Qu’est-ce qu’un plan de transition climatique ?
Un plan de transition climatique est un document stratégique que les entreprises doivent publier pour démontrer comment elles comptent réduire leurs émissions de gaz à effet de serre (GES) et s’adapter au changement climatique. Ce plan, demandé dans le cadre de la CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive), s’inscrit dans les obligations de reporting extra-financier des entreprises. Il doit être conforme aux normes européennes ESRS (European Sustainability Reporting Standards), et en particulier à l’ESRS E1, dédié au changement climatique. L’objectif est d’assurer que les entreprises mettent en place des stratégies compatibles avec la limitation du réchauffement climatique à 1,5°C, conformément à l’Accord de Paris.
Les éléments clés du plan de transition climatique
Un plan de transition doit contenir certaines informations essentielles permettant d’analyse la politique climatique de l’organisation et sa solidité du point de vue scientifique :
Trajectoire de décarbonation
Le cœur du plan de transition est la définition d’une trajectoire de décarbonation, c’est-à-dire un plan de réduction progressive des émissions de GES. L’entreprise doit fixer une année de référence, une année cible (notamment 2030 et 2050), et des objectifs de réduction exprimés en valeur absolue, et éventuellement en intensité. Ces objectifs doivent couvrir les émissions des scopes 1, 2 et 3 et être compatibles avec un scénario de réchauffement climatique limité à 1,5°C.
Leviers de décarbonation
Les leviers de décarbonation représentent les actions que l’entreprise prévoit de mettre en place pour atteindre ses objectifs. Cela peut inclure des stratégies de sobriété, d’économie circulaire ou des changements dans les offres commerciales pour privilégier des offres bas carbone, mais aussi l’utilisation d’énergies renouvelables, l’amélioration de l’efficacité énergétique, ou encore la réduction de la consommation de carburant. Ces leviers doivent être détaillés et quantifiés afin de mesurer leur impact sur la trajectoire de décarbonation.
Emissions verrouillées
Les émissions verrouillées (ou bloquées) sont les émissions générées par les actifs à long terme, tels que les équipements industriels ou les infrastructures (autoroutes, aéroports…). L’entreprise doit calculer et publier les émissions futures de ces actifs, et évaluer comment elles pourraient compromettre ses objectifs climatiques. La gestion de ces actifs est cruciale pour éviter des risques financiers ou réglementaires liés à la transition climatique, notamment quand ils deviennet des actifs échoués, qui perdent de leur valeur au fur et à mesure de la transition climatique.
Ressources financières allouées
L’entreprise doit indiquer les ressources financières et humaines allouées à la mise en œuvre de son plan de transition. Cela inclut les dépenses d’investissement (CapEx) et opérationnelles (OpEx) nécessaires pour atteindre les objectifs. Le plan doit aussi montrer comment ces dépenses s’intègrent dans la stratégie globale de l’entreprise et sa transition vers une économie bas-carbone.
Gouvernance et suivi
Le suivi du plan de transition est primordial. L’entreprise doit définir des indicateurs de performance pour évaluer sa progression, tels que les émissions de GES totales par scope, la consommation énergétique ou encore les investissements dans des technologies propres. Ces indicateurs permettent aux investisseurs de juger la crédibilité du plan et de son avancement.
Le rôle du plan de transition dans la stratégie de l’entreprise
Pour garantir l’efficacité des plans de transition, l’Union européenne exige que ces derniers soient “science based”, c’est-à-dire fondés sur des données scientifiques crédibles et en cohérence avec les recommandations du GIEC. Cela signifie que les hypothèses utilisées doivent être compatibles avec les objectifs mondiaux de réduction des émissions de GES. De plus, un plan de transition n’a de sens que s’il est financé. La CSRD pousse ainsi les entreprises à aligner leur plan de transition avec leur plan financier, créant un lien direct entre leurs engagements environnementaux et leurs objectifs économiques. Cette convergence est cruciale pour mesurer l’écart entre les promesses faites aux actionnaires et les actions concrètes en faveur du climat.
Au-delà des obligations de la CSRD, le plan de transition est un outil stratégique pour les entreprises. Il permet d’anticiper les risques liés à la transition vers une économie bas-carbone, tels que les coûts futurs liés à la taxe carbone ou les risques réputationnels. Ce plan offre également une vision à long terme, en alignant les objectifs climatiques de l’entreprise avec sa stratégie commerciale et financière.
Comment réaliser son plan de transition climatique ?
Les entreprises peuvent s’appuyer sur des méthodologies reconnues comme le cadre SBTi (Science Based Targets initiative) pour fixer des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) à court, moyen et long terme. Il est important que ces objectifs couvrent les émissions directes (scope 1), indirectes liées à l’énergie (scope 2), ainsi que les émissions de la chaîne de valeur (scope 3).
Identifier les risques climatiques et opportunités
Dans le cadre de la CSRD, il est demandé aux entreprises de procéder à une évaluation des risques climatiques auxquels elles sont exposées (risques physiques, risques de transition). Cela inclut des scénarios sur les impacts des aléas climatiques et les évolutions réglementaires. En parallèle, les entreprises doivent explorer les opportunités liées à la transition écologique, notamment en termes d’innovation, de réduction des coûts énergétiques ou d’amélioration de leur compétitivité.
Assurer la transparence et l’intégrité des données
La CSRD exige une transparence accrue dans la communication des données ESG, notamment à travers les normes ESRS (European Sustainability Reporting Standards). Les entreprises doivent rendre compte de manière claire de leurs progrès dans la mise en œuvre du plan de transition, tout en évitant le greenwashing. Il est crucial de garantir la qualité des informations communiquées en ayant recours à des audits externes qui vérifieront l’intégrité des données financières et extra-financières, en lien avec les risques climatiques.
Intégrer le plan de transition dans la stratégie globale de l’entreprise
Le plan de transition climatique ne doit pas être un document isolé mais intégré au cœur de la stratégie d’entreprise. Il s’agit alors de s’assurer de l’engagement de la gouvernance de l’entreprise en définissant des responsabilités claires au sein des conseils d’administration pour superviser la mise en œuvre du plan et vérifier que des actions correctives sont prises en cas de déviation par rapport aux objectifs fixés. D’autre part, en plus de contenir un plan de financement adéquat, le plan de transition doit également être articulé avec le plan stratégique global et partagé avec les parties prenantes, notamment les investisseurs. L’objectif est d’assurer une cohérence entre les décisions financières et les engagements environnementaux. La CSRD encourage également à développer un dialogue avec les investisseurs, qui jouent un rôle clé dans l’allocation de capital pour soutenir la transition.
Mettre en place des indicateurs de suivi précis
Enfin, la CSRD impose aux entreprises de suivre des indicateurs de performance environnementale précis, tels que les niveaux d’émissions de GES, la part des investissements alignés sur la taxonomie verte, ou encore les dépenses d’exploitation en lien avec des activités durables. Ces indicateurs permettront d’évaluer régulièrement l’efficacité du plan de transition et d’ajuster la stratégie si nécessaire.
En suivant ces recommandations, les entreprises pourront développer un plan de transition robuste, cohérent avec les exigences de la CSRD et les attentes des investisseurs et régulateurs.
Pour plus de détails sur la présentation du plan de transition au format ESRS, le guide publié sur le sujet par l’AMF ici peut servir de base.