Publié le 10 octobre 2023
ENVIRONNEMENT
La guerre de l’eau est une autre facette de l’affrontement entre Israël et les Palestiniens
L’attaque terroriste du Hamas et la réplique d’Israël ont plongé le pays et la bande Gaza dans une guerre sans merci qui a déjà fait des centaines de morts de part et d’autre. Israël fait le siège du territoire palestinien qu’il bombarde et a coupé "l’eau, le gaz et l’électricité". Dans cette région désertique, l’eau est un élément rare que se disputent les deux populations.

HAZEM BADER / AFP
C’est la plus grande attaque du Hamas envers Israël depuis des décennies. Le 7 octobre au petit matin, le mouvement islamiste, qui contrôle le territoire palestinien de la bande de Gaza, a attaqué par surprise le sud d’Israël, provoquant des centaines de morts et des milliers de blessés. Les terroristes ont pénétré dans une partie du territoire où l’armée israélienne était peu présente puisqu’elle est concentrée sur les régions où le Premier israélien Benjamin Netanyahu appuie la relance de la colonisation des territoires palestiniens à la demande de ses alliés d’extrême droite.
Trois jours après l’offensive du Hamas les combats se poursuivent faisant au moins 1000 morts, 413 Palestiniens de la bande de Gaza seraient décédés et 700 Israéliens ont été tués. En guise de représailles, le ministre de la Défense israélien Yoav Gallant a annoncé le 9 octobre l’imposition d’un "siège complet" de la bande de Gaza. "Pas d’électricité, pas d’eau, pas de gaz, tout est fermé", a indiqué le ministre de la Défense. "Nous combattons des animaux, et nous agissons en conséquence", a-t-il ajouté dans une vidéo.
"L’eau jette de l’huile sur le feu"
L’accès à l’eau est un enjeu crucial dans cette zone qui en manque. "Aujourd’hui, l’occupation menée par l’État d’Israël consiste à garder le contrôle des ressources en eau", explique à Novethic le docteur en géopolitique David Amsellem. Depuis les accords d’Oslo de 1995, Israël s’est vu attribuer 80 % de l’eau provenant de l’aquifère de montagne, dénonce Michaël Lynk, ancien rapporteur spécial de l’ONU sur la situation des droits humains dans les territoires palestiniens occupés.
Si la Banque mondiale estime que seulement 1 % des 2 millions d’habitants de la bande de Gaza ont accès à une eau potable, la Cisjordanie, morcelée en trois zones dont une entièrement contrôlée par Israël, a également soif. Le Jourdain, fleuve qui relie les montagnes du Liban à la mer morte, est détourné à 95 % par les Israéliens, selon Amnesty International.
"L’eau jette de l’huile sur le feu", analyse pour Novethic le chercheur en géopolitique de la pénurie de l’eau, Stefan Deconinck. La problématique de l’accès à l’eau est d’autant plus complexe que l’or bleu est de plus en plus rare dans la région. Dans une zone aride déjà menacée par la désertification, la crise climatique intensifie cruellement le problème. Israël est devenu un exemple mondial dans sa gestion des eaux usées. 86 % des eaux sont recyclées, contre 1 % seulement en France par exemple.
Le changement climatique n’a pas de frontière
La désalinisation de l’eau de mer est également un procédé particulièrement développé dans le pays, même si ce traitement est critiqué par les ONG environnementales pour son rejet de sel au large. "L’eau peut aussi éteindre le feu et devenir un élément de contribution à une solution de paix", fait valoir Stefan Deconinck qui cite des coopérations entre la Jordanie, Gaza et Israël autour de cette problématique.
L’expert évoque des échanges entre Israël, qui a besoin d’espace pour implanter ses panneaux solaires et réaliser ses objectifs climatiques, et la Jordanie, qui n'a pas la capacité d’obtenir de l’eau douce par désalinisation. De même, la problématique des eaux usées de Gaza impacte directement Israël. "C’est dans l’intérêt d’Israël, qui a besoin d’une certaine qualité d’eau de mer pour la dessaliniser, de permettre à Gaza de purifier son eau en lui donnant accès à de l’électricité", défend Stefan Deconinck.
Difficile d’imaginer en pleine guerre un dialogue de coopération entre ces territoires qui se déchirent mais "le changement climatique n’a pas de frontière", souligne l’expert. Ceci dit la diplomatie de l’eau ne pourra reprendre que quand les armes se tairont. L’attaque du Hamas qualifiée de "11 septembre israélien" a changé la donne et pourra peut-être relancer à terme le processus de paix tant la situation actuelle est intenable pour tous.