"La Commission européenne va-t-elle enfin comprendre que les Européens veulent une proposition de définition des perturbateurs endocriniens (PE) qui les protège réellement des dangers de ces substances, ou bien va-t-elle continuer à n’écouter que le son de cloche des lobbies de l’agrochimie ?", s’insurge l’association Générations futures.
Pour la quatrième fois depuis juin 2016, la Commission européenne a subi un revers. Faute de majorité qualifiée, elle a renoncé à présenter au vote sa définition et ses "critères d’identification" des PE. La France, le Danemark ou encore la Suède, se sont clairement positionnés contre sa proposition des perturbateurs endocriniens, destinée à réglementer, sur le marché, ces produits chimiques capables de modifier le système hormonal.
"Certes, la Commission a fait des concessions, estime la députée européenne écologiste Michèle Rivasi, mais sa proposition est trop faible en matière de protection de notre santé et de notre environnement et les États membres ont eu raison de ne pas la soutenir".
Principe de précaution ?
Plusieurs États, dont la France, leader sur la question, estiment en effet que les définitions proposées à de multiples reprises par la Commission depuis juin 2016 ne sont pas assez protectrices. De manière générale, ils reprochent à la Commission de ne pas respecter le principe de précaution. Et d’opter pour une approche fondée sur le danger.
"Le niveau de preuves (de la dangerosité des perturbateurs endocriniens, NDLR) exigé par la Commission européenne est inatteignable", estime l’association Générations futures. "La Commission demande à pouvoir identifier le mode d’action et les effets sur un organisme d’une substance pour la caractériser comme un perturbateur endocrinien, en contradiction avec la définition de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), qui ne prend en compte que les dommages constatés sur l’organisme et pas le mode d’action", renchérit Michèle Rivasi.
Exception pour les pesticides
Autre reproche adressé à la Commission : une formule technique dans laquelle elle promet une dérogation pour les pesticides. "C’est absurde, estimait déjà en décembre François Veillerette, directeur de Générations futures. À quoi peut bien rimer une législation censée interdire les perturbateurs endocriniens pesticides ou biocides… qui commence par mettre à l’abri d’une éventuelle interdiction les produits ayant justement été conçus pour être des perturbateurs endocriniens ?"
Mais le blocage ne pourra pas durer éternellement. La Commission a fait évoluer ses règles. Avant la réforme, les abstentions de certains États-membres étaient comptabilisées comme des votes défavorables, donc contre la proposition soumise. Désormais, ils seront comptabilisés comme des votes favorables. Le but : pousser les États à se positionner clairement sur le sujet.
Le coût des effets sanitaires des perturbateurs endocriniens est estimé entre 150 et 260 milliards d’euros pour la société européenne.
Mise à jour le 1er mars à 8h