Publié le 13 juillet 2017
FINANCE DURABLE
Finance durable : un rapport cadre les missions du groupe d’experts européen
Dans un rapport intermédiaire publié le jeudi 13 juillet, le groupe d’experts européen de haut niveau (HLEG), créé par la Commission européenne, donne des orientations sur ce que pourrait être la finance durable. Les recommandations définitives sont attendues pour la fin de l’année, après des échanges avec les banques, assureurs, fonds de pensions, places financières, sociétés de gestion…

Le rapport d’étape sur la finance durable du groupe d’experts de haut niveau (HLEG), créé par la Commission européenne fin 2016, est accessible en ligne et en anglais, depuis le 13 juillet à midi. Fruit d’intenses semaines de travail et de débats passionnés au sein du groupe d’experts auquel j’appartiens, le rapport d’étape dresse un état des lieux de ce que pourrait être la finance durable. Il donne aussi des orientations sur les recommandations que le groupe d’experts doit préparer pour la fin de l’année afin qu’elle devienne la pratique dominante du secteur financier européen où elle joue encore un rôle mineur.
"La finance durable a deux objectifs", explique Christian Thimann, le président du groupe d’experts de haut niveau (HLEG). "Le premier est d’accélérer le financement d’une économie bas carbone et inclusive qui permette de répondre aux besoins de long terme, en particulier pour les infrastructures. Le second est de préserver la stabilité du système financier notamment en évaluant le poids de risques comme le changement climatique dans l’économie et la finance et plus généralement en intégrant l’analyse des grands défis Environnementaux, Sociaux et de Gouvernance (ESG) dans la gestion financière".
Le rapport de 65 pages va maintenant servir de base aux échanges avec les différentes parties prenantes. Ils devraient être nourris puisque banques, assureurs, fonds de pensions, places financières, sociétés de gestion et autres acteurs de marché observent attentivement le groupe de travail. Ils veulent comprendre quelle vision de la finance durable va émerger de ses travaux et quelles recommandations pourraient être proposées à la fin de l’année.
Pour l’instant, ils vont découvrir de simples orientations qui vont, par exemple, du renforcement du reporting sur l’intégration des dimensions ESG pour les investisseurs à la création d’un réseau d’infrastructures durables européennes en passant par la mise en place d’un "test de compatibilité" avec le développement durable de la législation européenne.
Le rapport dessine aussi les zones d’influence sur lesquelles le groupe va travailler dans les mois qui viennent. Il y en a une douzaine comme les bourses et places financières vertes, domaine où Paris entend jouer un rôle de premier plan à travers l’initiative Finance for tomorrow, mais aussi les grands indices boursiers. Ils sont aujourd’hui la pierre angulaire du système financier, LA référence qui sert à la fois d’outil de mesure de la performance financière et de supports à des placements alignés exactement sur leur composition où sont investis des actifs monumentaux.
Les entreprises du CAC 40 sont aujourd’hui sur une trajectoire de 5,4 degrés
Leur nom est parfois familier comme celui du CAC 40 et ces indices sont l’emblème des grandes entreprises cotées à travers le monde. Or elles y figurent la plupart du temps en raison de leur taille et de leur valeur boursière. Par conséquent ces indices boursiers sont le reflet de l’économie telle qu’elle est aujourd’hui et non pas comme elle devrait être si on veut respecter l’objectif de 2 degrés fixé par l’Accord de Paris.
À titre d’exemple, Hervé Guez, directeur de la recherche et de la gestion actions de Mirova, la société de gestion dédiée à la finance durable du groupe Natixis, a calculé que les entreprises du CAC 40 sont aujourd’hui sur une trajectoire de 5,4 degrés quand on analyse leurs politiques climat. Or développer la finance durable signifie pousser entreprises et investisseurs à faire massivement la transition vers des modèles bas carbone. Rares sont encore les acteurs de marché qui y sont prêts.
À quelle vitesse l’Europe va-t-elle vouloir faire bouger la finance ? De la réponse à cette question dépend la possibilité de prendre le leadership sur le climat que la Chine entend lui disputer.
Anne-Catherine Husson Traore, @AC_HT_ , Directrice générale de Novethic