Publié le 30 août 2022
ÉCONOMIE
Bientôt des "ambassadeurs de la sobriété" dans les entreprises pour accélérer leur transformation
Depuis l’Université d’été du Medef, Elisabeth Borne encourage les chefs d’entreprises à créer des postes "d’ambassadeurs de la sobriété". Elle enjoint les sociétés à tout faire pour éviter "les coupures subies" autrement les entreprises seraient les "premières touchées" en cas de "rationnement" énergétique. Mais les mesures non contraignantes prises par les entreprises pourraient ne pas être suffisantes pour passer l’hiver.

ERIC PIERMONTPOOL / AFP
"Si chacun ne prend pas sa part, des coupures brutales de gaz pourraient avoir lieu, du jour au lendemain, avec de graves conséquences économiques et sociales", alerte Elisabeth Borne depuis l’Université d’été du Medef. La Première ministre appelle ainsi les sociétés à établir en septembre des "plans de sobriété" énergétique pour "arrêter dès maintenant toutes les consommations d’énergie qui ne sont pas indispensables".
Le but est de réduire de 10 % la consommation énergétique d’ici deux ans, par rapport à 2019, et de "préférer les économies choisies plutôt que les coupures subies", lance la cheffe du gouvernement. "Si nous devions en arriver au rationnement, les entreprises seraient donc les premières touchées", met en garde la locataire de Matignon. Pour éviter ce scénario, elle retient "l’idée d’un ambassadeur de la sobriété dans chaque entreprise. Ce modèle avait bien fonctionné avec les référents Covid".
Le télétravail, une mesure efficace
Des entreprises n’ont pas attendues les incitations de la Première ministre pour passer à l’acte. "Nous venons de nommer un Chief impact officer qui sera aussi responsable de l'application de mesures de sobriété", avance Yves Benchimol CEO de Weward. "Nous encourageons la mobilité douce auprès de nos salariés et notamment la marche à pied", soutient le patron de l'application mobile. "Nous allons aussi procéder à des mesures des impacts en interne et en externe de nos initiatives " ajoute le responsable pour qui l’objectif de baisse de 10% de consommation énergétique est "largement atteignable". Le chef d’entreprise est également un partisan du télétravail pour les salariés qui le souhaitent là encore pour réduire les consommations d’énergie.
Même enthousiasme de Limvirak Chea, CEO de Fixter qui veille au sein de sa structure à la bonne application des gestes simples comme "éteindre la lumière ou le chauffage le week-end". Le co-fondateur de la start-up qui simplifie l’entretien automobile affirme qu’il va "formaliser et renforcer l’ensemble de ses gestes d’économie d'énergie en nommant un responsable". Il va aussi "encourager ces mesures de sobriété énergétiques auprès de ses clients".
Le chef d’entreprise souligne en outre avoir encouragé le télétravail 3 jours par semaine pour ses salariés. Le passage au télétravail régulier est une des mesures les plus efficaces. Selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), qui a fait 10 propositions pour consommer moins d'énergie, ce levier serait le plus efficace s’il était mis en place trois jours par semaine, juste devant la réduction de la vitesse sur autoroute de 10 km/h et la limitation de la voiture individuelle (covoiturage, autopartage).
Un calendrier serré
"Nous devons collectivement entrer dans une croissance sobre", a de son côté reconnu le président du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux. Le patron des patrons a par ailleurs défendu la notion de "capitalisme décarboné" et soutient que la "première préoccupation de nos adhérents est le basculement complet du système entrepreneurial français". Le responsable syndical affirme que son mouvement est prêt à relever ce défi et défend ainsi la "planification écologique afin de fixer des règles à l’avance pour les entrepreneurs". Il promet que les entreprises "feront leur part".
Le gouvernement a répondu aux attentes du Medef en n’imposant, pour l’instant, aucune mesure contraignante aux entreprises. Le plan de sobriété doit être élaboré en septembre et un premier bilan sera dressé fin septembre ou début octobre. Le gouvernement n'exclut pas des mesures contraignantes si, à la fin, ces mesures d'économies mises en œuvre se révèlent insuffisantes. Ce calendrier n’effraie pas les patrons : "Il est à la hauteur de ce que l’on vit", souligne Yves Benchimol CEO de Weward.
Pourtant, les mesures évoquées pourraient ne pas être suffisantes pour passer l’hiver. "On trottine lentement derrière un climat qui change vite. L’action se met en place, et monte en puissance, mais elle n’est pas encore à la hauteur", déplore la climatologue Valérie Masson Delmotte dans un entretien au Monde publié le 16 juillet.
Mathilde Golla @Mathgolla