C’est une figure influente des Républicains qui a été choisie pour le ministère de l’Agriculture, de la Souveraineté alimentaire et de la Forêt. Ancienne membre de la commission des Affaires culturelles et de l’éduction, vice-présidente de l’Assemblée nationale et professeure de lettres de métier, elle visait quant à elle plutôt l’Education que l’Agriculture. Son seul fait d’armes connu sur le sujet est sa participation active aux débats sur le projet de loi d’orientation pour la souveraineté agricole et la parution d’un livre blanc des LR sur l’agriculture , qu’elle a co-signé. Un livre blanc proposant notamment d’instaurer “un moratoire sur la suppression d’outils phystosanitaires” et proposant “moins de charges et moins de normes”. Des propositions, de manière générale, très proches des revendications de la FNSEA qui ont été formulées en pleine crise agricole, en janvier 2024.
“C’est un signal inquiétant. Quand un ou une ministre ne connait pas bien ses sujets, il est plus enclin à suivre les propositions des lobbys comme la FNSEA (le principal syndicat agricole, NDR)”, argue Nadine Lauverjat, déléguée générale de l’association Générations futures. “Le choix d’Annie Genevard au ministère de l’Agriculture laisse présager le pire au regard de sa faible expérience sur ces thématiques, et de ses quelques prises de position sur le sujet en tant que députée Les Républicains”, tacle Greenpeace. “Rappelons que les causes profondes de la crise agricole qui a ébranlé le pays en début d’année 2024 n’ont pas été adressées par le gouvernement. Pire, elles ont été aggravées par des mesures dites de “simplification” qui viennent en réalité renforcer les lobbys agroindustriels défendus par la FNSEA”.
Des positionnements proches de la FNSEA
Du côté de la FNSEA justement, on entend bien faire monter la pression. Si le syndicat se félicite de la nomination de la ministre, faisant valoir son “expérience politique et sa bonne connaissance de la ruralité”, il lui donne 15 jours pour formuler des mesures d’urgence. Il faut dire que le contexte de son arrivée rue de Varenne est particulièrement inquiétant. D’un côté, la fièvre catarrhale se propage chez les ovins et bovins et d’un autre, la récolte de blé n’a jamais été aussi faible depuis 40 ans en raison des fortes pluies. “De toute urgence, la ministre devra apporter des solutions claires, rapides et précises aux différentes crises qui frappent les agriculteurs”, plaide la FNSEA.
Au-delà de ces crises conjoncturelles, Annie Genevard est attendue notamment sur ses positions environnementales et la gestion de dossiers comme celui des pesticides. En mai dernier, Marc Fesneau, alors ministre de l’Agriculture, avait présenté un plan Ecophyto 2030 dont l’objectif initial était de réduire de 50% l’usage des pesticides. Si l’objectif reste le même que le plan Ecophyto 1 datant de 2008, le nouvel indicateur proposé par le gouvernement a été très critiqué par les ONG. Elles fustigent une manœuvre destinée à faire croire à une réduction de l’usage des pesticides.
Concrètement l’indicateur de référence, le NODU, a été remplacé par le HRI1 (indice de risque harmonisé). Or il semble peu probable qu’Annie Genevard revienne sur cette proposition mais les ONG comptent bien rappeler au chef du gouvernement, Michel Barnier, qu’il a été lui-même ministre de l’Agriculture. Surtout, qu’il a “su résister aux pressions, notamment celles de la FNSEA, durant les négociations du Grenelle sur les pesticides”, indique Générations futures. Le ministre avait alors maintenu l’objectif de réduction des pesticides et son indicateur de référence, le NODU…
Quid de la réduction des pesticides
La position d’Annie Genevard est également attendue sur les méga-bassines, la gestion des cours d’eau, le glyphosate (elle était absente lors du vote à l’Assemblée nationale sur son interdiction) ou encore sur la direction prise par l’Office français de la biodiversité, très critiquée par les agriculteurs et chasseurs. Sur le bien-être animal et la chasse dans son ensemble, l’ONG L214 a passé au crible ses votes lorsqu’elle était députée et lui octroie la note de seulement 4/20. Selon l’ONG, l’ancienne députée a en effet voté pour des amendements visant à maintenir la chasse à la glu, demandé au gouvernement de revenir sur l’interdiction de tuer des cormorans dans l’intérêt de la pêche de loisirs ou encore voté pour un amendement visant à réautoriser la chasse le dimanche.
Pour l’anecdote, Annie Genevard, a été découverte par le grand public lorsque Eric Ciotti s’était retranché au bureau du siège du parti en juin dernier. C’est elle, en tant que secrétaire général de LR qui a dénoué la situation en retrouvant un double des clés. Une scène de Boulevard qui a révélé au grand jour les dissensions au sein d’un parti en perte de vitesse. Depuis, les Républicains ont résisté aux élections législatives et Emmanuel Macron a nommé Michel Barnier, ancien ministre et député LR à Matignon, l’occasion de donner un second souffle au parti de droite.