Publié le 21 décembre 2021
ÉCONOMIE
Passer des fêtes sans s'étriper : non, l'écologie n'est pas "un truc de riches bobos"
Hausse du prix de l’essence, coût élevé des nourritures saines et locales… l’oncle Albert profite des fêtes en famille pour exposer son scepticisme face aux mesures pour lutter contre le changement climatique qui ne prennent pas en compte la réalité sociale. Faut-il donc ne rien faire ? Le concept de transition juste cherche justement à lutter à la fois contre le changement climatique et les inégalités sociales. Profitez de la magie des fêtes et des repas en famille pour éclairer votre entourage et, qui sait, peut-être les convaincre. Après tout, la magie de Noël fait des miracles !

@CCO
"La provenance des aliments ? Moi, je prends le moins cher et c’est tout", tranche l’oncle Albert, au milieu du dîner de Noël qui, pour la première fois cette année, était un repas locavore. Faire vivre l’économie locale, ça ne l’intéresse pas. Manger des aliments dont le bilan carbone est raisonnable, peu lui chaut. "Et ne me lance pas sur le prix de l’essence ! Les bobos veulent tous nous faire rouler à l’électrique, tu sais combien ça coûte une voiture électrique ?", continue-t-il. La litanie habituelle contre les "lubies des bobos" était lancée.
L’oncle Albert a toujours eu tendance à ne voir le monde que sous un seul angle, le plus négatif. La fin du moteur thermique prévue en 2040 en Europe, le prochain mécanisme de taxation carbone aux frontières de l’Union européenne, le développement des énergies durables… Il met tout dans un même sac ! Selon lui, les mesures visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre, à lutter contre la pollution ou à préserver la nature sont un luxe que tout le monde ne peut pas s’offrir. Une poignée de bobos sans problèmes de fin de mois veulent à tout prix nous les imposer pour s’acheter une bonne conscience écologique.
La transition vers une économie neutre en carbone va, certes, coûter cher. Les montants d’investissements nécessaires pour transformer nos infrastructures se comptent à coup de centaines de milliards. Rien qu’en Europe, le Pacte vert lancé par la Commission prévoit d’investir 1 000 milliards d’euros en dix ans pour contribuer à atteindre la neutralité carbone du continent. Mais l’oncle Albert oublie que, si on ne change pas nos modes de vie, l’addition sera encore plus salée. Dès 2006, le célèbre rapport Stern sur l’économie du changement climatique, rédigé par l’économiste Nicholas Stern pour le gouvernement britannique, a démontré que le coût de l’inaction était bien plus élevé que celui de l’anticipation du changement climatique.
Ne pas accentuer les inégalités sociales
L’actualité le démontre déjà régulièrement. La multiplication d’événements climatiques extrêmes engendre des coûts de plus en plus importants, qui pèsent notamment sur les plus défavorisés. Le courtier en assurance Aon publie tous les ans un rapport sur le coût des catastrophes naturelles et climatiques, et voit ce coût augmenter régulièrement. En 2020, il a atteint 268 milliards de dollars dans le monde, dont seuls 97 milliards de dollars ont été remboursés par les assurances.
Là où l’oncle Albert a raison, c’est que la transition vers un modèle bas carbone ne doit pas accentuer les inégalités sociales, au risque de bloquer la machine. Mais, plutôt que de ne rien faire, il faut au contraire que les États intègrent une dimension sociale à celle de la lutte contre le changement climatique. Le concept de transition juste fait ainsi son chemin. L’Accord de Paris, adopté à la COP21 de 2015, intégrait ainsi la nécessité de créer des emplois décents pour accompagner la transition. L’idée a ensuite été affinée pour ne pas prendre en compte la seule dimension de l’emploi, mais aussi celles des inégalités.
Arnaud Dumas, @ADumas5