Publié le 24 février 2021
ÉCONOMIE
La tendance à la réparation est si forte qu'elle met sous tension le métier de réparateur
Les distributeurs recrutent à tour de bras des réparateurs. Le dernier en date, Fnac Darty, vient d'annoncer vouloir renforcer son équipe de 500 techniciens supplémentaires pour développer sa filière de réparation. La demande des consommateurs est si forte que les entreprises notent une pénurie de main d'oeuvre. Certaines prennent les devants, comme la startup spécialisée Murfy qui a décidé d'ouvrir sa propre école pour pouvoir répondre au boom de la demande.

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[Mise à jour le 24 février] Si vous cherchez à vous reconvertir, le métier de réparateur est un emploi d’avenir que toutes les entreprises de l’électroménager, de la téléphonie, de l’informatique s’arrachent en ce moment. Le groupe Fnac-Darty, qui emploie déjà 2 500 techniciens de réparation, a annoncé en recruter 500 supplémentaires pour "développer" sa "filière de réparation d'appareils" a annoncé le 24 février le directeur général du groupe, Enrique Martinez. Une vraie bonne nouvelle alors que le chômage explose avec la pandémie de Covid-19.
Il faut dire que les pouvoirs publics ont considérablement boosté cette tendance à la réparation avec l’apparition d’un nouvel étiquetage : l’indice de réparabilité. Depuis le 1er janvier, sur les lave-linge, les smartphones ou encore les ordinateurs, les producteurs doivent obligatoirement apposer un indice qui évalue, sur une note de 1 à 10, le degré de réparabilité du produit en fonction de la disponibilité des pièces détachées ou encore du coût de la réparation. La ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, espère ainsi qu’en 5 ans, le taux de pannes donnant lieu à une réparation passe de 40 % à 60 %.
Dans cette perspective, les entreprises se mettent en ordre de marche. "Nous voulons (...) partager des centaines de milliers de données" sur les "milliers de réparations réalisées ces dernières années et "mettre l'accent sur les produits qui tombent le moins en panne", a expliqué Enrique Martinez sur RTL.
Des consommateurs avertis
"L’indice de réparabilité va permettre de sensibiliser les consommateurs et de les guider. Le prix ne sera plus le seul critère d’achat", espère Lætitia Vasseur co-fondatrice de l’association Halte à l’obsolescence programmée. "Surtout, cet indice apporte plus de transparence et va ainsi pousser les fabricants à améliorer la réparabilité de leurs produits. D’autant qu’en 2024, la loi prévoit le développement d’un indice de durabilité, qui devrait indiquer la durée de vie des produits, leur robustesse, leur fiabilité… Cela marque un vrai tournant", croit-elle.
Pour l’instant, les freins sont encore nombreux. À commencer par le déficit de réparateurs sur le marché. Une pénurie que tous les cyclistes ont pu constater avec l’opération "Coup de Pouce Vélo" du gouvernement qui offrait une prise en charge jusqu’à 50 euros de la remise en état d’un vélo. Ce fut un succès avec un million de réparations contre les 300 000 espérés, au point que la main-d’œuvre a manqué. Barbara Pompili a ainsi annoncé la création d’une Académie du vélo avec la formation à terme de 500 réparateurs. Mais tous les secteurs sont concernés. La startup Murfy, spécialiste de la réparation et du reconditionnement de l’électroménager, connaît bien le problème.
Murfy va former ses réparateurs
Face à l’explosion de la demande, elle a décidé d’ouvrir sa propre école et de former en vitesse ses futurs réparateurs. "Il y a un vrai engouement autour de la réparation. Chaque mois, nous réparons en moyenne 5 000 appareils. Le vrai frein à notre développement aujourd'hui, c'est le manque de techniciens", confirme Guy Pezaku, co-fondateur de la startup. Si la réparation a autant le vent en poupe c’est qu’elle répond à un double défi : la lutte contre l’obsolescence programmée et la baisse du pouvoir d’achat. Car faire réparer c’est aussi un gain économique.
Une récente étude de l’Agence de la transition écologique (Ademe) a ainsi montré que réparer une tondeuse thermique qui tombe en panne au bout de 5 ans, soit à la moitié de sa vie, permet une économie de 86 euros par an et une économie totale de 430 euros pendant sa durée d’allongement. Mais tout n’est pas affaire de réparation. L’obsolescence est aussi culturelle. Garder son smartphone au lieu d’en racheter un autre plus "tendance" permet d’économiser près d’une centaine d’euros par an et, en plus, de limiter son impact environnemental.
Marina Fabre, @fabre_marina