En route vers la déchetterie ? Dans un nouveau rapport publié mercredi 17 avril et intitulé “L’obsolescence dans l’automobile : vers des voitures jetables ?”, l’association Halte à l’Obsolescence Programmée (HOP) pointe du doigt la perte de réparabilité des véhicules, électriques en particulier. L’association relate un scénario de “fast-fashion de l’automobile” qui donne des sueurs froides.
“En 2044, malgré une relative fiabilité, quand la batterie fatigue ou dysfonctionne, il faut jeter la voiture !”. D’autant plus que “le réseau de réparateurs indépendants, pourtant si développé dans les années 2020 a fondu comme neige au soleil”, esquisse le rapport. Quant aux SAV des réparateurs, “c’est la politique du zéro service qui domine, sur laquelle Tesla fût précurseur”, projette HOP.
Les nouveaux véhicules électriques s’avèrent moins réparables
Aujourd’hui, certaines batteries électriques sont déjà difficiles à démonter. Couvercle scellé, résine ou mousse entourant les composants de la batterie… Ces conceptions économiquement plus avantageuses pour les constructeurs peuvent compromettre les possibilités de réparation. Paradoxalement, les batteries les plus réparables se trouvent sur d’anciens véhicules comme la Renault ZOE ou la Peugeot iOn dont le couvercle de batterie est vissé.
“C’est la loterie pour l’automobiliste lors de l’achat puisqu’il n’a pas de moyens de savoir facilement quel modèle dispose d’une batterie réparable”, indique le rapport. D’autant plus que “seule la moitié des constructeurs proposent des batteries réparables”. Des craintes émergent aussi sur la durée de vie des batteries alors que la charge rapide réduit le nombre de cycles de recharge. Or le coût d’une batterie représente entre 30% et 40% du prix des véhicules.
Autre tendance : la production de nouveaux modèles au moyen de très grandes pièces moulées au lieu d’un assemblage de dizaines de tôles. Source d’économies et de légèreté pour les constructeurs, cette technique nommée “giga-casting” peut s’avérer un cauchemar pour les réparateurs et assureurs : “au moindre choc, il faudra remplacer une partie si importante de la voiture qu’il sera probablement plus rentable de la mettre à la casse en cas de choc”, craint l’association. A cela s’ajoute le risque croissant d’obsolescence logicielle numérique, dont les nouveaux véhicules raffolent.
Des avancées au niveau européen
Selon HOP, le secteur automobile délaisse la réparabilité pour faire baisser les prix. Or le coût pour les consommateurs pourrait exploser à terme. Le loueur Hertz s’est par exemple séparé d’une grande partie de sa flotte de véhicules électriques face au prix des réparations. « Au Royaume-Uni, certains assureurs ont d’ores et déjà commencé à augmenter les primes d’assurance face à ces pratiques d’irréparabilité », abonde le rapport.
L’association appelle donc à ce que ces éléments soient pris en compte. Le Parlement européen a donné son feu vert le 13 mars dernier pour la nouvelle norme Euro 7 qui introduit des exigences minimales de performance pour les batteries. Celles-ci devront fonctionner à hauteur de 80% de leur capacité jusqu’à cinq ans ou 100000 km et 72% jusqu’à huit ans ou 160.000 km. Un “passeport environnemental” est aussi prévu pour informer les consommateurs des performances et de l’état des batteries.
Le nouveau règlement sur la circularité des véhicules proposé par la Commission européenne en juillet 2023 devrait également améliorer la réparabilité des véhicules grâce à une conception qui facilite le démontage des pièces. Une avancée qu’il faudrait pousser plus loin, selon HOP, en permettant le désassemblage et le remplacement “au niveau des modules” des batteries. Plus largement, l’association plaide pour l’instauration d’un “indice de réparabilité”.