Publié le 10 novembre 2020
L’investissement responsable a de plus en plus de succès sous l’impulsion d’une meilleure prise en compte des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance par les investisseurs et d'une nouvelle demande des épargnants en quête de placements plus durables. Mais à l’origine, c’est surtout l’éthique qui guide les investisseurs responsables au nom de la religion. Retours sur les racines de l'ISR. 

Face à l’urgence écologique, les investisseurs mettent de plus en plus en avant leurs pratiques d’investissements dits responsables, c’est-à-dire prenant en compte des critères environnementaux comme le climat, sociaux comme l’emploi, ou de gouvernance comme la lutte contre la corruption ou comme l’organisation des pouvoirs dans l’entreprise. En France, on estime l’offre à plus de 700 fonds dits durables pour 278 milliards d’euros d’encours selon le dernier indicateur Novethic. Mais le mouvement est mondial. Tous les grands investisseurs affichent aujourd’hui des fonds de ce type dont BlackRock, le plus grand gestionnaire d’actifs. 
Les origines religieuses de l’ISR
A l’origine pourtant, le mouvement est circonscrit aux communautés religieuses, notamment celle des Quakers qui se développe essentiellement dans les pays anglo-saxons. Au XVIIIème siècle, cette communauté protestante de Grande Bretagne est un acteur économique de premier plan car elle détient les principales industries du pays mais aussi de grandes banques comme la Barclay’s ou la LLoyds. Les préoccupations sociales (conditions de travail, égalité) et le besoin de mettre en cohérence leur éthique personnelle dans tous les pans de leur vie, amènent ses membres à réfléchir à la destination de leurs placements.
Ceux qui émigreront aux États-Unis, souvent contraints à l’exil, font ainsi partie des premiers à refuser d’investir dans le commerce de la guerre ou le trafic d’être humains, bien avant l’abolition de l’esclavage. Il faut cependant attendre les années 1920 pour voir apparaître les premiers fonds éthiques. En 1928, le Pionner Fund de l’Eglise évangélique exclut ainsi toutes les entreprises liées au tabac et à l’alcool.
L’apport des luttes sociales
La forme moderne de l’investissement socialement responsable (ISR) remonte réellement à la fin des années 60 où les luttes sociales mobilisent fortement aux États-Unis marqués par la guerre du Vietnam. C’est l’époque des premières résolutions actionnariales sur les droits des consommateurs et des minorités déposées lors d’Assemblées générales d’actionnaires, notamment par l’avocat et politicien Ralph Nader auprès de General Motors.
C’est aussi l’époque des appels aux boycott des entreprises collaborant avec des régimes controversés, comme l’Afrique du Sud où règne alors l’Apartheid, ainsi que celles responsables de catastrophes écologiques, comme la marée noire provoquée par l’Exxon Valdez. De cette lutte naîtront les premiers fonds ISR comme le Pax World fund créé en 1971 par deux pasteurs américains. En France, c’est encore sous l’impulsion d’une religieuse, sœur Nicole Reille, qu’est créé le premier fonds ISR en 1983.
Aujourd’hui, les investisseurs responsables mondiaux se regroupent sous la bannière des PRI, les Principles for Responsible Investment, fondés par l’ancien secrétaire général des Nations Unies, Kofi Annan. Ils ne se limitent pas aux exclusions. Sorti des seules considérations éthiques sans en être totalement détaché, et avec les travers que peuvent amener sa plus grande diffusion (risque de greenwashing), l’investissement responsable affiche aujourd’hui une nouvelle transformer les entreprises pour qu’elles oeuvrent au bien commun. 
Béatrice Héraud, @beatriceheraud

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