Une piscine à fond transparent, un cinéma, un practice de golf... "Symphony", le méga-yacht du patron du groupe de luxe LVMH Bernard Arnault, a de quoi se faire remarquer. Au total, le navire de six étages fait la taille d'un stade de foot. Problème, ce n'est adapté à tous les ports. Le 23 juin dernier, le géant s'est ainsi vu recaler du port de Mergellina, à Naples.

Depuis cet été, la capitainerie impose une limite. Les navires de plus de 75 mètres, soit tout de même la longueur d'un Airbus A380, n'ont plus le droit d'y entrer pour "raison de sécurité". Ces immenses bateaux gênent les autres en masquant par exemple la signalisation. Avec ses 101 mètres de long, le "Symphony" a donc été obligé d'attendre dans la baie de Naples avant de trouver une autre solution. Un peu plus tôt, c'est le yacht d'un milliardaire américain, Barry Diller, long de 90 mètres, qui avait subi le même sort. À titre de comparaison, si on alignait trois de ces méga-yachts, ils occuperaient la même place que le plus grand paquebot du monde.

Des ultra-méga yachts en construction

L'ensemble des ports de plaisance de Naples ont désormais une limitation. Toutefois, l'agrandissement d'un autre espace est à l'étude afin de pouvoir accueillir ces colosses, indique l'Amiral Vella dans le média italien Il Mattino. De quoi rassurer le président de l'Union industrielle de Naples, qui met en avant le caractère stratégique des yachts. Selon lui, "des réunions de plusieurs dizaines de personnes y ont lieu, à l'abri des regards indiscrets, avec un résultat direct de dizaines de millions d'investissements", rapporte le quotidien.

La folie des grandeurs de ces milliardaires rencontrent parfois des obstacles. Ainsi, le fondateur d'Amazon, Jeff Bezos avait défrayé la chronique avec son yacht de 127 mètres de long, en construction dans le port de Rotterdam. Il ne pouvait en sortir à cause d'un pont historique, le De Hef, trop bas. Solution envisagée : le démonter. Toutefois, face aux critiques, celle-ci n'a finalement pas été retenue.

Un impact carbone colossal

L'existence même de ces engins interroge du point de vue écologique. Selon le compte Twitter @YachtCO2Tracker, le "Symphony" aurait rejeté 1 250 tonnes de CO2 en un mois, lors d'une croisière en Méditerranée. C'est l'équivalent de l'empreinte carbone moyenne de 150 Français en un an.

Le mode de vie des ultra-riches est de plus en plus critiqué à l'heure où chacun doit réduire ses émissions de CO2. Les contestations ont commencé avec les jets privés, ces moyens de déplacement en moyenne 10 fois plus carbonés par passager que des vols de ligne. En particulier, les vols de cinq patrons français, dont Bernard Arnault, avaient été épinglés par le compte twitter @i_fly_bernard. En juillet 2022, ils avaient émis 520 tonnes de CO2, c'est-à-dire l'empreinte annuelle moyenne de 52 français.

Outre l'impact environnemental, se pose aussi la question d'une transition juste. Alors que les centres urbains français limitent de plus en plus l'accès aux véhicules les plus polluants au travers des ZFE (zones à faible émission), les yachts et jets privés ne subissent pas de régulation équivalente. Les critiques émises à leur égard reflètent le besoin de justice sociale dans la transition écologique. Selon une étude de l'Ademe, 66% des Français se montrent prêts à changer leurs mode de vie ... à condition que les efforts soient partagés. Seuls 12% accepteraient des changements sans condition.

Fanny Breuneval