Publié le 18 août 2020
GOUVERNANCE D'ENTREPRISE
PSG-Leipzig : l’argent du Qatar contre celui de Red Bull en demi-finale de la Ligue des Champions
Ce soir la demi-finale de la Ligue des Champions est un match de football qui devrait réjouir tous les amateurs privés longtemps de ce spectacle à suspens. Mais c’est aussi un affrontement économique de haut vol entre deux clubs qui n’ont pas les mêmes circuits de financement. Choc entre deux histoires pour un même schéma budgétaire.

@PSG
L’attaque de prestige du PSG coûte cher : Neymar gagne plus de trois millions d’euros par mois, Kylian Mbappé près de deux millions d’euros. Pour pourvoir se payer ces stars internationales, le PSG est depuis près de dix ans, dopé par l’argent investi par le Qatar. En 2011, son fonds souverain rachète 70 % des parts du Club au fonds de private equity américain Colony Capital pour 30 à 40 millions d’euros.
C’est le début d’une offensive du petit Royaume qui n’a pas le pétrole de son grand voisin l’Arabie Saoudite avec qui il est en pleine guerre froide mais une stratégie : utiliser le "soft power" du sport pour gagner en visibilité dans le monde entier. Et il a très bien réussi. Selon Forbes, le Paris Saint-Germain a connu une croissance de valorisation de 992 % en dix ans et était estimé à plus d’un milliard d’euros en janvier 2020.
Pour l’économiste du sport, Christophe Lepetit qui s’exprimait dans Le Parisien à ce moment-là : "La puissance financière du Qatar a permis d’amorcer la pompe en le dotant de très bons joueurs, en lui faisant gagner des titres. Potentiellement, les Qataris disposent d’un club qui vaut beaucoup plus que le montant déboursé pour l’acheter. Mais je ne pense pas qu’ils soient dans une stratégie de vente. Ils sont toujours dans leurs stratégies de soft power".
RB Leipzig, créé il y a onze ans
Le RB Leipzig est un obstacle sérieux sur la route du Qatar vers le titre de la Ligue des Champions qu’il convoite depuis le rachat du Club. Le club allemand est passé lui aussi en dix ans du statut de petit centre local formé en 2009 à joueur d’une demi-finale de la Ligue des Champions ! C’est un club professionnel depuis sept ans seulement et il s’appelle RB Leipzig officiellement pour RasenBallsport (sport de balle de pelouse) Leipzig. Mais officieusement, ce "RB" permet aux fans de football de penser au Red Bull, marque sponsor du club. Une astuce alors que la loi allemande interdit qu’un club porte le nom de son sponsor.
Was für ein Team! #DieRotenBullen #MissaoFinal #UCL pic.twitter.com/Dav44qMWKS
— RB Leipzig (@DieRotenBullen) August 15, 2020
Le milliardaire autrichien Dietrich Mateschitz qui a vendu 7,5 milliards de canettes de Red Bull en 2019 (10 % de plus que l’année précédente) s’est joué de ce handicap. Même si la tête de taureau est devenue l’emblème du sport business décrié par les supporters allemands, il déroule son modèle où "l'économique prime sur le sportif". Il achète des jeunes joueurs au potentiel de valorisation élevé dont les jeunes joueurs français de l’équipe : Nkunku, Mukiele, Konaté ou Upamecano. Il les vend ensuite bien plus cher. Inutile de préciser que gagner une demi-finale, voire une finale de la Ligue des Champions dope la valeur de l’escouade, et donc celle de la boisson énergisante qui finance le club.
Drôle de destin que celui de ces jeunes joueurs millionnaires devenus par afflux de liquidités des grandes fortunes du monde, des placements à la hausse ou à la baisse selon leurs performances sportives. Des jouets de luxe magnifiquement décrit dans un film italien actuellement en salle : "Il Campione", "Le défi du Champion" en Français.
Anne-Catherine Husson-Traore, @AC_HT, Directrice générale de Novethic