Publié le 12 avril 2021

ÉCONOMIE

Scandales financiers en chaîne : quand la finance (re)commence à s’emballer

Archegos, Greensill, arnaque à Hollywood… Les affaires de débâcle financière s’enchaînent depuis quelques mois. Qu’il s’agisse de faillites inattendues, de fraude patentée ou encore d’arnaque pure et simple, ces affaires montrent le visage d’une partie peu reluisante du monde financier, dans laquelle l’appât du rendement semble faire oublier toute notion de maîtrise des risques.

Leonardo Di Caprio le loup de Wall Street
Leonardo Di Caprio jouait le rôle de Jordan Belfort, un coutier en bourse, dans le Loup de Wall Street.
@AppianWay

Les affaires sont de nature très différente. Elles se déroulent dans des sphères éloignées, financement des entreprises pour Greensill, système de paiement pour Wirecard, produits dérivés pour Archegos Capital, spéculation sur des matières premières agricoles fantômes pour Cody Easterday… Mais elles présentent néanmoins des points communs. La complexité des montages utilisés d’une part, mais aussi les risques immodérés pris pour maximiser les rendements qui, en pleine crise sanitaire et économique, ne tiennent plus. La fraude, l’arnaque sont également de la partie. Leur quasi-concomitance, surtout, est particulièrement inquiétante. Passage en revue des scandales financiers de ces derniers mois.

Schéma de Ponzi à Hollywood

L’expérience Bernard Maddoff n’aura-t-elle servi à rien ? L’acteur Zach Avery, Zach Horwitz de son vrai nom, a importé l’idée du schéma de Ponzi à Hollywood. Ce comédien à la carrière peu brillante proposait d’investir dans les droits de films qu’il était censé revendre avec un bénéfice à Netflix et HBO. À la clé, la promesse alléchante d’un rendement de 35 % pour un investissement "sûr". Il n’a en fait jamais acheté aucun droit, et se contentait de cumuler les investissements de ses clients (près de 690 millions de dollars en cinq ans), en remboursant les premiers arrivés avec l’argent des derniers. Il a été arrêté par le FBI début avril après n’avoir pas pu honorer plusieurs remboursements.

Archegos, le fonds qui fait perdre des milliards aux banques

C’est un pari très risqué auquel s’est livré Bill Hwang. Le fondateur d’Archegos Capital Management s’était fait une spécialité des produits dérivés qui lui permettaient d’emprunter des sommes colossales aux banques pour parier sur la hausse des actions d’entreprises technologiques. Tant que l’action montait, ça tenait. Le jour où les valeurs technologiques ont dégringolé, les banques ont tout vendu pour récupérer leur mise et Archegos s’est écroulé. Le fonds, dont les positions ont atteint jusqu’à 50 milliards de dollars, a entraîné avec lui les banques qui n’ont pas été assez rapide pour céder leurs positions, comme Crédit Suisse ou la japonaise Nomura. Ce montage financier risqué, qui rappelle les folies de l’avant crise de 2008, est passé totalement entre les gouttes de la réglementation bancaire actuelle… Et les banques alléchées par les rendements juteux n’ont pas hésité à faire confiance à Bill Hwang, pourtant condamné par le passé pour délit d’initié.

Cody Easterday, le trader aux faux bovins

Tyson Foods, un industriel américain de la viande, payait Easterday Ranches pour acheter, élever et revendre avec un profit des bœufs. Mais Cody Easterday, le dirigeant du ranch, avait un autre plan. Il utilisait l’argent de Tyson pour boursicoter sur le marché des matières premières et, souvent, pour couvrir ses paris malheureux. Jusqu’au jour où Tyson s’est rendu compte que Easterday Ranches lui envoyait des fausses factures. Et que les 200 000 têtes de bétail que l’industriel croyait posséder n’existaient pas.

Greensill, l’affacturage inversé dans la tourmente

Le britannique Greensill s’est construit autour d’une technique financière peu connue, l’affacturage inversé. L’établissement financier joue les intermédiaires entre une société et ses fournisseurs : il paye directement les fournisseurs dans des délais réduits en prélevant une commission et se fait ensuite rembourser par la société. Mais Greensill a trop misé sur un gros client, le sidérurgiste GFG Alliance. Des difficultés de paiement sont apparues et l'entreprise n'a plus pu payer. Quand les assureurs-crédit se sont désengagés, le montage de Greensill s’est effondré. Entraînant avec lui des banques, dont le Crédit Suisse, qui assuraient le financement des opérations, et des épargnants, auprès desquels Greensill commercialisait des solutions d’épargne.

Wirecard, le scandale comptable

Le pot-aux-roses a été découvert en 2019. Wirecard, la fintech membre du Dax 30 (le CAC 40 allemand), véritable pépite de la tech allemande, n’était pas toute blanche. Plusieurs enquêtes du Financial Times avaient pourtant alerté sur les pratiques comptables de la société spécialiste des systèmes de paiement. Mais il a fallu le refus de certification des comptes par EY en 2019 pour que le château de cartes s’effondre. Il manquait 1,9 milliard d’euros dans les comptes officiels et certifiés. Le scandale Wirecard a obligé la BaFin, le gendarme financier allemand, à revoir ses procédures de contrôle.

Arnaud Dumas, @ADumas5


© 2023 Novethic - Tous droits réservés

‹‹ Retour à la liste des articles

POLITIQUE

Politique

Les acteurs politiques sont les seuls à même d'activer les grands leviers qui permettront, à grande échelle, la transformation responsable de l'économie et de la finance. Des conditions sine qua nonpour s'orienter vers un modèle soutenable.

Gabon coup d etat septembre 2023 AFP

Coup d'État au Gabon : une économie pétrolière dominée par les entreprises françaises

Plus de 80 grandes entreprises françaises ont des filiales au Gabon dont Eramet, qui exploite le manganèse, les compagnies pétrolières TotalEnergies, Perenco ou encore Maurel&Prom, et l’acteur financier Meridiam. À l’annonce du coup d’État du 30 août, les entreprises cotées ont fait un plongeon...

Universites d ete EELV aout 2023 rappeur medine LOU BENOIST AFP 01

L'été de tous les dangers climatiques ne pénètre pas le champ politique, en France comme ailleurs

Des universités d'été des partis EELV et LFI ont retiendra la polémique autour du rappeur Médine et la proposition de Ségolène Royal pour prendre la tête d'une liste de gauche. Autour des réunions organisées par Gérald Darmanin ou Éric Ciotti, il n’aura été question que des personnalités qui y...

Frans Timmermans Pays Bas Commission europeenne Greg Baker AFP

Premier test électoral pour le Green deal aux Pays-Bas

Porteur et incarnation du Green deal européen, le vice-président de la Commission Frans Timmermans, a démissionné pour prendre la tête d’une liste sociale-démocrate et écologiste aux Pays-Bas aux législatives anticipées de l’automne. S’il l’emporte, il pourrait diriger le pays. Mais il fait face à...

Campagne greenpeace elections espagnoles 23J Greenpeace

L’Espagne fait barrage à l’extrême droite et protège ainsi le Pacte vert européen

Les Espagnols étaient appelés aux urnes dimanche 23 juillet pour des élections législatives anticipées. Alors que la droite était donnée grande gagnante, elle n’a finalement devancé le parti socialiste que de quelques voix. Ce résultat est un coup de frein aux stratégies d’alliance entre partis de...