étendues d’environ 4,3 millions de km2 – une superficie près d’un tiers plus grande que celle de l’Inde, le septième plus grand pays du monde – et couvrent désormais 40,6% de toutes les terres de la planète (à l’exclusion de l’Antarctique).
Parmi les zones particulièrement touchées par cette tendance à l’assèchement, on trouve la quasi-totalité de l’Europe (95,9% de ses terres), certaines parties de l’ouest des États-Unis, le Brésil, certaines parties de l’Asie (notamment l’Asie de l’Est) et l’Afrique centrale. Le rapport cite également le Soudan du Sud et la Tanzanie comme les pays où le pourcentage de terres est le plus élevé en zones arides, et la Chine comme le pays dont la superficie totale est la plus importante passant des zones non arides aux terres arides.
12% du PIB
En cause : le changement climatique causé par l’Homme. “Les émissions de gaz à effet de serre provenant de la production d’électricité, des transports, de l’industrie et des changements d’utilisation des terres réchauffent la planète et affectent les précipitations, l’évaporation et la vie végétale, créant ainsi des conditions qui augmentent l’aridité”, explique le rapport.
“Pour la première fois, un organisme scientifique de l’ONU avertit que la combustion des combustibles fossiles provoque un assèchement permanent dans une grande partie du monde, avec des impacts potentiellement catastrophiques sur l’accès à l’eau, pouvant rapprocher encore davantage les populations et la nature de points de bascule désastreux”, avertit Barron Orr, scientifique en chef de la CNULCD.
Les conséquences de l’aridité sont multiples : dégradation des sols, effondrement des écosystèmes, insécurité alimentaire, pénuries d’eau, incendies ou encore migrations forcées. L’aridité est considérée comme le principal facteur de dégradation des systèmes agricoles dans le monde. Elle est à l’origine d’une baisse de 12% du PIB dans les pays africains entre 1990 et 2015. En Afrique centrale et dans certaines parties de l’Asie, la désertification met en danger d’innombrables espèces tandis qu’en Méditerranée et dans l’Europe du Sud, des régions agricoles considérées comme des greniers à blé, un avenir sombre se dessine à mesure que les conditions semi-arides s’étendent.
5 milliards de personnes
Les recherches démontrent que si le monde ne parvient pas à réduire les émissions de gaz à effet de serre, 3% supplémentaires des zones humides de la planète deviendront des zones sèches d’ici la fin du siècle. Dans les scénarios de fortes émissions de gaz à effet de serre, l’expansion des zones arides est prévue dans le Midwest des États-Unis, le centre du Mexique, le nord du Venezuela, le nord-est du Brésil, le sud-est de l’Argentine, toute la région méditerranéenne, la côte de la mer Noire, de grandes parties de l’Afrique australe et le sud de l’Australie.
Aujourd’hui, 2,3 milliards de personnes – bien plus de 25% de la population mondiale – vivent déjà dans des zones arides. Et alors que la planète continue de se réchauffer, les projections du pire des scénarios suggèrent que jusqu’à 5 milliards de personnes pourraient vivre dans des zones arides d’ici la fin du siècle, aux prises avec des sols épuisés, des ressources en eau en baisse et la diminution ou l’effondrement d’écosystèmes.